Ni pour ni contre (bien au contraire)

Ni pour ni contre (bien au contraire)
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Caty, une jeune fille ordinaire et introvertie, va faire la rencontre d’une bande de braqueurs parisiens. A leurs côtés, elle va progressivement s’émanciper, pour finalement accepter de leur prêter main forte au cours d’un braquage périlleux.

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L’équipe Klapisch, c’est avant tout un gang bien rodé, spécialisé dans la comédie. Lorsqu’elle tente un braquage au box-office, ça peut rapporter très gros (L’Auberge espagnole, Un Air de famille). Pour préparer les coups dès le scénario, Klapisch, quand il n’opère pas tout seul (Chacun cherche son chat), s’entoure de ses fidèles lieutenants Santiago Amigorena et Alexis Galmot (Le Péril jeune, Peut-être et celui-ci). Pour une organisation aussi bien structurée, deux épées de Damoclès menacent constamment de frapper: la répétition tout d'abord, le risque de calquer les prochains films sur les réussites précédentes et par conséquent d'affaiblir le résultat, et le changement de style, de technique, qui pourrait les faire se disperser. Avec l’échec de Peut-être, son essai anti-conformiste sur la science-fiction (et malgré le caractère hautement sympathique de l’œuvre), Klapisch a compris son erreur, et a découvert du même coup son statut - qu’il n’espère pas indélébile - de réalisateur de comédie. Ni pour ni contre démontre donc une nouvelle tentative de réaliser un film de genre, à l’exception cette fois que Klapisch respecte les codes et conventions au lieu de les détourner. Après la science-fiction, il choisit donc le policier, s’appuyant sur un prestigieux patrimoine français et américain, hérité de Melville, Verneuil, Lautner, Becker, Huston et plus récemment Scorsese. En un sens, le film est une réussite. Klapisch a réussi à digérer toutes ces références, à tirer les bonnes leçons cinématographiques de ses pairs, et en même temps, à conserver son originalité. Au cœur d’un cinéma français actuel riche en tentatives de films de genre, mais bien pauvre en réussites, il est légitime d’avouer qu’il a réussi à se démarquer.

Mais le film en lui-même, malheureusement, n'est pas irréprochable. Déchiré en deux parties bien distinctes, une de comédie et une autre de polar, Ni pour ni contre procure le sentiment d’une amère déception. Dans un premier temps, Klapisch s’applique avec efficacité, et un certain humour, à présenter ses personnages. De manière certes appuyée, mais tout à fait satisfaisante, il dresse un portrait mi-sympathique mi-dangereux de la bande de gangsters parisiens, qui n’est ni plus ni moins qu’une joyeuse bande de copains bien décidés à aller chercher l’argent où il se trouve, avec l’arme au poing et la réplique cinglante, si besoin est. Un traitement nourri de clichés inévitables, qui se veut réaliste mais qui tombe très vite dans l’exagéré, parfois même à la limite du sordide. La bande à Elbaz balance sans cesse entre le professionnalisme appliqué et l’amateurisme le plus complet, entre l’humour burlesque et le sérieux grotesque, procurant une sensation d’incohérence et de caractérisation négligée. La deuxième partie reste la plus décevante, remplie d’éléments déjà vus et mal intégrés, le tout encadré d’une technique à l’aspect discutable, comme une lumière exagérément colorée de vert et de jaune, une partition redondante et des choix de montage pour le moins curieux (notamment un montage alterné d'assez mauvais goût). Klapisch réalisateur s’en sort très bien, à l'instar du Klapisch directeur d’acteurs, toujours aussi excellent, à l’image des très convaincantes interprétations de Zinedine Soualem, Marie Gillain, Vincent Elbaz, et surtout Simon Abkarian. En somme, Ni pour ni contre n’est ni bon ni mauvais, et restera une belle tentative dans un genre plus que jamais à l'abandon. Pas le grand polar que l'on attendait, mais une sympathique comédie dramatique. Ce qui n’entache en rien le talent de son réalisateur, que l’on souhaite pour ses prochains films encore un peu plus audacieux.

par Yannick Vély

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