Paradis: Espoir

Paradis: Espoir
Envoyer à un ami Imprimer la page Accéder au forum Notez ce film
Paradis: Espoir
Paradies: Hoffnung
Autriche, 2012
De Ulrich Seidl
Scénario : Veronika Franz, Ulrich Seidl
Durée : 1h40
Sortie : 24/04/2013
Note FilmDeCulte : *****-
  • Paradis: Espoir
  • Paradis: Espoir
  • Paradis: Espoir
  • Paradis: Espoir
  • Paradis: Espoir

Mélanie passe ses vacances d’été dans un centre d’amaigrissement très strict. Entre les activités sportives, les conseils nutritionnels, les batailles d’oreillers et les premières cigarettes, elle tombe sous le charme du directeur du centre, un médecin de 40 ans son aîné. Elle l’aime comme on aime la toute première fois et cherche désespérément à le séduire. Conscient que cet amour est impossible, il tente de lutter contre le sentiment de culpabilité qui l’envahit. Melanie avait imaginé son paradis bien différemment…

Paradis Espoir, présenté à la Berlinale 2013, est le dernier volet de la trilogie Paradis d’Ulrich Seidl. Une trilogie consacrée à quoi exactement ? A première vue, l’œuvre semblait avant tout se focaliser sur des paradis en carton, sur des femmes à la recherche du bonheur au mauvais endroit : dans l’amour, dans la foi, et aujourd’hui dans un double espoir d’une cure d’amaigrissement et d’un premier amour. Mais maintenant que la trilogie est close, elle peut également se lire comme une œuvre sur les corps humains, comme Seidl le déclarait lui-même dans notre interview. Les corps avides de désirs et dorés au soleil de Paradis: Amour ont fait place à ceux gauches et encombrants d’adolescents enrobés. Ce n’est pas pour rien que les personnages de Seidl sont tous à la recherche du paradis : ils sont en enfer, cadenassés dans des corps et des identités sociales trop étriquées pour leurs désirs. L’art saisissant du cadrage de Seidl prend alors un sens plus profond. Loin de créer des miroirs grossissants pour caricaturer ce qu’il filme, Seidl utilise avant tout la symétrie et les plans larges pour mieux cerner son sujet. Pour regarder les choses en face sans artifice.

Mais voir la vérité en face n’est pas la même chose que jouer au voyeur ou au moralisateur. L’œuvre du réalisateur autrichien est à ce niveau bien plus subtile qu’il n’y parait. La frontalité de sa mise en scène et l’apparente brutalité de ses personnages qui appellent un chat un chat est sans cesse contrebalancée par un humour improbable et inattendu. Seidl déclare en effet vouloir débusquer la frontière entre le rire et le moment où le deuil commence. C'est-à-dire non pas se moquer et rendre la violence comique, mais avoir l’honnêteté de reconnaître que l’humour peut potentiellement naître de toutes les situations. De l’humour il y en a d’ailleurs à revendre dans ce dernier volet, un rire moins jaune et encore plus assumé que dans les précédents volets. Le public berlinois semble d’ailleurs prendre la chose avec beaucoup de simplicité : lors de la projection du samedi, le public (et non la presse) riait de manière totalement décomplexée, allant jusqu’à joyeusement applaudir au rythme de la chanson du générique de fin. On imagine mal la même chose à Cannes où l’accueil fut plutôt glacé. Décalage culturel ? En tout cas cet accueil est venu confirmer que les films de Seidl sont également des comédies, et ce n’est pas un gros mot.

Des films pleins d’humour, mais pas que. Les longs-métrages de Seidl ne seraient effectivement pas aussi percutants sans le réalisme glaçant qui les caractérise. Comme chez Solondz, la profondeur des personnages et des situations nait d’un sens du pathétique souvent cinglant. Aussi dramatiques que soient ces personnages, à accepter d’être traités comme des moutons, à se vautrer dans la drague minable ou à croire qu’un hôpital puisse être le paradis, Seidl ne les juge jamais. Il reste toujours à leur niveau et nous également. Ce qui pourrait passer pour une fascination pour le glauque n’est en réalité rien d’autre que de l’ultra-réalisme : ces personnages ont tous un pied en enfer, mais nous aussi.

par Gregory Coutaut

Commentaires

Partenaires