F1

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F1
États-Unis, 2025
De Joseph Kosinski
Scénario : Ehren Kruger
Avec : Brad Pitt
Photo : Claudio Miranda
Musique : Hans Zimmer
Durée : 2h35
Sortie : 25/06/2025
Note FilmDeCulte : ***---
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Sonny Hayes était le prodige de la F1 des années 90 jusqu’à son terrible accident. Trente ans plus tard, devenu un pilote indépendant, il est contacté par Ruben Cervantes, patron d’une écurie en faillite qui le convainc de revenir pour sauver l’équipe et prouver qu’il est toujours le meilleur. Aux côtés de Joshua Pearce, diamant brut prêt à devenir le numéro 1, Sonny réalise vite qu'en F1, son coéquipier est aussi son plus grand rival, que le danger est partout et qu'il risque de tout perdre.

CHAMBRE A AIR

Quand le titre est apparu à l'écran sans son ridicule sous-titre "Le Film", on se dit, rassuré, qu'il avait beau adopter ce sigle et le logo de la "marque", il ne s'agirait pas d'un long spot de pub. Deux heures et demie plus tard, difficile d'en être aussi sûr. Il y a quelques années, Joseph Kosinski et Brad Pitt (et Tom Cruise) devaient faire ce qui est devenu Le Mans 66 de James Mangold. Après ça, le cinéaste fut également attaché un temps au projet Gran Turismo finalement réalisé par Neill Blomkamp. En gros, ça le travaillait, le Joe. Et comme on n'est jamais mieux servi que par soi-même, pour la première fois il est crédité à l'histoire. Et c'est pourtant son film le plus impersonnel?

Dès le départ, on retrouve pourtant les grandes qualités du cinéma sensoriel de l'auteur. Épaulé comme toujours du chef opérateur Claudio Miranda et tournant cette fois tout le film en IMAX 1.90, Kosinski signe chaque course de sa ligne claire immersive, l'image numérique cristalline abolissant la frontière de l'écran entre le spectateur et le spectacle. Quand il laisse le temps à la séquence de durer dans une continuité, les vrombissements du moteur, le défilement du paysage à toute vitesse, la musique tonitruante de Hans Zimmer composent une expérience son et lumière enveloppante. Pour peu que la voûte céleste nocturne s'agrémente de feux d'artifice, c'est le must. Dans ses meilleurs moments, F1 énergise de la sorte. Mais ce qui faisait la réussite des scènes de vol de Top Gun Maverick ne résidait pas dans la seule épate audiovisuelle, il y avait aussi des enjeux narratifs. Même sans Tom Cruise, dont la présence charriait un sous-texte métafilmique enrichissant le film, le scénario était solide. Or, ici il n'y a pas un arc aussi lisible. L'ensemble reste compétent mais incroyablement balisé et sans le gravitas nécessaire pour porter les scènes. Le film semble avoir envie de dire quelque chose sur la place que l'on mérite et que l'on a abandonné, avec ce protagoniste qui se fiche des lauriers et conduit pour conduire mais se révèle vouloir être le meilleur quand même - l'un des titres de travail était Apex, qui donne également son nom à l'écurie - mais son cheminement se fait étrange, d'abord arrogant puis très vite dans la collectif. Il y a aussi ses méthodes de magouilleurs, permettant de se positionner en grappillant des secondes à chaque tour, qui ne sont pas sans rappeler Moneyball (et c'est peut-être Pitt qui a appelé Aaron Sorkin, crédité sur le site de la Writer's Guild aux réécritures et dont on sent la patte sur quelques échanges amusants) et laissent entrevoir un récit sur l'élément rebelle baisant le système...mais ça reste un film siglé du logo de la marque.

Il y avait pourtant quelque chose d'intéressant à développer sur la notion de l'humain dans la machine, au sens figuré comme au sens propre. Ingénieur en mécanique de formation, Kosinski a toujours placé ses héros dans des véhicules extensions d'eux-mêmes (le LightCycle de Tron Legacy, le F-14 de Top Gun Maverick) ou dans un rapport étroit avec eux (Cruise le réparateur de drones dans Oblivion), les appelant à se soulever contre la Machine (Tron c'est littéralement un gars coincé dans une machine, le grand méchant d'Oblivion c'est globalement une grande station spatiale...) et l'espace d'un court instant, quand il est question de construire un nouveau véhicule (on sent l'exorcisme du rendez-vous manqué avec Le Mans 66) ou dans toutes ces répliques un peu bateau entre ce qui fait la victoire, la voiture ou le pilote, on se dit que c'est là qu'est le cœur du film. En fait, le film n'a pas grand chose à raconter. Tout est laissé à son niveau le plus fonctionnel. Alors ça fonctionne. Mais c'est tout. F1 n'est peut-être pas un spot de pub mais manque clairement de substance.

par Robert Hospyan

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