The Assassin

The Assassin
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Assassin (The)
Nie yin niang
Taïwan, 2015
De Hou Hsiao Hsien
Scénario : Hou Hsiao Hsien
Avec : Chen Chang, Qi Shu
Durée : 2h00
Sortie : 09/03/2016
Note FilmDeCulte : ******
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Chine, IX siècle. Nie Yinniang revient dans sa famille après des années d'exil. Eduquée par une nonne qui l’a initiée aux arts martiaux, elle est devenue une véritable justicière dont la mission est d'éliminer les tyrans. Son maître lui donne comme mission de tuer son cousin Tian Ji'an, le gouverneur dissident de la province militaire de Weibo. Nie Yinniang va devoir choisir : sacrifier l’homme qu’elle aime ou rompre pour toujours avec « l’ordre des Assassins ».

CONTE DE CINEMA

Il y a une dizaine d'années, dans un entretien réalisé par Emmanuel Burdeau, Hou Hsiao-Hsien évoquait déjà son envie de "tourner un wu xia pian qui renforcerait une approche asiatique du genre et offrirait ainsi une réponse à la domination du cinéma hollywoodien". Ce film, c'est The Assassin, serpent de mer qu'on a presque cru ne jamais voir arriver sur un grand écran. L'attente est récompensée. Dissipons d'abord un malentendu pour le public occidental moins habitué au genre : si The Assassin est un film d'arts martiaux, ça n'est pas un Tigre et dragon 2 pour autant. Le film n'a pas grand chose à voir non plus avec une autre référence récente qui peut venir en tête, à savoir The Grandmaster de Wong Kar Wai. Si The Assassin peut évoquer un film du genre de ces dernières années, c'est peut-être The Sword Identity, le long métrage de Haofeng Xu avec son atmosphère spirituelle et ses combats minimalistes. Les affrontements dans The Assassin sont furtifs, bruts, parfois filmés de loin, les flèches brisent le dos et l'on ne se relève pas. Pas de chorégraphie chatoyante - les héros s'envolent à peine deux fois et restent sinon les pieds sur terre. L'intérêt semble définitivement entre les coups donnés.

S'il y a une référence à chercher pour qualifier The Assassin, elle est plutôt à trouver... chez Hou Hsiao-Hsien lui-même. Le long métrage rappelle les tableaux vivants des Fleurs de Shanghai, avec un tempo hypnotique qui donne la sensation d'être encore étourdi par l'opium d'une des précédentes merveilles du cinéaste. The Assassin raconte une mission comme un rite de passage. A l'image du regard de photographe de Tony Leung dans La Cité des douleurs, beaucoup de choses dans The Assassin se dérouleront à travers le regard de l'héroïne Nie Yinniang, incarnée par Shu Qi. La contemplation sublime de The Assassin semble autant emprunter au théâtre d'ombres chinoises qu'aux films de fantômes que le cinéaste confie avoir regardés dans sa jeunesse : voiles mystérieux, chorégraphie hiératique, apparitions spectrales. La culture chinoise au sens large a toujours imprégné l'esthétique et les sujets des films du cinéaste. The Assassin en est un nouvel exemple.

The Assassin est lent mais, pour qui sait regarder, n'a aucun temps mort. C'est là aussi une conception anti-hollywoodienne de l'action : le chemin taoïste emprunté par l'héroïne est aussi tumultueux que si elle avait dû trancher des dizaines de têtes. Pas d'effets de montage, mais une confiance absolue en la mise en scène, en la composition du plan, en sa profondeur, au travail sur la lumière: The Assassin est absolument stupéfiant de grâce et on n'en croit régulièrement pas ses yeux. Les rituels mystiques à l'image semblent aussi ceux de Hou Hsiao-Hsien et la magie noire qui opère (dans une scène sidérante de beauté) semble surgir des mains du cinéaste lui-même. Un plan dans les montagnes, à tomber à la renverse, fait de cette histoire immémoriale une oeuvre d'art contemporain dans laquelle une peinture chinoise de jadis s'anime sous nos yeux. Comme toujours, la beauté n'est pas vaine chez Hou : elle incarne la pureté du conte moral, sa simplicité minimaliste comme son ampleur universelle. Ce nouveau film est un chef d’œuvre.

par Nicolas Bardot

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