L'Âge atomique

L'Âge atomique
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Âge atomique (L')
France, 2012
De Helena Klotz
Scénario : Helena Klotz
Avec : Elliot Paquet, Dominik Wojcik
Photo : Hélène Louvart
Musique : Ulysse Klotz
Durée : 1h07
Sortie : 28/11/2012
Note FilmDeCulte : *****-
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Deux adolescents se retrouvent un samedi soir pour zoner ensemble. Alors qu’ils traversent Paris, les rencontres et désillusions s’enchainent jusqu’à les pousser à s’interroger sur les sentiments qu’ils éprouvent…

NUIT MAGIQUE

Voilà un long métrage à coté duquel il serait facile de passer, au sens propre comme au figuré. D’abord par sa durée riquiqui, alors que le film est loin d’être anecdotique et ne manque au contraire pas d’ambition. Puis parce qu’on redoute qu’une certaine étiquette réductrice lui soit rapidement collée dessus : personnages jeunes s’exprimant dans une langue littéraire jusqu’au décalage, errant dans le milieu de la nuit parisienne, dans un principal lieu de tournage que certains reconnaitront comme étant le très branché club Showcase… L’étiquette en question serait celle du film dit « parisien », adjectif cliché et paresseux qui ne veut plus rien dire à force de tout sous-entendre. Non, L’Âge atomique, n’est pas un film de plus sur les tergiversations de riches branleurs intellos (comme s’il s’agissait d’un genre en soi). Ne nous fions pas à de trompeuses apparences, le premier « long » métrage d’Héléna Klotz est bien moins trivial que cela. Il s’agit d’un vrai ovni, une curiosité qui détonne dans le très sage paysage du cinéma français.

Comme le laisse sous-entendre son beau et curieux titre, L’Âge atomique n’est jamais aussi fascinant que lorsqu’il échappe à tout réalisme. Or, on ne s'en rend pas forcément tout de suite compte, mais dès les premiers plans, on est déjà très loin, dans un univers presque autre. Héléna Klotz filme Paris de manière inédite, comme un no man’s land fantasmagorique, une sorte de version nocturne du Pont du nord de Rivette, et effectue un travail pictural souvent impressionnant qui contribue à une perte de repères progressive (couleurs et lumières kaléidoscopiques, musique hypnotique, des sons qui viennent et disparaissent). Rapidement on ne sait plus vraiment où ni quand ce que l’on voit a lieu, et peu importe. La musique, les fringues et les looks pourraient tout aussi bien sortir des années 80 ou 90, ou même de la semaine dernière. Aucun repère tangible (pas de téléphone portable par exemple) ne vient infirmer ou confirmer ce glissement hors du temps, qui pare très vite tout le film d’une saisissante et poignante nostalgie.

Car malgré l’expérimentation, L’Âge atomique ne raconte rien d’autre qu’une simple histoire d’amour. Et ce sont justement tous ces processus d’éloignement du réel (un personnage apparait comme un fantôme, Paris se transforme en forêt de conte de fée, la tour Eiffel devient un phare dans un océan de brouillard…), qui paradoxalement viennent rendre plus touchante et crédible cette chronique de spleen adolescent, faite de désœuvrement nocturne, d’angoisse identitaire et d’élans amoureux contrariés. L’ombre du fantastique et du merveilleux plane sur tout le film, comme pour suggérer un « autre monde » à la lisière duquel les héros ne font que rester, et c’est justement en misant sur ce registre fantasmagorique plutôt que sur l’hyperréalisme social que le film trouve son ton propre, étrange et émouvant, à la hauteur de son ambition rare. Un mini-film en apparence, mais qui ne donne jamais l’impression de voir autre chose qu’une œuvre déjà particulièrement aboutie.

par Gregory Coutaut

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