Freres Grimm (Les)

Freres Grimm (Les)
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Freres Grimm (Les)
Brothers Grimm
États-Unis, 2005
De Terry Gilliam
Scénario : Ehren Kruger
Avec : Monica Bellucci, Matt Damon, Lena Headey, Heath Ledger, Jonathan Pryce, Peter Stormare, Robin Williams
Durée : 1h58
Sortie : 05/10/2005
Note FilmDeCulte : *****-

Faux chasseurs de sorcières, les frères Grimm, Jacob et Will, déambulent dans les campagnes européennes pour mettre au point des arnaques sophistiquées. Convoqués à Marbaden, ils sont pour la première fois confrontés à un véritable danger.

JOYEUX BORDEL

Terry Gilliam est un cinéaste maudit. Trop fou pour s'intégrer pleinement au moule hollywoodien, trop ambitieux pour limiter la puissance de son imaginaire à des films "lo-fi", même si son dernier long métrage en date Tideland pourrait inverser cette tendance, l'ancien Monty Python a alterné, depuis le succès rencontré par L'Armée des douze singes, les grands projets avortés et un échec cuisant au box-office, Las Vegas Parano. Les nombreux problèmes rencontrés au cours de l'élaboration des Frères Grimm risquent d'ajouter un nouveau chapitre à sa réputation de réalisateur ingérable, incapable de maîtriser ses budgets. En un mot: baroque, alors que le cinéma actuel tend à un froid réalisme financier. Pourtant, contrairement à ce que l'on pourrait imaginer de prime abord, Terry Gilliam a accepté de nombreux compromis. Exit son premier choix pour le rôle principal, Johnny Depp, jugé à l'époque peu commercial (c'était avant Pirates des Caraïbes, la malédiction du Black Pearl), oubliée la prothèse nasale que devait initialement porter Matt Damon, les frères Weinstein exigeant par contrat que le héros de La Mémoire dans la peau soit le plus séduisant possible, visage d'ange et sourire colgate anachronique.

LYCEE RABELAIS

Une fois le tournage achevé, après bien des péripéties et l'aide de deux directeurs de la photographie, le désaccord entre Dimension et l'auteur de Brazil demeurait sur bien des points. La société faussement indépendante rattachée à Miramax donc à Disney espérait un Shrek avec des acteurs réels, un détournement des contes de fée tout public et politiquement correct. Terry Gilliam leur a offert une grande mascarade démythifiante, un délire pantagruélique à l'humour parfois douteux. Même si le réalisateur originaire de Minneapolis n'a pas en définitive eu le final cut et qu'aujourd'hui encore il en rejette la totale paternité, Les Frères Grimm possède son incontestable touche, sorte de version moderne de Jabberwocky, son premier essai en solo. Traversées par un véritable souffle épique, les aventures homériques et en grand angle des deux faux conteurs ne ressemblent en effet à rien de déjà vu dans le cinéma actuel. Loin de l'encéphalogramme plat d'un Van Helsing, le film frôle sans cesse l'apoplexie, chaque scène portant en elle les germes de sa propre destruction. On passe ainsi de la grande bouffonnerie (les séquences avec Peter Stomare déchaîné en tortionnaire italien), à de l'entertainement pur et dur avec l'utilisation pas toujours très soignée de coûteux effets spéciaux.

SOYONS DESINVOLTES

Tout n'est pas parfait, c'est une évidence. Extrêmement confus, le montage rend illisible certaines scènes d'action et le script d'Ehren Kruger digère avec difficulté les références à des contes précis (Le Petit Chaperon rouge, Hansel et Gretel). Mais Les Frères Grimm comporte aussi de grands moments de cinéma picaresque. Terry Gilliam rend palpable la relation fraternelle compliquée entre Jacob, le cadet naïf et rêveur, et Will l'aîné sûr de lui et protecteur, Heath Ledger et Matt Damon composant un duo complétementaire et sympathique. A condition de s'abandonner à un récit en mode alternatif et de privilégier l'ensemble aux détails, le huitième film de Terry Gilliam est souvent un régal. Peu de longs métrages parviennent aujourd'hui à surprendre le spectateur, à se risquer à d'aussi grands écarts, à provoquer volontairement la consternation pour mieux repartir sur un fou rire. Oeuvre de grand malade, contaminée par une vision unique du cinéma, Les Frères Grimm s'apparente à un saut de foi.

par Yannick Vély

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