Wassup Rockers

Wassup Rockers
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Wassup Rockers
États-Unis, 2006
De Larry Clark
Scénario : Larry Clark, Matthew Frost
Avec : Francisco Pedrasa, Luis Rojas-Salgado, Yunior Usualdo Panameno, Eddie Velasquez, Jonathan Velasquez, Milton Velasquez
Durée : 1h46
Sortie : 05/04/2006
Note FilmDeCulte : ****--

Une bande de jeunes latinos vit de skate et d'eau fraîche dans le ghetto de South Central à Los Angeles. Ils décident de se rendre en bus à Beverly Hills afin de pratiquer tranquillement leur passion, loin des tensions de la rue.

ENFANTS DES RUES

On avait quitté Larry Clark avec Ken Park, brûlot sur le fossé générationnel aux Etats-Unis, co-réalisé avec Ed Lachman, le chef-opérateur de Loin du Paradis. Wassup Rockers marque peut-être une évolution profonde dans l’œuvre du cinéaste américain. Apaisé et souvent lumineux, son nouveau film peut s’envisager comme une nouvelle version, onze après, de Kids, son premier long métrage coup de poing. Sauf que le discours moralisateur et militant a cédé la place à un regard chaleureux et tendre. Larry Clark a toujours aimé les adolescents qu’il met en scène mais n’avait jamais osé approcher le documentaire pour limiter son discours aux seules images brutes. La première partie de Wassup Rockers, de loin la plus réussie, tranche avec les visions cauchemardesques de gamins livrés à eux-mêmes de Kids, déjà cité, ou de Bully. La vie est dure certes, la mort peut frapper à chaque coin de rue mais Kiko, Jonathan et les autres ont trouvé un refuge, une façon de vivre et d’être, sans violence ni délinquance. Larry Clark, formidable photographe, est aussi un grand réalisateur. En quelques séquences – le morceau de musique, la scène de skate, le regroupement matinal -, il capte ce qui unit cette bande de potes latinos, définitivement affranchis des règles du ghetto.

GANG OF L.A.

"Je ne suis pas mexicain, je suis guatémaltèque", explique Jonathan à un flic de Beverly Hills, totalement dépassé par les événements. Les questions de l’identité et du territoire sont au centre de la filmographique de Larry Clark. La couleur de peau, le style vestimentaire, le langage, autant de signes distinctifs d’une communauté qu’il faut absolument adopter pour s’intégrer. La seconde partie, plus démonstrative et donc plus poussive, envoie les jeunes skaters des bas quartiers parmi les nantis, et touche de près à la lutte des classes. Là encore, le cinéaste fait preuve d’une grande douceur, même s’il montre la déchéance ridicule d’une caste de privilégiés amoureux du naturel des garçons. Si parfois Wassup Rockers tourne à la farce outrancière, Larry Clark réserve encore aux spectateurs quelques moments de grâce suspendue. La discussion presque théorique entre Kiko et une jeune fille riche, dans la chambre de celle-ci, évite tout long discours. A la fin de Ken Park, il mettait déjà en scène un Eden adolescent loin de la folie du monde adulte. Accusé souvent d’être un pornocrate pédophile, Larry Clark apporte ici la plus belle des réponses. Doux et fragile, Wassup Rockers est une ode à l’innocence même si personne, et surtout pas les enfants, n’est dupe de la dureté du monde.

par Yannick Vély

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