Trilogie de Lucas Belvaux (La)

Trilogie de Lucas Belvaux (La)
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Trilogie de Lucas Belvaux (La)
France, 2002
De Lucas Belvaux
Scénario : Lucas Belvaux
Avec : Lucas Belvaux, Dominique Blanc, Catherine Frot, Valérie Mairesse, Gilbert Melki, François Morel, Ornella Muti
Photo : Pierre Milon
Musique : Riccardo Del Fra
Durée : 4h15
Sortie : 01/01/2003
Note FilmDeCulte : ***---
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Un Couple épatant: Souffrant d’absences régulières, Alain Costes est persuadé de vivre ses derniers jours. Intriguée par son comportement, Cécile croit à un adultère et engage l’inspecteur Pascal Manise pour suivre son mari. Cavale: Bruno Le Roux s’évade de prison, après quinze années de réclusion. Il reprend contact avec ses anciennes connaissances, dont Jeanne Rivet, la collègue de Cécile Costes et Agnès Manise. Après la vie: Le couple Manise se délite peu à peu. Tandis que Pascal piétine dans ses affaires et flirte avec une amie de sa femme, Cécile Costes, Agnès vient en aide à un prisonnier en cavale -celui que recherche justement son époux.

TRILOGIE, MODE D’EMPLOI

A l’heure où fleurissent les sagas, Lucas Belvaux tente le pari d’un triptyque distribué en salles le même mois. L’idée n’est pas nouvelle, mais le postulat prometteur: trois films, trois genres distincts - un thriller, un vaudeville, un mélodrame - sous-tendus par une même question: que deviennent les personnages secondaires une fois exclus du champ? De cette comédie humaine, Lucas Belvaux élabore un scénario à géométrie variable et se lance dans le tournage fleuve de trois longs métrages, entouré des mêmes acteurs, dans les mêmes lieux, en respectant scrupuleusement la même chronologie. Chaque épisode confronte un couple à ses démons et fait apparaître parmi les figurants les protagonistes des deux volets annexes. A l’instar des films chorale, les flous s’estompent au gré des rencontres et des perspectives choisies. Les questions soulevées par l’intrigue trouvent leur réponse dans la trilogie, suivant l’ordre des films vus. Selon le souhait de Belvaux, un film peut être apprécié indépendamment des deux autres, dans un ordre totalement aléatoire. La distribution place l’accent sur la comédie, Un Couple épatant, qui présente une vue d’ensemble des personnages de la trilogie. Cavale et Après la vie sortent quant à eux à une semaine d’intervalle.

CUBIQUE

La dimension ludique de la trilogie s’avère assez réjouissante dès qu’on juxtapose deux épisodes. L’effet loupe et la simultanéité de l’action offrent une lecture nuancée des situations et des personnages. Le dédoublement des séquences pousse à réévaluer la perception d’un événement. D’un épisode à l’autre, une même parole échangée prend une connotation comique ou tragique. Bousculé par trois points de vue antagonistes, le jugement est toujours en suspens. Chaque long métrage éclaire un profil distinct. Du flic hautain de Cavale au mari esseulé d’Après la vie, Gilbert Melki prend le temps d’affiner la personnalité contradictoire de Pascal Manise. Amant inoffensif dans Un Couple épatant, Bruno Le Roux (Lucas Belvaux) se révèle un idéaliste déçu de la révolution prolétarienne dans Cavale. Les différents partis pris narratifs illustrent une constante: les hommes sèment la discorde, les femmes colmatent les brèches. Cécile Costes (Ornella Muti), Agnès Manise (Dominique Blanc) et Jeanne Rivet (Catherine Frot) sont toutes professeurs dans un même lycée. Considérée dans son intégralité, la trilogie est un projet plus qu’excitant. Les failles sont hélas trop nombreuses pour emporter l’adhésion.

MAUVAIS GENRE

Hors contexte, les trois films laissent un grand sentiment d’inachevé. Isolés de la trilogie, ils peinent à s'élever des habituelles productions hexagonales. Les genres sont trop compartimentés pour réellement captiver. La comédie adultérine conserve ses vieux réflexes de boulevard: l’amant caché dans le placard et son lot de portes claquées et d’embrouillaminis à répétition. Cavale retrace la course à bout de souffle d’un évadé. Après une ouverture élégante, le traquenard se dilue dans des sous-intrigues confuses et redondantes. Le jeu approximatif de Lucas Belvaux dessert en grande partie le propos du film. Passages obligés, les filatures et les déguisements se perdent dans des allers-retours décourageants. Après la vie donne à voir tous les signes ostensibles du drame – un couple fragilisé par la violence et la drogue -, sans trouver d’identité propre. La caricature est telle pour les trois genres que les situations en deviennent extrêmement prévisibles. En dehors du couple attachant formé par Ornella Muti et François Morel, les binômes voisins retombent vite l’anonymat. Si la mise en scène et la musique diffèrent d’un film à l’autre, le principal écueil de la trilogie reste le montage, parfois à la limite de l’intelligible.

HASARD OU COINCIDENCE

Pour ceux qui ne verront qu’un seul film, les renvois abrupts aux deux autres volets de la trilogie rebutent plus qu’ils n’intriguent. Entre l’utile et l’accessoire, Lucas Belvaux s’empêtre dans un montage hasardeux, sans trouver le juste équilibre entre la partie et le tout. La concordance des trois univers fonctionne laborieusement; l’absence de temps réel limite l’intérêt du procédé. En jouant sur la dilatation et le resserrement temporels, Belvaux conserve des éléments anecdotiques de la trilogie pour l’insérer dans un film, au détriment de sa cohérence. La contamination des genres a ses limites. A l’évidence, tous les personnages ne sont pas destinés à se rencontrer, leurs chassés-croisés semblent d’autant plus illusoires. Les transitions paraissent artificielles, les ellipses inadéquates. Un discours sur la drogue évoquant les tumultes d’Après la vie s’immisce sans raison dans le récit d’Un Couple épatant. Incompréhensible dans la comédie, l’arrestation de Jeanne trouve sa justification tardive dans Cavale. Les histoires dérapent trop souvent dans l’à-côté pour maintenir le fil ténu de la trilogie. Les correspondances sont si dérisoires qu’elles n'ont plus lieu d'être. Reste un beau laboratoire d’idées, une entreprise audacieuse qui aurait mérité plus de corps.

par Danielle Chou

En savoir plus

Un Couple épatant: 1h37

Cavale: 1h51

Après la vie: 2h03

Acteur avant d’être réalisateur, Lucas Belvaux s’est offert le rôle principal de Cavale, la coproduction souhaitant la présence d’un interprète belge au générique. A son répertoire: Allons z’enfants d’Yves Boisset (1981), La Truite de Joseph Losey (1982) et La Femme publique d’Andrzej Zulawski (1984). Lucas Belvaux collabore avec trois anciennes plumes des Cahiers du cinéma: Jacques Rivette (Hurlevent, 1985), Claude Chabrol (Poulet au vinaigre, 1985 et Madame Bovary, 1991) et Olivier Assayas pour son premier film, Désordre (1986). Hervé Le Roux fait appel à lui pour Grand Bonheur (1993) et On appelle ça… le printemps (2000). En 1992, il s’attelle à son premier long, Parfois trop d’amour. Puis Pour rire! avec Jean-Pierre Léaud et Ornella Muti (1997).

L’idée de la trilogie lui vient pendant le tournage de Parfois trop d’amour. Et si chaque personnage secondaire était le héros d’un film à part entière? Un Couple épatant, Cavale et Après la vie ont été tournés simultanément à Grenoble suivant un planning serré. Chaque séquence a été filmée sous plusieurs angles, selon les exigences des trois story-boards. Lucas Belvaux a demandé à ses acteurs de conserver le même jeu pour les trois films, seule la mise en scène devant indiquer la frontière entre les genres. Le tournage dure six mois, la chronologie des trois films s’étire quant à elle sur dix jours. Cavale débute un mercredi, Après la vie le vendredi suivant et Un Couple épatant le samedi. Tous les films s’attardent sur les événements du lundi à 15h.

Riccardo Del Fra se voit confier les partitions des trois films. Le cinéaste invite en revanche trois monteuses-son et trois monteurs: Ludo Troch (Saint Cyr, Le Roi danse) pour Cavale, Valérie Loiseleux (la monteuse attitrée de Manuel de Oliveira) pour Un Couple épatant et Danielle Anezin (Tokyo Eyes) pour Après la vie. Parmi ses possibles inspirations, Lucas Belvaux cite Smoking/No Smoking d’Alain Resnais, Le Décalogue de Kieslowski, Petits arrangements avec les morts de Pascale Ferran et La Comédie humaine de Balzac. Et bien sûr les spin-off américains développant l’univers parallèle d’une série et mettant à l’honneur ses personnages secondaires. Par ses thèmes, Après la vie évoque le téléfilm de Belvaux réalisé en 2001, Mère de toxico (avec Valérie Mairesse - la secrétaire d’Alain Costes dans Un Couple épatant - et Jérémie Rénier).

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