El Premio

El Premio
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Premio (El)
Mexique, 2011
De Paula Markovitch
Scénario : Paula Markovitch
Avec : Paula Galinelli Hertzog
Photo : Wojciech Staron
Durée : 1h44
Sortie : 27/03/2013
Note FilmDeCulte : ****--
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Dans l'Argentine des années 70, Ceci, petite fille de 7 ans, vit retranchée avec sa mère dans une maison au bord de l'océan. Détentrice d'un secret qu'il est important de taire, elle est confrontée au danger lorsque l'armée débarque dans son école...

LE SILENCE DE LA MER

Film singulier que El Premio, premier long-métrage de l’écrivain argentine Paula Markovitch (lire notre entretien), scénariste de Lake Tahoe et Temporada dos patos, qui parvient à trouver sa propre voix en partant d’un sujet à priori déjà balisé : le monde des adultes et un contexte politique trouble vus par le prisme de l’imagination d’une fillette solitaire. D’imposantes références reviennent en mémoire, que ce soit les rôles de jeunesse d’Ana Torrent (Cria Cuervos ou L’Esprit de la ruche), ou encore le récent Labyrinthe de Pan. De manière assez remarquable, il ne s’agit que des œuvres hispanophones… Mais tout cela, on y pense plutôt avant le film que pendant, car l’histoire de Paula Markovitch ne ressemble pas tant que ça à ces références. Pas de frontière fantastique ici, mais plutôt un réalisme qui n’empêche pas le mystère. Car ce fameux contexte politique n’est donné à comprendre qu’au compte-goutte. D’ailleurs on se demande bien, au début, ce que la jeune Ceci et sa mère sont venues faire dans ce trou paumé du bout du monde, sur cette plage grise bizarrement hostile où aucun Club Mickey ne verra jamais le jour, et pourquoi sa mère cherche justement à enterrer sous le sable des paquets de lettres, qui finissent de toute façon par remonter à la surface dès la haute marée revenue.

Là où El Premio parvient à trouver sa propre manière de fonctionner efficacement, c’est justement dans sa manière plutôt fine de ne jamais rien trop dévoiler, de ne pas venir surligner d’explications ce qui est déjà sous-entendu et compris. Cela donne au film à la fois une fraicheur bienvenue et un coté universel, dépassant aisément et rapidement le cadre de toute reconstitution historique. L’autre élégance du scénario est de ne pas avoir peur d’utiliser des symboles (cette plage à la fois terrain de jeu et œil du cyclone, les vagues qui rentrent jusque dans la maison…), tout en ayant conscience qu’ils se suffisent à eux-mêmes. Que leur simple présence (déjà assez forte) n’a pas besoin d’être elle aussi surlignée par des explications, des dialogues, des lourdeurs. Minimaliste parfois jusqu’à l’aridité, The Prize déroule son histoire sur un rythme lent et pourtant prenant, où le silence est au cœur de tout. Le silence de la mère quand Ceci lui demande des nouvelles de son père ou les raisons de leur déménagement, le silence de Ceci quand ses nouveaux camarades de classe lui demandent d’où elle vient, le silence de ceux qui n’osent comprendre leur situation… un silence qui contraste violemment avec le déchainement sonore perpétuel des éléments autour de la pauvre cabane. Une belle trouvaille, qui là encore n'a pas besoin d’être soulignée.

Mais il s’agit au final bien plus d’un film sur l’enfance en général qu’un film au discours politique, car ici le contexte historique importe peu. La direction des jeunes actrices est à souligner par le naturel qu’elles dégagent parfois, autant dans leur fatigue résignée que dans leur manière d’éclater de rire pour un rien de manière très convaincante. Tout rikiki qu’il soit, El Premio possède au final suffisamment de qualités pour lui valoir une place au palmarès de Paris Cinéma, après celui de Berlin où il fut doublement primé.

par Gregory Coutaut

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