Philomena

Philomena
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Philomena
Royaume-Uni, 2013
De Stephen Frears
Avec : Steve Coogan, Judi Dench
Durée : 1h34
Sortie : 08/01/2014
Note FilmDeCulte : ****--
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Irlande, 1952 : Philomena Lee, encore adolescente, tombe enceinte. Considérée comme une « femme déchue », elle est envoyée au couvent de Roscrea. Alors que l’enfant est encore un nouveau-né, il est arraché aux mains de sa mère pour être adopté par des américains. Philomena passe les quinze années suivantes à essayer de le retrouver, en vain. Elle rencontre ensuite Martin Sixsmith, un journaliste désabusé, aussi cynique qu’elle est naïve. Ensemble, ils partent pour l’Amérique, au cours de ce voyage ils découvriront l’extraordinaire vie du fils de Philomena et tisseront une relation à la fois drôle et profondément émouvante.

SAVOIR FAIRE

Il y a à première vue quelque chose de presque anachronique dans le dernier film de Stephen Frears, qui possède toutes les apparences d’un feel-good movie du troisième âge, réminiscence de l’époque des films à Oscar familiaux des années 90. Autant l’admettre d’emblée : entre l’émouvante dignité des protagonistes et les touches d’humour décalées, Philomena n’est jamais très différent de cette image familière. Et pourtant, surprise, l’ensemble n’est finalement ni calorique ni mielleux. Il y a un vrai cinéaste derrière la caméra, un vrai auteur (Coogan) au scénario, et une actrice de premier choix dans le rôle principal : tout le monde y croit, alors pourquoi pas nous ? On peut certes railler le confort du film, qui fait sa soupe dans de vieux pots (non, cette phrase ne se réfère pas à l’âge de Judi Dench), mais on ne retrouve pas partout une telle aisance et efficacité narrative, un tel savoir faire. Classicisme sans audace ? On souhaiterait pourtant que tout le monde soit capable d’en faire autant.

Toute l’adhésion à Philomena le personnage (et Philomena le film) réside sur une ambiguïté : cette grand-mère est-elle gentiment naïve et décalée ou bien son optimisme témoigne-t-il d’une admirable ferveur ? Ce personnage de mère courage, digne-mais-aussi-un-peu-indigne, avait tout pour tomber dans les pièges de l’image sainte et superficielle de la femme-victime aux grands sentiments inattaquables. Il fallait rien de moins qu’une interprète d’exception pour rendre le personnage vivant, aussi nuancé. En vraie machine de guerre, Dame Judi Dench se lance perruque en avant, avec un sourire crispé de façade, dans une performance une fois de plus remarquable. On frémit en s’imaginant ce qu’aurait donné ce personnage aux mains d’actrices dénuées de subtilité. Dans le rôle à priori ingrat du « contrepoint cynique », Steve Coogan fait également preuve d’une subtilité bienvenue, sans cabotinage comique. Qualité que l’on retrouve dans un scénario qui, toujours à coup de nuances, évite le manichéisme : les bonnes sœurs ne sont pas (toutes) des monstres à la Magdalene Sisters, et si le propos progressiste reste parfois léger, il est bel est bien présent.

Un mot d’ailleurs enfin sur l’ « autre » récompense glanée par le film à la dernière Mostra de Venise (le premier étant justement le prix du scénario) : le queer lion. Pour un long-métrage où les thématiques LGBT ne sont abordées qu’en passant, et au bout d’une heure et quelque, voilà un choix qui surprend. Un pensée spéciale donc à Tom à la ferme ou encore Eastern boys, deux films qui eux, traitaient directement du sujet, et avec des écritures peut-être un peu plus contemporaine. Curieuse manière de récompenser Philomena, mais cela n’enlève rien à sa qualité.

par Gregory Coutaut

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