Hors compétition: Hissein Habré, une tragédie tchadienne

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Hissène Habré a été arrêté le 30 juin 2013 à Dakar où il s'était réfugié après sa fuite du Tchad le 1er décembre 1990. Ce jour-là, pour les victimes du régime Habré et leur avocate Jacqueline Moudeina, c'est la fin d'un long combat. Cela fait plus de treize ans qu'ils ont porté plainte contre l'ancien dictateur tchadien. Ils réclament justice, ils exigent que Habré réponde de ses actes. Hissène Habré, ancien rebelle devenu président du Tchad de 1982 à 1990, a semé la terreur dans le pays grâce à sa police politique, la DDS (Direction de la documentation et de la sécurité). En huit de règne sous la houlette de son parti unique UNIR, (Union nationale pour l'Indépendance et la Révolution) l'ancien geôlier de l'ethnologue française Françoise Claustre, s'est révélé un dictateur hors pair sur le continent… Il a laissé derrière lui 40 000 morts et des milliers de victimes. Des rescapés qui réclament justice.

LA PAROLE EST AUX TEMOINS

Dans son nouveau film, le cinéaste tchadien Mahamat-Saleh Haroun revient sur une période méconnue de l'histoire de son pays. Rarement évoqué alors qu'il n'a pris fin qu'en 1990, le régime dictatorial imposé par Hissein Habré est pourtant revenu à la surface en 2013. Jusqu'ici réfugié au Sénégal, Habré a enfin été jugé pour crimes contre l'humanité. Mahamat-Saleh Haroun ne filme pas le procès en question, et ne cherche pas non plus à faire de son film un exposé qui reconstituerait les événements historiques à coups d'images d'archives. Au contraire, Hissein Habré, une tragédie tchadienne est un documentaire moderne, dans lequel le témoignage passe avant tout par la parole. Et la parole est ici aux seuls témoins de cette époque souhaitant s'exprimer publiquement: les victimes.

Le film alterne deux sortes de témoignages. Tout d'abord des confessions faites face caméra, récits détaillés et glaçants des tortures subies, mais aussi réflexion sur les façons de survivre avec le souvenirs, avec l'injustice, et l'espoir de ce procès tant attendu. Au-delà de ces puissants monologues, Haroun filme également des rencontres, tel ce face-à-face entre une victime et le soldat qui l'a torturé. La violence absurde de ces retrouvailles, pleines de violence refoulée mais aussi d'humour incongru, rappelle les travaux de Rithy Panh et Joshua Oppenheimer. C'est que le film n'est pas qu'une collection de témoignages à charge. En filigrane se dessine un questionnement: est-il possible, souhaitable, nécessaire, de pardonner aux coupables ? Il n'y a pas de bonne ou mauvaise réponse, et chacun survit comme il peut. Mais peut-être davantage encore que l'issue du procès, c'est cette autre forme de violence qui rend l'ensemble poignant.

par Gregory Coutaut

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