De particulier à particulier

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De particulier à particulier
France, 2006
De Brice Cauvin
Scénario : Brice Cauvin
Avec : Anouk Aimée, Hélène Fillières, Julie Gayet, Sabine Haudepin, Laurent Lucas, Anthony Roth Costanzo
Durée : 1h39
Sortie : 26/04/2006
Note FilmDeCulte : ****--

Philippe et Marion forment un couple heureux. Ils vivent avec leurs deux enfants dans un appartement certes trop petit pour la famille, mais tout semble aller pour le mieux. Ils décident un jour d’aller passer des vacances en amoureux à Venise. Plus très sûrs de vouloir vraiment y aller, ils annulent le voyage mais ne le disent à personne et font comme s'ils y étaient vraiment allés. Les choses prennent une tournure désagréable quand Marion, allant chercher un développement de photos, trouvent des clichés de Venise dans la pochette. La peur et le doute s’installent peu à peu dans la relation.

VOIR VENISE ET FREMIR

Dès le début du film il est clair que ce couple n’est pas ordinaire. Alors que les enfants sont sagement assis sur le canapé, les deux adultes jouent à s’attraper, se courant après d’une pièce à l’autre en criant et riant à gorge déployée. Philippe et Marion sont certes des adultes, mais ils ont choisi de laisser les conventions au vestiaire et de vivre leur vie comme ils l’entendent. Ils pourraient chercher un appartement plus grand, ou encore en acheter un, ce qui serait plus pratique pour eux, mais précisément car ce serait le cas ils ne le font pas. Le voyage à Venise est plutôt un passage obligé, alors ils décident d’aller admirer les beautés tant vantées de la ville italienne… ou pas, tout compte fait. Pourquoi ce changement d’avis? Par jeu. Le couple aime jouer et quand Philippe dit à sa mère que le voyage s’est bien passé, Marion le suit. Ils sont comme cela tous les deux, dans l’instant, incapables de se projeter dans l’avenir, de réfléchir aux éventuelles conséquences de leurs actes. Ainsi, quand ils décident de prendre cette valise oubliée dans un hall de gare, il s’agit d’un autre jeu. Le souci, c’est qu’avec ce jeu, ils viennent de pénétrer de plein pied dans le monde des adultes. Cette valise est pleine de devises étrangères. Philippe le premier commence à observer les choses sous un autre angle, à considérer, à regarder autour de lui et à voir ce qu’il a décidé de voir. Marion est la plus lunaire des deux et il faudra qu’elle trouve les clichés de Venise pour que les questionnements l’assaillent. La peur s’installe dans leur couple et remet tout en question sur son passage car au lieu de l’affronter, ils se comportent comme des enfants et, derrière la menace terroriste qu’ils s’imaginent, c’est aussi et avant tout de la vie d’adulte et des responsabilités qu’elle impose, au niveau des enfants, du logement ou encore du travail, dont ils ont peur.

INTIMITE

Brice Cauvin nous raconte l’histoire d’une intimité, celle de Philippe et Marion, et ce qui s’y passe quand les choses dérapent, quand le couple traverse une crise. Il n’aime pas les histoires linéaires et donne certes aux spectateurs les informations nécessaires au bon suivi de l’intrigue mais pas plus, et c’est ensuite à chacun de combler les trous comme il l’entend. Pour cela, il a choisi les plans larges, afin de permettre au spectateur de glaner les indices au fur et à mesure. Un exercice qui demande une attention constante mais qui est en même temps extrêmement stimulant, ce d’autant plus quand les pistes sont aussi ouvertes et que la tension monte doucement. Sommes-nous en fin de compte comme le jeune couple, voyons-nous ce que nous voulons voir? Est-ce qu’il s’agit de terrorisme? De surnaturel? D’une simple erreur? De plus, Brice Chauvin a réuni pour son premier film un casting de choix. Hélène Fillières et Laurent Lucas donnent une crédibilité incroyable à leur couple de fiction, les deux semblent sortis du même moule, il y a une connivence, un sentiment de fusion qui transcende l’écran. Anouk Aimée et Julie Gayet sont également parfaites dans des rôles plus secondaires alors qu’Anthony Roth Costanzo laisse sans voix quand il donne de la sienne. Le jeune réalisateur joue avec les images et les clichés pour faire comprendre au spectateur que l’émotion est aussi une question de contexte, notamment lors d’une scène qui à la première vision est à pleurer de rire et qui, quand elle repasse dans le film plus tard, émeut aux larmes. C’est précisément ce contraste qui permet de prendre conscience de la vraie valeur des sentiments. Philippe et Marion vont devoir subir une traversée du désert afin de se rendre compte si ce douloureux passage à la maturité va signer la fin de leur couple ou non.

par Carine Filloux

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