Festival de Gérardmer: Under the Shadow

Festival de Gérardmer: Under the Shadow
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Under the Shadow
Iran, 2016
De Babak Anvari
Scénario : Babak Anvari
Durée : 1h24
Note FilmDeCulte : *****-
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1988. Voilà huit ans que Téhéran est victime des bombardements dans le conflit qui oppose l’Iran à l’Irak. Après le départ de son mari au combat, Shideh élève seule sa fille Dorsa. Mais quand le toit de l’appartement est traversé par un missile qui n’explose miraculeusement pas, c’est le début de phénomènes surnaturels...

AVANT QUE L'OMBRE

Premier long métrage de Babak Anvari (lire notre entretien), jeune réalisateur d'origine iranienne établi au Royaume-Uni, Under the Shadow est accompagné d'un très bon buzz depuis sa projection initiale lors du dernier Festival de Sundance. Le spectacle proposé par ce film d'horreur est en effet particulièrement efficace, alors qu'il n'utilise pratiquement que des ficelles et motifs classiques : mère en panique, silhouette à travers le judas, créature sous le lit... Under the Shadow rappelle qu'il n'y a aucun élément interdit dans le langage horrifique, que les grands films comportent aussi leur lot de jump scares - la question est davantage la façon dont ils sont utilisés. L'écriture d'Under the Shadow est efficace, sa progression dramatique est prenante et son interprétation à la hauteur.

Mais la principale originalité du film est ce mélange de terrain connu (les ingrédients d'une horreur bien identifiée) et de décor beaucoup plus inédit (le crépuscule de la guerre Iran / Irak à la fin des années 80). L'horreur sert de révélateur, l'expression d'une oppression psychologique : un même outil archétypal peut investir et illustrer mille situations. Ici, c'est celle d'une mère qui doit élever seule sa fille tandis que la guerre menace comme une ombre. Anvari décrit un basculement idéologique, avec cette femme dont les qualités professionnelles ne sont pas reconnues (et qui est congédiée sous un portrait de Khomeini), qui se fait arrêter dans la rue parce qu'elle n'est pas couverte, tandis qu'elle poursuit chez elle ses séances d'aérobic devant ses vidéos pirates d'une glorieuse Jane Fonda.

Derrière le propos féministe, il y a aussi une terreur plus viscérale qui s'immisce dans chaque recoin de l'appartement. Les sirènes d'alarme s’enchaînent, les murs se fissurent. Anvari a cette belle idée d'une bombe gigantesque, vision surréelle incrustée dans le plafond mais qui pourtant n'explose pas. Quand sautera t-elle ? Est-elle le vaisseau des djinns qui viennent hanter l'héroïne ? La mise en scène pourrait davantage jouer le trouble, à l'image d'une scène de rêve où l'angle de caméra déstabilise le regard. Mais il y a aussi une certaine générosité visuelle dans la représentation du surnaturel, avec un bestiaire qui n'est pas que métaphorique ou hors champ. Babak Anvari se révèle tout à fait à l'aise sur cet équilibre entre spectaculaire et elliptique, classique et pourtant inédit.

par Nicolas Bardot

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