Bruegel, le moulin et la croix

Bruegel, le moulin et la croix
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Bruegel, le moulin et la croix
Mill and the Cross (The)
Pologne, 2011
De Lech Majewski
Scénario : Michael Francis Gibson, Lech Majewski
Avec : Rutger Hauer, Charlotte Rampling
Photo : Lech Majewski, Adam Sikora
Musique : Lech Majewski, Józef Skrzek
Durée : 1h32
Sortie : 28/12/2011
Note FilmDeCulte : ****--
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Les histoires de 12 des 500 personnages représentés dans le tableau de Pieter Bruegel, “La montée au calvaire”.

NUMÉRO D'ART

Bruegel l’ancien serait-il à la mode ? Après avoir brûlé avec beaucoup d’élégance dans Melancholia , voici son œuvre décortiquée sous toutes ses coutures dans ce film bien singulier. Documentaire ? Fiction ? Expérimental ? Bien malin celui qui arrivera à trouver la case correspondante à ce projet hors-normes : donner vie non seulement à un tableau, mais à ses personnages. A la base du film il y a un tableau de Bruegel l’Ancien : « La Montée au calvaire » et ses centaines de protagonistes, piochant à la fois dans l’histoire européenne la plus concrète (l’inquisition espagnole, les guerres de religions) et le symbolisme (l’arbre de vie et l’arbre de mort). Le film de Lech Majewski parvient à retranscrire l’atmosphère à la fois mélancolique et inquiétante du tableau par une richesse picturale assez hallucinante, où chaque plan est d’une très grande beauté. L’incrustation numérique des comédiens dans des décors mi-peints mi-réels ne fait jamais toc, et rappelle plus d’une fois les chocs picturaux Mère et fils de Sokurov ou L’Anglaise et le duc de Rohmer.

Dans les meilleurs moments de Bruegel, la croix et le moulin, c’est le peintre lui-même (interprété par Rutger Hauer, un choix de casting tellement pas banal qu’il donne à lui tout seul beaucoup d’étrangeté au film), qui vient expliquer lui-même ce qu’il peint et pourquoi. Ainsi la composition de la toile est-elle envisagée à la base comme une toile d’araignée dont le but serait d’attraper l’œil du spectateur malgré lui, et où l’élément le plus important (le Christ et la croix) serait caché en plein centre, perdu au milieu d’une foule d’anonymes. Et de fait, dans le film, il n’est jamais question du Christ lui-même mais de tous ces personnages autour. Ces quelques séquences donnent au long métrage un air de passionnant cours d’histoire de l’art, offrant un aperçu de la richesse de l’œuvre. Paradoxalement, c’est quand la fiction pure reprend le dessus que le rythme baisse et que l’ennui pointe parfois le bout de son nez. Car tous les personnages du tableau ne sont pas égaux dans leur force symbolique. Charlotte Rampling, tout naturellement employée pour jouer la mère de Jésus (qui d’autre pour le faire ?) aurait ainsi presque pu voir toutes ses scènes coupées au montage tant, paradoxalement, elles sont loin d’êtres les plus fascinantes du film. Aussi intéressant qu’il soit, le concept de base ne donne pas toujours lieu à des histoires captivantes, et bien que court, Bruegel, la croix et le moulin semble parfois particulièrement lent et longuet. Pourtant, le film reste néanmoins suffisamment original et plastiquement impressionnant pour rester durablement en mémoire. On parie ?

par Gregory Coutaut

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