United States of Love

United States of Love
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United States of Love
Zjednoczone stany miłości
Pologne, 2016
De Tomasz Wasilewski
Scénario : Tomasz Wasilewski
Durée : 1h44
Sortie : 05/04/2017
Note FilmDeCulte : *****-
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Pologne, 1990. La première année de liberté, mais aussi de l'incertitude pour l'avenir. Dans ce contexte, quatre femmes de différents âges décident qu'il est temps pour elles de satisfaire leurs désirs...

FEMMES EN CAGE

« J’ai acheté du Fanta ». L'une des premières répliques de United States of Love pourrait paraitre anecdotique au possible, sauf que le repas de famille où elle est prononcée a lieu dans un contexte particulier : dans une banlieue polonaise terne, au tout début des années 90, soit juste après la chute du Mur de Berlin. Les quatre héroïnes de United States of Love fument, s’achètent des jeans et peuvent se permettre d’aller seule au restaurant. Où même de danser sur du Whitney Houston. Mais comme le laisse entendre les paroles du tube de la chanteuse, ces femmes-là aussi veulent « danser avec quelqu’un qui les aime ». Pas si facile, quand tout autour d’elle demeure lugubre.

Au cœur du troisième long métrage du jeune réalisateur polonais Tomasz Wasilewski (lire notre entretien), il y a une mise en parallèle de l’espoir suggéré du post-communisme et la supposée liberté d’aimer qui en découle. Des cours de religions à ceux d’aérobic, tout autour de ces quatre femmes les incite à une nouvelle vie (cette phrase est même ironiquement prononcée... à un enterrement !), et à une renaissance qui passera par leurs corps. Mais leur cage a beau avoir été ouverte, cette liberté n’est pas facile à apprivoiser. L’une de ces femmes porte un brushing sorti tout droit des années 50, qui la fait ressembler à une héroïne de Douglas Sirk. Dans un film aux repères temporels volontairement absents, seules Whitney les VHS piratées viennent nous rappeler que ces femmes en cage vivent bien dans les années 90, plus proches de nous qu’il n’y parait.

Amoureuses des mauvaises personnes, les émotions et les désirs de ces femmes restent privés, inavouables, et donc impossibles à assouvir. Filmées dans des couleurs crépusculaires et délavées, dé-saturées jusqu’à presque ressembler à du noir et blanc (on pense aux étranges transitions de Pleasantville), ces histoires ont l’air de se dérouler à une époque indéfinie, comme si les temps n’avaient jamais vraiment changé. Surtout, ce traitement chromatique donne l’impression que les héroïnes sont soit sur le point d’éclore, soit au contraire d’être figées dans un passé qui refuse de les quitter. Captées chacune à un moment clé de leur vie sentimentale, les quatre femmes d’âges différents sont-elles au début ou à la fin de leur parcours personnel ?

United States of Love a la bonne idée de ne jamais enfermer Agata, Iza, Renata et Marzena dans le cadre artificiel d’un scénario choral (chacune possède sa partie), et ne jamais dramatiser à outrance jusqu’à les transformer en victimes martyres de circonstances. Voilà au contraire quatre personnages féminins nuancés et vivants, pas toujours facilement aimables, comme on aimerait en voir plus souvent. Le ton a beau être souvent en adéquation avec les images pâles du film, celui-ci réserve quelques touches de tendresse et d’humour inattendues. Tomasz Wasilewski n’a pas la naïveté de croire que la liberté n’est qu’un interrupteur sur lequel il suffirait d’appuyer : United States of Love regarde les choses en face sans se faire d’illusions, mais malgré ces destins chaotiques, là où on aurait pu s’attendre à un constat amer et cruel, on décèle au contraire en filigrane un espoir, une porte de sortie enfin entrouverte.

par Gregory Coutaut

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