Django Unchained

Django Unchained
Envoyer à un ami Imprimer la page Accéder au forum Notez ce film
Django Unchained
États-Unis, 2012
De Quentin Tarantino
Scénario : Quentin Tarantino
Avec : Leonardo DiCaprio, Jamie Foxx, Samuel L. Jackson, Christoph Waltz
Photo : Robert Richardson
Musique : Ennio Morricone
Durée : 2h44
Sortie : 16/01/2013
Note FilmDeCulte : *****-
  • Django Unchained
  • Django Unchained
  • Django Unchained
  • Django Unchained
  • Django Unchained
  • Django Unchained
  • Django Unchained
  • Django Unchained
  • Django Unchained
  • Django Unchained
  • Django Unchained
  • Django Unchained
  • Django Unchained
  • Django Unchained
  • Django Unchained
  • Django Unchained

Dans le sud des États-Unis, deux ans avant la guerre de Sécession, le Dr King Schultz, un chasseur de primes allemand, fait l’acquisition de Django, un esclave qui peut l’aider à traquer les frères Brittle, les meurtriers qu’il recherche. Schultz promet à Django de lui rendre sa liberté lorsqu’il aura capturé les Brittle – morts ou vifs. Alors que les deux hommes pistent les dangereux criminels, Django n’oublie pas que son seul but est de retrouver Broomhilda, sa femme, dont il fut séparé à cause du commerce des esclaves… Lorsque Django et Schultz arrivent dans l’immense plantation du puissant Calvin Candie, ils éveillent les soupçons de Stephen, un esclave qui sert Candie et a toute sa confiance. Le moindre de leurs mouvements est désormais épié par une dangereuse organisation de plus en plus proche… Si Django et Schultz veulent espérer s’enfuir avec Broomhilda, ils vont devoir choisir entre l’indépendance et la solidarité, entre le sacrifice et la survie…

ONCE UPON A TIME IN THE SOUTH

Employer la formule "on ne présente plus Quentin Tarantino" serait une banalité à la frontière de la crétinerie. Au bout d'une filmographie qui compte à présent huit films, c'est sûr qu'on ne le présente plus. Toutefois, si son dernier opus témoigne dès son générique, non, dès le logo du studio - une version granuleuse d'époque de la porteuse de la torche de Columbia - du style de son auteur, que les mauvaises langues diront singé ailleurs et que les amateurs savent reconnaître comme une vision post-moderne, on a tout de même l'impression d'un tournant marqué avec Inglourious Basterds. Le nouveau Tarantino confirme un Tarantino nouveau. On a souvent accusé le cinéaste de faire des films vides, sacrifiant la substance au profit de l'iconographie cool de tout un pan du cinéma, certes soigneusement recrée mais creux aux yeux de ses détracteurs. Peut-être est-ce cette injuste critique de son œuvre qui l'a motivé, ou peut-être est-ce la prise de conscience par le metteur en scène lui-même (dans une récente interview accordée au Hollywood Reporter) de la vanité de son Boulevard de la mort, après le film-somme Kill Bill, mais avec Inglourious Basterds, et maintenant Django Unchained, l'auteur ne semble plus vouloir se contenter de revisiter l'Histoire du cinéma, mais se permet de revisiter l'Histoire tout court. Les deux étant destinés à se mêler inévitablement.

PULP NON-FICTION

Ainsi dans son précédent film, Tarantino réécrivait l'Histoire en faisant mourir Hitler de manière jouissive, un gros plan nous montrant son visage troué de balles dans un cinéma en flammes sous les rires d'une juive. S'il n'y a rien d'aussi uchronique dans Django Unchained, les deux œuvres restent indéniablement parentes dans leur volonté de retraverser une époque sombre de l'Histoire en prenant des libertés avec la réalité, libertés que seul le cinéma peut permettre, et qui se font d'autant plus réjouissantes lorsqu'il s'agit du cinéma de genre qu'affectionne tant le cinéaste. A travers les yeux de Tarantino, l'esclave noir devient alors une icône de western, le cinéma lui donnant les moyens de sa vengeance, inaccessible dans le monde réel. Si le film n'est pas un aussi pur revenge movie que Kill Bill, il partage toutefois un goût similaire pour le divertissement, beaucoup plus classique et direct dans sa narration et son traitement qu'Inglourious Basterds. En fait, le dernier né du metteur en scène s'avère être un peu le bâtard de ces deux films. On retrouve évidemment l'affection (et le don) de Tarantino pour les dialogues désarmants, art sur lequel reposait presque entièrement Inglourious Basterds dont le récit s'articulait principalement autour de scènes de dialogues laissant la tension monter de façon insoutenable jusqu'à explosion. Cependant, le scénariste semble nous dire ici, en reprenant Christoph Waltz dans le même genre de rôle de manipulateur verbeux, que cette fois-ci le personnage se retrouve tout seul dans un monde bien moins civilisé où l'on a plus tôt fait de laisser parler les armes.

GLORIOUS BASTERD

Un film bâtard donc, avec ce que ça peut entendre de péjoratif, le terme pouvant coller à la structure et au rythme du film, quelque peu malaisés passé l'extraordinaire premier acte. Le récit alterne plus difficilement les moments de tuerie - littérale - avec les instants plus calmes - mais plus menaçants. Est-ce dû à la disparition de Sally Menke, monteuse de tous les films du cinéaste? On ne le saura jamais. Mais après la longue et jouissive introduction montrant comment Django évolue d'esclave à chasseur de primes, le film accuse un coup de mou une fois que nos protagonistes arrivent chez Calvin Candie. Si la suite parvient à faire la part belle à la spécialité du loquace scénariste, elle souffre tout de même de quelques longueurs, avant un climax bonus, une fois de plus jubilatoire, mais moins impliquant que ceux de Kill Bill et Inglourious Basterds. Au-delà de ce léger bémol, Django Unchained demeure une œuvre fascinante. On y retrouve cette même charge que dans le précédent envers un ordre établi méprisable - jadis l'Allemagne nazie, à présent l'Amérique esclavagiste, incarnée par un Leonardo DiCaprio génialement inhumain - avec le même genre d'ambiguïté morale dans la caractérisation de nos héros. Autrefois, la troupe de soldats juifs gravant des croix gammées dans des fronts comme des étoiles jaunes, ici le commerce du corps auquel se livrent tant les esclavagistes que les chasseurs de prime. Sans oublier le constat des violences infligées à tout un peuple qui nous mène à nous demander si le film n'est pas une parabole pour justifier la délinquance chez les minorités.

THE GOOD, THE BLACK AND THE UGLY

Dans cette démarche, l'exercice n'est pas exempt d'éléments qui pourraient porter à controverse. Pour les noirs américains, le Dr. (Martin Luther) King est un sauveur. Dans le film, le sauveur baptisé Dr. King (Schultz) est un blanc qui éduque un noir non-civilisé, pour l'amener vers le chemin non pas de la paix et de la cohabitation, mais de la violence. Et Tarantino couronne Django père de la blaxploitation (sa femme s'appelle Broomhilda von Shaft). Tout cela pourrait être polémique si Schultz n'était pas un personnage aussi romantique, véritable cœur du film, businessman qui se prend d'amitié pour celui qu'il commence à voir comme une figure de conte. Oui, parce que Django Unchained est de ces films qui parviennent à citer d'abord Au service secret de sa majesté puis L'Anneau des Niebelungen. La bromance est parfaite, et l'on aurait pu regarder des heures de Waltz et Jamie Foxx cavalant dans le Far West. Dans ce festival d'acteurs, Foxx offre une performance tout en retenue et Samuel L. Jackson rappelle l'interprète qu'il était, les rôles étant écrits une fois de plus aux petits oignons par l'auteur. Django Unchained est un de ces cocktails dont Tarantino a le secret, faisant ressortir toute l'iconographie d'un genre (à l'aide d'un Robert Richardson en grande forme), avec une bonne dose de sang cathartique (à la Verhoeven, sur la fin) et de références digérées, qui peut se targuer d'avoir un fond, même s'il n'est peut-être pas aussi abouti que dans Inglourious Basterds, en plus d'être un film de genre badass, même s'il n'a pas l'ampleur de Kill Bill.

par Robert Hospyan

Commentaires

Partenaires