Grande école

Grande école
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Grande école
France, 2003
De Robert Salis
Scénario : Jean-Marie Besset, Robert Salis
Avec : Grégori Baquet, Arthur Jugnot, Salim Kechiouche, Elodie Navarre, Jocelyn Quivrin, Alice Taglioni
Durée : 1h50
Sortie : 04/02/2004
Note FilmDeCulte : ****--

Le jeune Paul, qui va intégrer une grande école, s’installe avec deux autres étudiants qui partageront avec lui les mêmes bancs prestigieux. Alors que sa voie vers les hautes sphères semble toute tracée, Paul va faire l’expérience d’une bifurcation sentimentale pour le moins inattendue.

LA CONFUSION DES GENRES

Grande école, comédie gay. La juxtaposition des deux mots signifie souvent en France cotillons et poignets cassés, bons sentiments d’acceptation se concluant sur une franche tape virile dans le dos. De l’autre côté, il y a la vraie peinture homosexuelle, et son histoire querelleuse, de Pasolini à Fassbinder ou son mini-lui hexagonal, François Ozon, avec un cinéma s’éloignant de la paillette et qui la regarde s’éteindre, quitte à parfois jouer de sa brillance. Sur les bancs de la grande école, on ne recrée pas l’histoire, mais on participe avec un enthousiasme démesuré à lui faire un enfant aussi vif qu’un premier amour, aussi gauche, criard, maladroit, exalté. Objet de la confusion des sentiments, Paul, jeune étudiant rangé, qui découvre son homosexualité reléguée jusqu’alors au fond de ses tiroirs. Tous identiques, comme les étudiants de l’école, comme leur costumes et leurs cravates qui se répercutent, comme les joueurs de water-polo déshabillés par leurs légères tenues d’équipe, ou comme les corps nus rassemblés dans les vestiaires, eux qui déclenchent alors le suffocant envahissement du cadre – et de la tête de Paul, envol de l’invasion des sens et viol des certitudes. Grande école célèbre les corps, principalement masculins, comme il ouvre les boites de Pandore dont s’échappe le charme érotique, ravageur et désormais irréversible.

SEX IS COMEDY!

Si Grande école choisit une approche d’abord quotidienne de son sujet, le film vire rapidement à la galerie mi-naïve mi-bouffonne de la fascination de la chair. Improbables saute-moutons en piscines par des Apollons athlétiques en bonnets, miroirs à mille reflets façon Dame de Shangaï pour lit pris dans le tourbillon sensuel, caleçons aux entrebâillements vertigineux qui aspirent comme un précipice amoureux, muscles et sexes longuement filmés sous les douches, les morceaux de bravoure sont légions. La fiction, elle, se débat dans le ventre du réel et finit par lui déchirer l’abdomen en un final théâtral où les têtes se posent sur le papier-peint bleu turquoise, à débiter ces dialogues (jusqu’ici retenus) dans une commune hallucination. Chaque carte retournée est désormais révélée, et l’école n’est plus que décor du champ de bataille amoureux. Vaillants soldats, Jocelyn Quivrin, objet du trouble et catalyseur sensuel, et Alice Taglioni, l’abandonnée lâchant ses dernières forces dans la rencontre, sont ceux qui se sortent le mieux des embûches. Salis, lui, n’a pas spécialement peur du ridicule et des chemins de traverse, il pioche dans l’un comme dans l’autre, aussi amoureux et aveugle que son personnage principal. Il y a de la vigueur dans le grotesque – et l’inverse est tout aussi vrai. Grande école jongle avec ses émotions à fleur de peau, quitte à chuter pour mieux se relever, et perce la justesse au travers de l’artifice. Plus gay que comédie, et finalement bien plus que tout cela.

par Nicolas Bardot

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