Les Amants passagers

Les Amants passagers
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Amants passagers (Les)
Amantes pasajeros (Los)
Espagne, 2012
De Pedro Almodovar
Scénario : Pedro Almodovar
Durée : 1h30
Sortie : 27/03/2013
Note FilmDeCulte : *-----
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Des personnages hauts en couleurs pensent vivre leurs dernières heures à bord d’un avion à destination de Mexico. La vulnérabilité face au danger provoque une catharsis générale qui devient le meilleur moyen d’échapper à l’idée de la mort.

Y A-T-IL UN SCENARISTE DANS L’AVION ?

Après avoir revisité le coté bis et outré de la première partie de sa filmographie avec son récent et excentrique La Piel que habito, Pedro Almodovar se recentre encore plus franchement sur l’humour queer de ses débuts avec Les Amants passagers, comédie extravagante au kitsch assumé et revendiqué. Rafraichissant retour aux sources ou manque de nouvelles perspectives ? Le cas Almodovar est tout de même assez particulier : même s’il est aujourd’hui facile de l’oublier, son succès critique et commercial en France a tardé à venir. Son statut de réalisateur-star loué pour son excentrisme ne s’est paradoxalement imposé qu’à mesure que ses comédies débridées laissaient place à des mélos toujours remuants et sexy mais surtout plus nettement susceptibles d’être pris au sérieux. Paradoxe. Si les talents narratifs et scénaristiques du réalisateur étaient alors encore en germe, il faisait preuve dans ses premiers films d’un humour camp décomplexé qui ferait sans doute tordre la bouche à une partie de son public acquis par la suite. Ceux qui ont vu Pepi, Luci, Bom y otras chicas del monton, ses héroïnes qui jouissaient en se pissant dessus et qui organisaient des concours de la plus grosse bite, savent qu’on y était en effet plus proche du trash anarchiste et joyeux d’un John Waters que de ses futurs mélo féminins brillamment écrits.

Tout cela, c’était il y a trente ans ; même si Almodovar a toujours gardé un clin d’œil camp en arrière-plan dans ses films suivants. Depuis, d’autres cinéastes ont cultivé l’humour camp et l’ont fait découvrir à un public plus large : Gregg Araki, John Cameron Mitchell, François Ozon… L’humour gay a été en quelque sorte démarginalisé, sa perception à changé. Almodovar pouvait-il se permettre la redite ? Ce qui frappe en premier lieu dans Les Amants passagers (qu’on le compare avec ses premières œuvres en question ou non), c’est sa propreté. Et ce n’est pas seulement une question de budget. Tout dans le film est fait pour être agréable à l’œil et l’oreille : couleurs éclatantes, chansonnettes pop, lumière chaude… au point de devenir assez lisse. L’artificialité est évidemment assumée, mais l’image est ici tellement plate, télévisuelle, que l’on se surprend à attendre que Marion Game ou Audrey Lamy viennent pointer leur nez à l’écran pour réciter leur bout de sketch. Peu soutenue par une telle mise en scène, la flamboyance des personnages almodovariens tourne ici à vide, et vire à la bouffonnerie.

Dans un écrin aussi apprêté, trop propre et trop léché, l’humour sous-la-ceinture du réalisateur n’a plus rien de subversif. Les Amants passagers ressemble à une version « comédie bourgeoise » de ses premiers films, à tel point qu’on se croirait devant une comédie de Danièle Thompson, le cul en plus. L’humour camp en soi n’a pas vieilli, mais Almodovar semble ne pas avoir pris en compte l’évolution d’un humour qu’il a lui-même participé à faire connaître. Un play-back sur les Pointer Sisters, vraiment ? En 2013 ? L’humour du film a méchamment vieilli et fait preuve d’une ringardise aussi inattendue qu’embarrassante. Cerise sur le gateau, il règne également sur le film une absence de rythme elle aussi assez stupéfiante (et qui fait parfois froid dans le dos de la part d’un expert de la structure narrative.) Cette omniprésence du vide et du malaise achève de faire ressembler Les Amants passagers à un improbable remake des Langoliers (interminable téléfilm aérien adapté de Stephen King) par Gabriel Aghion.

L’absence de sélection du film dans le moindre festival avait de quoi interloquer sur son éventuelle qualité. Un autre indice plus alarmant fut la manière dont il a été caché à la presse par son distributeur français (projections inaccessibles pour nous comme pour d’autres). Almodovar a-t-il simplement voulu privilégier son public national (le casting all star serait-il un indice dans ce sens) ? Le réalisateur confie croire que son film n’est vraiment complètement compréhensible que par des Espagnols. On veut bien lui accorder le bénéfice du doute. Mais on se demande surtout à quelle sauce le film aurait été traité ici s’il avait été signé par ’un réalisateur inconnu ? Le film aurait-il dépassé le stade de direct-to-dvd Optimale prêt à remplir les étagères des rayons dvd-gay-poubelle des Fnac, à coté de tout un tas d’autres navets ?

par Gregory Coutaut

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