Musa, la princesse du désert

Musa
Corée du Sud, 2001
De Kim Sung-Soo
Scénario : Kim Sung-Soo
Avec : Sung-Kee Ahn, Joo Jin-Mo, Jung Woo-Sung, Ziyi Zhang
Durée : 2h08
Sortie : 28/08/2002






Chine, 14ème siècle. Les seigneurs de la guerre se partagent un continent dévoré par des luttes intestines. Des soldats et des diplomates coréens exilés dans le désert, ne survivent que dans l’espoir de rentrer chez eux. Leur rencontre avec une princesse ming enlevée par les Mongols va sceller leur destin.
Hyperproduction sino-coréenne, Musa réjouira d’abord tous les cinéphiles comptables : 5 ans de préparation, 5 mois de tournage, 4 caméras, 8 millions de dollars, 60 camions, 300 personnes et un périple de 10 000 km à travers la Chine. Etiqueté film le plus cher de toute l’histoire de la Corée, Musa est un hold-up de toutes les caisses d’épargne, mais aussi un recrutement massif des personnalités les plus cotées d’Asie. Quelques noms jetés en vrac sur un CV en béton armé : Zhang Xia, producteur d’Adieu ma concubine, Shiro Sagisu, compositeur d’Evangelion et Zhang Ziyi, étoile montante du cinéma chinois. A la tête de l’entreprise, Kim Sung-Soo, réalisateur de 41 ans, qui signe avec Musa son quatrième long métrage. A mille lieux de l’asiapudding redouté, Musa dépoussière avec bonheur trois genres éculés : le western, le récit historique et le wu xia pian, dont il emprunte quelques éléments. Trois feux croisés qui provoquent plus d’une étincelle. Le film se distingue à la fois des virevoltes en apesanteur de Tigre et Dragon et du décorum chic de L’Empereur et l’Assassin. Les arts martiaux sont réduits au simple maniement des armes. L’histoire, quant à elle, est connue ; le film porte clairement le sceau de ses prédécesseurs. L’hommage appuyé à Akira Kurosawa ne paralyse pourtant jamais la verve filmique de Kim Sung-Soo.
Le film revisite quelques passages obligés : attaques de convois, cachettes de fortune, poursuites en forêt..., en y injectant du sang neuf : un traitement violent et réaliste des combats, va-et-vient habile entre ralentis et accélérés. Le combat sous le neige dans Gladiator ? Musa utilise le même savoir-faire, avec une réussite égale. Flèches ensanglantées, corps dépecés, chevilles tranchées, têtes coupées, Musa est un stress épidermique de deux heures, un surplus d’adrénaline évacué dans des jouxtes barbares. Même s’il passe en revue tous les archétypes du récit médiéval, Musa parvient à insuffler une dimension unique à ses personnages. Défendu par des acteurs de premier plan, Jung Woo-Sung, Joo Jin-Mo, Ahn Sung-Gi, et un impressionnant chef yuan (Yu Rong Guang, vu dans Iron Monkey, de Yuen Woo Ping), le film s’offre un casting inespéré. De l’esclave insoumis au général orgueilleux, de l’archer fédérateur à la princesse capricieuse, toutes les classes de la société moyenâgeuse y sont représentées. Le triangle amoureux, fil conducteur du récit, n’apparaît qu’en filigrane. Epopée sanglante de quelques héros ordinaires, Musa ne réinvente pas un genre, mais le tire de sa torpeur. Avec panache.