Evolution

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France, 2015
De Lucile Hadzihalilovic
Scénario : Lucile Hadzihalilovic
Sortie : 16/03/2016
Note FilmDeCulte : *****-
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Nicolas, onze ans, vit avec sa mère dans un village isolé au bord de l’océan, peuplé uniquement de femmes et de garçons de son âge. Dans un hôpital qui surplombe la mer, tous les enfants reçoivent un mystérieux traitement. Nicolas est le seul à se questionner...

L'ÎLE MYSTÉRIEUSE

« Tu veux que je te montre un secret? » Cette réplique d'Évolution pourrait s'appliquer à la filmographie entière de la très précieuse Lucile Hadzihalilovic (lire notre entretien), de son précédent long Innocence en passant par le moyen métrage La Bouche de Jean-Pierre ou le récent court Nectar. La réalisatrice a le goût du mystère mais ce n'est pas un mystère qui minaude, contrairement à d'autres productions fantastiques qui n'ont pas nécessairement grand chose à dire. On ne répond certes pas à toutes les questions dans Évolution - mais quelle drôle et triste conception du cinéma que d'y voir un QCM où chaque question possède sa réponse dans une case. Comme dans Innocence, le mystère chez la réalisatrice a une dimension ludique, avec des découvertes qui se dévoilent petit à petit. Si le film se déroule devant nos yeux, il y a aussi cette confiance en un public qui sera capable de faire son propre film, d'interpréter les codes : c'est le propre de la fable et celle-ci s'exprime à merveille dans l'étrange décor dressé par la cinéaste.

Évolution se déroule t-il sur une plage noire de Lanzarote ou sur la Lune ? Sur l'île inquiétante des Révoltés de l'an 2000 ou au sein de la ville isolée de Voyage of Rock Aliens, dans laquelle s'époumonent Pia Zadora et Jermaine Jackson ? Pour les spectateurs les plus joueurs, l'art de l'étrangeté de Lucile Hadzihalilovic est un bonheur. Une étrangeté qui se retrouve également dans les singuliers choix de casting, de Julie-Marie Parmentier en maman livide à Roxane Duran en infirmière taiseuse.

Mais de quoi parle Évolution ? On craint d'appauvrir le film en lui donnant une unique grille de lecture, mais il est assez facile d'y voir le pendant masculin d'Innocence. Sans rien dévoiler sur Évolution, le début et la fin sont assez voisins de ceux du précédent long métrage de la réalisatrice. Ce qui se passe n'a pourtant pas grand chose à voir. Lorsque Hadzihalilovic ouvre Innocence sur un courant d'eau tumultueux, Évolution débute par des eaux paisibles, paradisiaques en apparence. Le film, visuellement très composé, est plastiquement à tomber par terre. Hadzihalilovic collabore avec Manu Dacosse, qui s'était déjà illustré chez Hélène Cattet et Bruno Forzani. Alors qu'Innocence était un film assez lumineux et séduisant, à l'image des nœuds et rubans colorés des jeunes héroïnes, Évolution est sombre et se déroule essentiellement dans la pénombre. Lorsque le jeune héros regarde, de nuit, à travers sa fenêtre, on croirait voir un fascinant cliché d'Hiroshi Sugimoto.

Évolution est beau, il est aussi inquiétant. La sueur perle sur la peau, les murs suintent et quelque chose se trame. Le film s'aventure dans les vertiges de la science-fiction pour parler de l'intime : après les récits d'apprentissage féminins d'Innocence, on assiste ici à la puberté de jeunes garçons. Leurs corps se transforment et la réalité aussi. La dimension perturbante de ce changement est traitée à la façon d'un cauchemar. Si le corps féminin à la puberté a pu être abordé de nombreuses fois au cinéma, l'équivalent masculin est beaucoup plus rare – en tout cas aussi sérieusement. On détourne et désamorce plus volontiers le corps masculin par la comédie, ce qui permet d'en parler... sans trop s'exposer. Il y a ainsi une certaine ironie à constater qu'il a fallu une femme, aidée d'une autre, co-scénariste (Alante Kavaïte, révélée l'an passé avec Summer) pour saisir ce sujet avec autant de sérieux. Ce qui n'empêche pas un traitement poétique et déstabilisant : à plusieurs reprises durant Évolution, on se dit qu'on n'a jamais vu ça avant. Combien de longs métrages peuvent s'en vanter ?

par Nicolas Bardot

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