4 Femmes pieds nus

4 Femmes pieds nus
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4 Femmes pieds nus
4 Mujeres descalzas
Argentine, 2005
De Santiago Loza
Scénario : Santiago Loza
Avec : Eva Bianco, Maria Onetto, Maria Pessacq, Mira Santucho
Durée : 1h30
Sortie : 01/01/2005
Note FilmDeCulte : *****-

Barbara vit dans un appartement sans meubles. Elle a du les vendre afin de pouvoir payer le loyer. Son amie Véronica a aussi des soucis d’argent et décide de sous-louer des chambres dans sa maison. Martha, qui quitte la campagne pour trouver la gloire en ville, et Sandra, en pleine procédure de divorce, vont emménager avec elle. Les quatre femmes vont apprendre à se connaître et à force de passer du temps ensemble, s'apporter les unes aux autres ce qui leur manque tant, la joie de vivre.

WOMEN IN THE CITY

Le film s’ouvre sur un plan de l’appartement vide de Barbara filmé derrière des rideaux translucides en plastique. Celle-ci est assise sur une caisse. La caméra se déplace alors vers la droite et sur le rideau, en bas à droite, le titre du film y est inscrit au feutre. Un plan simple, beau et efficace. Chez Véronica, c’est un rideau de perles qui la dissimule le temps d’un plan. Le réalisateur argentin va ainsi jouer à cache-cache avec ses personnages, les dissimulant ou bien les exposant au fil de l’histoire. Au début, quand les femmes se retrouvent pour la première fois chez Barbara, il y en a toujours au moins une de dissimulée derrière le rideau translucide et c’est seulement vers la fin du film qu’elles vont toutes êtres visibles. Lors d’une conversation entre Barbara et Martha, les deux femmes se trouvent de l’autre côté du rideau, elles ont fait le pas nécessaire l’une vers l’autre, sont en train de devenir des amies qui n’ont plus à se cacher et ont beaucoup de choses à se dire. En effet, les quatre femmes sont à un point de leur vie où elles doutent et cherchent un bien-être qui donnerait un second souffle à leur existence, but qui semble bien difficile à atteindre. Barbara n’a pas d’argent, se sent seule, Véronica se réveille chaque matin avec des angoisses nouées au ventre, Sandra est détentrice d’un secret lourd de conséquences et Martha rêve de gloire mais croit plus en Dieu qu’en elle-même pour obtenir ce qu’elle désire. Le pessimisme est ambiant et aussi pesant que la chaleur accablante sur Buenos Aires alors que les questionnements ne débouchent pas forcément sur des réponses. Que répondre à "Tout peut arriver, même des bonnes choses" ou encore "Personne ne nous a appris à être heureux". Quand Véronica avoue un "Je souffre trop", il est clair qu’elle ne parle pas seulement du temps. L’espoir n’est plus qu’une vacillante flamme susceptible de s’éteindre au moindre souffle et la religion est également mise à mal.

TABLEAUX VIVANTS

Santiago Loza filme ces femmes avec une immense poésie. Nombre de ses plans semblent tout droit s’être échappés d’une collection de tableaux et, quand lors d’une soirée d’éclipse, les quatre belles se retrouvent sur un toit, lunettes de soleil chaussées sur le nez, celui-ci levé vers les étoiles, et que les échos du piano se mêlent aux notes de l’accordéon, c’est le temps qui s’arrête pour laisser le spectateur savourer ce délice des sens. Cette même musique qui accompagne les déplacements en voiture, celle-ci suivant un trajet composé de courbes qui ne sont pas sans faire écho à la féminité des personnages. Il utilise presque exclusivement des plans fixes, favorables à l’observation des personnages, à l’évolution de la situation. Il a par ailleurs une très intéressante façon d’aborder les conversations, véritables nerfs du film. Soit il place l'une des interlocutrices dans le reflet d’une fenêtre, ou bien la laisse hors champ. Quand il utilise un champ / contre-champ classique, c’est à effet décalé. Ces procédés font en sorte que le spectateur se concentre plus sur ce qui est dit que sur le visage des femmes. C’est particulièrement vrai lorsqu’il filme une conversation à la mer en plan fixe large et que les deux femmes se trouvent à l’arrière plan d’un saisissant tableau. Santiago Loza a réussi une petite merveille de film qui est aussi agréable à regarder qu’à écouter, un film qui nous fait partager un moment de la vie de ces quatre femmes, un moment intime et difficile mais où brille la flamme de l’espoir, de la vie.

par Carine Filloux

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