Aferim !

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Aferim !
Roumanie, 2015
De Radu Jude
Durée : 1h48
Sortie : 05/08/2015
Note FilmDeCulte : ****--
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1835. Un policier et son fils parcourent la campagne roumaine à la recherche d’un esclave gitan accusé d’avoir séduit la femme du seigneur local. Tel un shérif d'opérette chevauchant dans les Balkans sauvages, le fonctionnaire zélé ne perd pas une occasion d’apprendre à son rejeton le sens de la vie. A grands coups d’insultes grivoises, proverbes ridicules, morale bigote, humiliations gratuites, menaces et autres noms d’oiseaux, Costandin affiche son mépris des femmes, enfants, vieillards, paysans, juifs, turcs, russes et surtout, surtout, des gitans.

LA CHASSE

Radu Jude (lire notre entretien) n'est pas le réalisateur le plus connu de la récente nouvelle vague roumaine qui a triomphé en festivals ces dernières années, et parfois jusqu'au box-office roumain comme ce fut le cas de Mère et fils, Ours d'or et succès local. La productrice de ce dernier film est également derrière Aferim !, projeté en compétition de la Berlinale. Le long métrage retrace l'enquête, au 19e siècle, d'un homme chargé de retrouver un esclave gitan qui a échappé à son maître. Radu Jude rouvre une page peu assumée de l'Histoire, à l'heure où les Roms (qui n'avaient pas encore ce nom) étaient réduits en esclavage. Le noir et blanc apporte une distance, les costumes et décors installent le film historique, et le folklore aux portes du merveilleux est là: il y a dit-on des fantômes dans la plaine, la vieille qui passe serait le diable frappé par le choléra, et le religieux au bord de la route attire les démons. Il ne faut évidemment pas s'y tromper: la Roumanie barbare telle que Radu Jude la montre n'est pas sans liens avec le monde d'aujourd'hui.

En conférence de presse, Radu Jude a parlé des propos racistes et antisémites trouvé sur le net et suscités par le sujet de son film. La Roumanie décrite dans Aferim est corrompue jusqu'à l'os, persuadée de marcher droit même en commettant les pires horreurs, les Roms y sont littéralement chassés et on y hait les juifs plus que tout. De 1835 à 2015, Jude établit des liens clairs, et jette un oeil pour voir d'où vient la haine à l'oeuvre aujourd'hui. Le film, pourtant, parvient à être drôle pour mieux glacer de temps à autre. Sa "gauloiserie" (quel serait l'équivalent roumain ?) peut parfois assommer, comme assomment souvent les fictions baroques d'un Emir Kusturica. Le récit picaresque aurait également gagné à avoir plus de relief. Mais cette traversée, visuellement accomplie, est suffisamment mordante et surprenante pour marquer.

par Nicolas Bardot

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