Avatar : La Voie de l'eau

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Avatar : La Voie de l'eau
Avatar : The Way of Water
États-Unis, 2022
De James Cameron
Scénario : James Cameron
Avec : Stephen Lang, Zoe Saldana, Sigourney Weaver, Sam Worthington
Photo : Russell Carpenter
Durée : 3h12
Sortie : 14/12/2022
Note FilmDeCulte : *****-
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Se déroulant plus d’une décennie après les événements relatés dans le premier film, AVATAR : LA VOIE DE L’EAU raconte l'histoire des membres de la famille Sully (Jake, Neytiri et leurs enfants), les épreuves auxquelles ils sont confrontés, les chemins qu’ils doivent emprunter pour se protéger les uns les autres, les batailles qu’ils doivent mener pour rester en vie et les tragédies qu'ils endurent.

LE POIDS DE LA FAMILLE

Une des premières images d'Avatar : La Voie de l'eau cristallise à elle seule tout le film. Neytiri est dans la jungle, se mouvant lentement entre les fougères, comme dans le premier film. Elle bande son arc pour tirer et soudain, elle se reprend. Elle regarde son ventre, enceint. Elle doit alors ajuster sa posture. Tout a changé.Lorsqu'il signe pour écrire la suite d'Alien de Ridley Scott, James Cameron se réapproprie l'enfer psychosexuel imaginé par le cinéaste, les scénaristes Dan O'Bannon et Ronald Shusett et l'artiste H.R. Giger pour en faire une histoire sur la maternité. Parmi les nombreuses manières dont Cameron s'éloigne de son prédécesseur, on note l'inclusion improbable, non pas des soldats, mais d'un enfant en la personne de Newt. En opérant un retcon du lore, imaginant une Reine aux xénomorphes, même dans sa version courte, Aliens permet à l'auteur d'explorer son obsession de la figure maternelle. Il en va de même pour l'autre suite écrite et réalisée par Cameron, à son propre Terminator cette fois-ci, où il ne s'agit plus de raconter la naissance à elle-même d'une femme, "mère de la Résistance" en somme, mais d'en faire une mère littérale, via l'inclusion de son fils John Connor, qui n'est par conséquent plus un futur abstrait à assurer mais une personne en chair et en os. Plutôt que de se répéter, Cameron dessine cette fois le portrait d'une femme que son fils doit ramener à la raison, à l'humanité. Pour sa suite d'Avatar, le metteur en scène continue sur cette lancée et pousse même le curseur plus loin : cette fois, les enfants seront carrément les protagonistes principaux du film, reléguant le couple-phare du premier volet au second plan.

Cette focalisation surprenante sert un propos qui s'inscrit dans la prolongation du précédent chapitre au message environnementaliste mais présente un axe plus fin et actuel. L'envahisseur colonialiste et génocidaire est de retour mais sous une nouvelle forme. Le premier film voyait déjà un renvoi intéressant dans son opposition entre avatars de chair et avatars de fer, les antagonistes inversant le modèle du Terminator : ce n'est plus la chair qui recouvre un endosquelette de métal mais une armure mécanique qui englobe un être de chair. La boucle de l'humain avide de technologie destructrice était bouclée. Ici, Quaritch, pourtant tué à l'issue du premier film, revient dans un corps de Na'vi, sa mémoire y ayant été uploadée, mais dans une des nombreuses auto-citations du film, il saisit un crâne tel Hamlet et l'écrase de sa force, à l'instar d'un des robots dans l'ouverture de Terminator 2. Quaritch a beau avoir adopté le même chemin symbiotique que le héros pour survivre, il n'a plus rien de son humanité.

L'humain est d'ailleurs virtuellement absent du film. Ayant achevé sa transition, Jake Sully n'apparaît donc plus sous sa forme humaine et les acteurs qui ne jouent pas leurs personnages via la technique de la performance capture sont quasi-inexistants dans cette œuvre qui pourrait tout aussi bien être nommée à l'Oscar du Meilleur Film d'Animation. Ce n'est pas un mauvais point, au contraire, le parti-pris est tout aussi pertinent que dans le premier film, si ce n'est plus encore. Cette saga naissante porte en partie sur la peur de l'extinction - "Ils ont tué leur Mère" disait Jake de l'espèce humaine - et la menace plane encore évidemment sur ce second opus. Néanmoins, on a tôt fait d'oublier la réalité de cette éventualité. Surtout quand on a une famille. C'est sans doute la thématique la plus pertinente de ce gigantesque blockbuster familial, qui utilise une fois de plus un canevas énorme et une dramaturgie classique pour exprimer son point de vue politique qui ne se limite plus cette fois à une critique évidente du capitalisme au détriment de l'écologie mais un constat plus intime et une remise en question de soi : quand on a une famille, on tend à devenir conservateur. Et c'est la jeunesse qui incarne l'avenir engagé.

Derrière ces histoires de fils préférés, d'enfants adoptés et d'immaculée conception, qui composent néanmoins un terreau émotionnel fort, notamment dans un dernier tiers où il rivalise avec l'action démesurée, Avatar : LA Voie de l'eau résonne pour ces raisons. Même si la fraîcheur de la découverte n'est plus nécessairement au rendez-vous, le voyage en ces terres (et mers) n'a de cesse de rappeler la magnificence de la faune et la flore qui sont encore vivantes et vibrantes, notamment avec une nouvelle heure centrale qui s'apparente à un documentaire de Jacques Perrin sur Pandora. Le film souffre également du syndrome inhérent à beaucoup de tomes intermédiaires de séries, comme un épisode de transition qui en garde un peu sous la pédale en ce qui concerne certains personnages (Neytiri, quelque peu sacrifiée, mais également le nouveau venu Spider) mais au moins, cette fois, on n'aura pas à attendre 13 ans.

par Robert Hospyan

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