Château ambulant (Le)

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Château ambulant (Le)
Hauru no ugoku shiro
Japon, 2004
De Hayao Miyazaki
Scénario : Hayao Miyazaki d'après d'après l'oeuvre de Diana Wynne Jones
Avec : Chieko Baisho, Tatsuya Gashuin, Mitsunori Isaki, Ryunosuke Kamiki, Takuya Kimura, Akihiro Miwa, Yo Oizumi
Photo : Atsushi Okui
Musique : Joe Hisaishi
Durée : 1h59
Sortie : 12/01/2005
Note FilmDeCulte : *****-
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Le jour où elle est victime d'un sortilège la transformant en vieille femme, Sophie trouve refuge dans l'étrange château du magicien Hauru, qu'elle a rencontré tantôt. Accueillie par Calcifer le démon du feu et Marko le petit disciple, Sophie se fait passer pour la nouvelle femme de ménage.

Le Chateau ambulantenvoyé par zul67

DEMONS ET MERVEILLES

Retorses, évasives, cahotiques, emberlificotées... Les retrouvailles avec Hayao Miyazaki ne déçoivent pas, elles tourmentent. Parce que Sophie la malchanceuse nonagénaire semble médusée par l'enjeu, parce qu'Hauru est aussi farouche qu'insaisissable, parce que l'édifice – colossal et c'est peu de l'écrire – menace de s'effondrer au moindre frémissement. Les victuailles sont si dispendieuses que les enfants gâtés ne savent plus où donner de la tête. Trop ou pas assez: Le Château ambulant s'égare volontiers, imperturbable et traître, sans retrouver la radicale étrangeté, l'émotion transie d'un Voyage de Chihiro, ni l'audace romanesque d'un Princesse Mononoké. Le récit erratique emprunté au roman de Diana Wynne Jones verrouille les passions, comme il pétrifie paradoxalement ses deux héros polymorphes et secrets. Si Le Château dans le ciel poussait à son paroxysme la cavalcade onirique, Le Château ambulant redouble d'impétuosité formelle. Les lieux, les corridors, les trésors s'amoncellent et s'évanouissent, l'éclair d'un rictus. Après Kiki, la petite sorcière, cette nouvelle esquive est la deuxième adaptation libre de Miyazaki, la deuxième fois également qu'un projet confié à un espoir (Mamoru Hosoda, réalisateur de Digimon, le film) lui tombe in extremis entre les mains. Le Château ambulant souffre d'un flagrant déséquilibre: une trame émiettée, délibérément chagrine et une telle profusion de détails que le coeur s'y englue plus souvent qu'il n'est séduit.

LA PORTE DEROBEE

Le socle était trop beau, Miyazaki semblait le plus enclin à épouser les excentricités de Diana Wynne Jones. Le Château ambulant va pourtant au-delà de la simple transposition. Constamment sur le fil du rasoir, écartelée, dépenaillée, l'intrigue donne le sentiment de s'improviser sur un amas de cendres. Sophie enclenche un mécanisme et une nouvelle artère s'ouvre à elle. Elle referme la porte, fait tourner les rouages du loquet, et le jeu se répète à l'infini. L'amusement de la jeune fille est à l'image de ce château mouvant: un désir irrépressible de glisser d'une séquence à l'autre, de faire se chevaucher les temporalités et les portions de terre, des colombages d'une ville portuaire aux ruines d'un royaume ombrageux. Vieillie prématurément, Sophie remonte le cours d'une existence pour sauver Hauru, l'éternel fugueur. Les récurrences esthétiques et les transitions familières auraient presque une valeur testamentaire, tant Le Château ambulant ravive les fantômes du passé. Miyazaki donne libre cours à sa démesure et à ses virtuoses enjambements. Des rafales de souvenirs surnagent les bribes attendries de Kiki, la petite sorcière, les houles du Château dans le ciel, l'amnésie lyrique du Voyage de Chihiro. Miyazaki ne raconte pas seulement une histoire de prince déchu, il revisite la sienne, l'oppresse et la déleste de ses rubans fastueux.

LE TEMPS QUI RESTE

Les malheurs de Sophie, sous l'emprise du maléfice de la sorcière des Landes, réveille une frousse immédiate: le corps qui se gâte, la sénilité qui guette. Mais chez Miyazaki, l'angoisse du délabrement prend une forme gracieuse et poétique. Sous la farce (l'irrésistible montée des marches au ralenti), Le Château ambulant inverse le cours habituel des événements - la fillette à qui l'on infuse la sagesse des aînés est elle-même devenue une adulte grabataire -, et dresse un portrait en creux d'une vieillesse apaisée. La panique des premiers instants cède la place à une résignation lucide, sans amertume. A la différence d'une Chihiro, d'une Kiki ou d'une Nausicaä, qui s'arment de courage pour apprendre ce qui leur fait encore défaut, Sophie subit plus qu'elle n'agit, dans l'ombre d'un magicien resté enfant. Mais c'est elle qui finit par lui enseigner et lui chuchoter le secret de leur entente tacite. Pendant que Suliman la reine orgueilleuse pousse les hommes à s'entre-déchirer, Miyazaki ausculte les respirations d'une vieille femme au bord de l'eau, à contre-courant, effrontément. Ce décalage entre l'urgence narrative et le retour à une indolence viscérale sauve Le Château ambulant de la pure passade amoureuse (l'idylle entre Hauru et Sophie reste très superficielle). Sophie se laisse happée par le vide, autour d'elle le silence et les murs qui se désagrègent. Miyazaki le démiurge bâtit et défait les mondes. Inlassablement.

par Danielle Chou

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Et si c'était vrai

Pour son dixième long métrage, Hayao Miyazaki s'est inspiré d'un best-seller de la romancière anglaise, Diana Wynne Jones, Le Château de Hurle. Familier des univers enchantés et parallèles, peuplés de magiciens et de sorciers, l'écrivain né en 1934 et originaire de l'Essex s'est spécialisé dans les contes pour enfants. Il n'est ainsi guère étonnant de voir son nom associé à celui du maître japonais, dont les échappées fantastiques rythment la filmographie depuis plus de vingt ans. Présenté en avant-première à la 61ème Mostra de Venise (2004) et salué par un Prix de la meilleure contribution technique, le dernier né des studios Ghibli a reçu un écho critique très favorable. On se souvient que Le Voyage de Chihiro avait créé la sensation au festival de Berlin 2002, en décrochant l'Ours d'or (une première pour un film d'animation), et battu tous les records d'audience au Japon l'année de sa sortie (juillet 2000). Pour la voix d'Hauru, Miyazaki a fait appel à Takuya Kimura, vedette de la télévision nippone et récemment aperçu dans 2046. Sans surprise, la partition a été confiée à Joe Hisaichi, compositeur attitré. Sekai no Yakusoku, la chanson thème revient à Yumi Kimura (qui avait déjà signé le générique de fin du Voyage de Chihiro). Sorti le 20 novembre 2004 au Japon, Le Château ambulant pourrait bien être aussi l'avant-dernier long métrage de Miyazaki.

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