Mr Turner

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Mr Turner
Royaume-Uni, 2014
De Mike Leigh
Avec : Timothy Spall
Durée : 2h29
Sortie : 03/12/2014
Note FilmDeCulte : ***---
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Les dernières années de l’existence du peintre britannique, J.M.W Turner (1775-1851). Artiste reconnu, membre apprécié quoique dissipé de la Royal Academy of Arts, il vit entouré de son père qui est aussi son assistant, et de sa dévouée gouvernante. Il fréquente l’aristocratie, visite les bordels et nourrit son inspiration par ses nombreux voyages. La renommée dont il jouit ne lui épargne pas toutefois les éventuelles railleries du public ou les sarcasmes de l’establishment. A la mort de son père, profondément affecté, Turner s’isole. Sa vie change cependant quand il rencontre Mrs Booth, propriétaire d’une pension de famille en bord de mer.

NUMERO D'ART

Quatre ans après avoir ravi la Croisette avec l'un de ses films les plus accomplis (Another Year), Mike Leigh revient au film en costumes, son premier depuis Topsy-Turvy il y a une quinzaine d'années. Le premier plan de Mr Turner est impressionnant, donnant un aperçu du superbe travail sur la lumière réalisé sur ce film. Ce qui semble fort à propos quand on raconte l'histoire du peintre de la lumière et des incendies enferme également le long métrage. On ne demande pas forcément, à l'image de ce qu'ont fait Mizoguchi avec Utamaro (dans Cinq femmes autour d'Utamaro) ou plus récemment Julie Taymor avec Frida Kahlo (dans Frida) de reproduire à l'écran les peintures de Turner pour mieux pénétrer son art. Cette approche littérale ne serait de toute façon pas possible hors d'un film expérimental vu le style particulier du peintre. Le contresens irréconciliable de Mr Turner est de célébrer un peintre d'avant-garde, qui a ouvert la porte aux impressionnistes comme à l'art abstrait, de façon aussi classique. Ils sont nombreux ces instants où l'on a envie de souffler sur l'écran pour disperser la poussière qui s'y accumule au fil du film.

Certains moments, justement en évitant le déjà-vu, frappent davantage: un plan de falaise comme échappé d'une peinture de Turner, une pluie comme autant de taches de peinture qui s'abattent sur Turner, ou encore la fumée d'une locomotive qui recouvre peu à peu le paysage par touches impressionnistes. De rares audaces dans un film préoccupé par la belle (et même très belle) image. La narration à plat, étirée sur 2h30, n'aide pas vraiment le film à trouver son souffle. Il y a un bras de fer devant nos yeux entre la maîtrise formelle évidente et la lourdeur écrasante du jeu: Timothy Spall ramassera peut-être des tonnes de prix pour son interprétation tout en grimaces et grognements, mais il joue Turner comme Edith Massey joue les bébés déglingués chez John Waters. Finalement, Mr Turner ne se défait jamais vraiment du paradoxe temporel dans lequel il est piégé: comme si Leigh le cinéaste avait 200 ans de retard sur Turner, le peintre qu'il filme.

par Nicolas Bardot

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