Berlinale: At Home

Berlinale: At Home
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At Home
Sto spiti
Grèce, 2014
De Athanasios Karanikolas
Scénario : Athanasios Karanikolas
Avec : Maria Kallimani
Durée : 1h43
Note FilmDeCulte : *****-
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Cela fait des années que Nadja travaille comme femme de ménage pour une famille grecque aisée, qui la considère presque comme un membre de la famille. Suite aux difficultés financières du père de famille, elle risque de perdre son emploi...

CHEZ ELLE IL FAIT TOUJOURS BEAU

Pour introduire At Home et rendre justice à son ton inhabituel, il est tentant d'en définir d'abord les contours et de parler de ce que le film n'est pas, tant il déjoue les attentes avec subtilité. La grande force d'At Home est de rester plaisant et facile d'accès tout en maintenant une écriture à la singularité discrète. Nadja n'est ni taiseuse et inquiétante comme les Bonnes de Jean Genet, ni pétulante et gouailleuse comme Rose dans Maguy. En un mot, At Home n'est pas un film de bonne comme on pourrait s'y attendre, et son premier atout pour se démarquer, c'est cette protagoniste inhabituelle. Géorgienne dans une famille grecque, Nadja reste toujours d'une parfaite composition, discrète tout en étant ailleurs, dans son monde. Elle est à la fois mystérieuse et pas du tout. Ce qui est déjà en soi tout un mystère.

At Home fait évoluer son récit discrètement mais sûrement, distillant les informations parcimonieusement sans qu'un manque de clarté ne se fasse jamais ressentir. On ne comprend pas tout de suite qui est la bonne ou la mère de famille ici, les relations entre les personnages ne sont pas établies d'emblée. D'une part parce que dans cette famille où Ndja est considérée "comme une sœur" par sa patronne, les frontières sont particulièrement floues, mais aussi parce que le film est assez fin pour nous faire jouer aux enquêteurs. On guette d'où va bien pouvoir surgir le mystère à l´intérieur de cette villa transparente face a la mer, superbe et presque surréaliste. Et pourtant, pas d'éclat de violence ou de vengeance glaçante ici. Si tout commence comme une sorte de conte de fée pour bonne (tout le monde est gentil, aucune tension a signaler après des décennies passées dans ce cadre paradisiaque), les choses se dérèglent en sourdine, comme atténuées par l'atmosphère d'incessant confort estival (y a t-il un seul plan ou l'on n'entende pas les grillons?).

At Home. A qui appartient vraiment la maison du titre ? Est-on vraiment chez soi quand on fait "presque" partie de la famille ? Le titre peut aussi se lire autrement. Nadja se fait-elle gentiment avoir ou bien la confiance qu'elle accorde est-elle un signe de sagesse? Se fait-elle manipuler par ses patrons devenus profiteurs ou au contraire par son amant qui la pousse à se rebeller? Où Nadja est-elle le plus elle-même, dans cette maison où elle a presque toujours vécu ou bien lorsqu'elle en sort ? Où est son "chez elle", dans son pays d'origine au souvenir presque refoulé, dans le lit de son amant ou dans sa relation avec sa fille, avec qui elle peine à discuter ? At Home n'est pas seulement brillamment écrit, il témoigne aussi d'un vrai sens de la mise en scène, et le temps d'un plan furtif et impressionnant, la silhouette de Nadja devient un reflet flou qui se brouille à travers une vitre, une silhouette qui se fond sur les murs. Face à cette image bouleversante, on ne sait plus très bien où on habite nous non plus.

par Gregory Coutaut

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