Entretien avec Aditya Assarat

Entretien avec Aditya Assarat

Remarqué avec son très beau premier film, Wonderful Town, le réalisateur thaïlandais Aditya Assarat a confirmé avec Hi-So, son second long métrage, qui a fait sa première lors du Festival de Berlin. Entretien avec l'une des valeurs montantes du cinéma thaïlandais.

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FilmdeCulte: Comment est née l'idée de faire Hi-So ?

Aditya Assarat: Mon envie de faire Hi-So remonte à l'université. J'ai écrit une première version du script et j'ai essayé d'en faire mon premier film, mais c'était trop tôt. Je n'avais pas d'équipe avec moi, pas d'argent, et pas assez d'expérience. Ça n'était juste pas le bon moment. Du coup j'ai mis ça de côté et j'ai travaillé sur autre chose. Mais après avoir fait Wonderful Town, avoir gagné en confiance, j'ai décidé de reprendre ce projet. Plusieurs années sont passées et le scénario a changé, bien qu'il s'agisse toujours d'une histoire très personnelle, quasi autobiographique, comme le sont souvent les premiers films. Je le perçois un peu comme mon premier film, même si c'est mon second.

FdC: Dans Hi-So comme dans votre précédent film, Wonderful Town, l'architecture joue un véritable rôle narratif, notamment en ce qui concerne la mémoire, les souvenirs liés au lieu. Pouvez-vous nous parler de l'importance du lieu, des ruines et de l'architecture dans vos films ?

AA: J'adore l'architecture. Si je n'avais pas été réalisateur, j'aurais aimé être architecte. Pour moi, certains buildings sont aussi beaux que des choses qu'on peut trouver dans la nature. En tant que réalisateur, je pars souvent d'un décor réel et j'écris une histoire à partir de ce lieu. Wonderful Town a été écrit à partir d'un hôtel qui existe vraiment. Hi-So a été écrit à partir d'un véritable immeuble d'habitation. C'est aussi l'une des clefs quand on travaille avec un petit budget: on doit faire avec ce qui est disponible. Certains lieux ont un caractère qui peut être utilisé comme on utilise des acteurs. Certaines personnes écrivent un films à partir de tel ou tel acteur, je fais pareil mais avec des lieux.

FdC: Il est question, à un moment de Wonderful Town, des fantômes du tsunami, sans que ce soit le vrai sujet du film. Dans Hi-So, il y a une équipe de tournage qui rejoue un drame lié au tsunami. Là encore, ce n'est pas le sujet du film mais la mémoire du tsunami est présente en filigrane. Est-ce qu'il serait pour vous envisageable, ou même intéressant, de faire un film dont le tsunami soit le sujet principal ?

AA: En fait je n'ai pas d'attachement particulier pour le thème du tsunami, mais plutôt pour les lieux où tout cela s'est déroulé. C'était dans la province de Phang-Nga, au sud de la Thaïlande. Mes films ont été inspirés par ces lieux, pas par le tsunami en lui-même. Mais après 2004, c'était impossible de parler de l'un sans évoquer l'autre.

FdC: Pouvez-vous nous parler de l'importance de l'ellipse dans vos films ?

AA: Trop d'ellipse dans un film mène à trop de confusion, mais j'essaie de jouer avec ça. C'est intéressant d'expérimenter et de voir jusqu'où on peut aller avec ce qu'on montre ou pas au public. Mais trop d'ellipse, c'est tout aussi mauvais que pas assez.

FdC: Hi-So est passé par Paris Project, la plateforme de financement du festival Paris Cinéma. Comment cela vous a-t-il aidé ?

AA: Ça permet de rencontrer beaucoup de gens, ce qui est nécessaire quand on est producteur. Même si le film ne se fait pas immédiatement - peut-être un ou deux ans après - les relations que l'on construit finissent par vous aider. C'est ce que permet un tel projet.

FdC: Plus d'un an après la Palme accordée à Apichatpong Weerasethakul, comment mesurez-vous l'effet de cette récompense sur l'industrie du cinéma en Thaïlande, et plus particulièrement sur le cinéma d'auteur ? Avez-vous noté une différence dans l'accueil des films thaïlandais à l'étranger ?

AA: C'est un bel exploit personnel mais ça n'a malheureusement pas eu une grande influence. L'industrie du film thaïlandais est restée la même. C'est un business difficile, comme partout dans le monde. Les films sont en concurrence avec d'autres formes de divertissement, les jeux vidéos, Facebook, les Ipads, les reality shows... Ça n'a pas rendu la situation plus simple, un seul film ne peut pas changer ça.

FdC: Pouvez-vous nous parler de votre expérience sur l'omnibus Sawasdee Bangkok ?

AA: Le projet a débuté comme une série de films produits pour la télévision. Il y en avait neuf, signés de neuf réalisateurs différents, tous à propos de Bangkok. Le programmateur du Festival de Toronto a aimé ces films mais pensait qu'il était impossible de les projeter tous les neuf. Finalement, on a décidé d'en monter quatre ensemble sur la durée d'un long métrage. C'était la version du festival, et la version qui a été vue à l'étranger.

FdC: Quels sont vos cinéastes favoris? Ou ceux qui influencent votre travail ?

AA: J'admire beaucoup le cinéma américain. Il y a beaucoup de grands réalisateurs travaillant à Hollywood - Quentin Tarantino, Christopher Nolan, Paul Thomas Anderson, Spike Lee, Steven Soderbergh - tous ces gens-là m'inspirent énormément.

FdC: Hi-So a t-il une sortie prévue en France ?

AA: Non, je ne crois pas qu'il sortira en France.

FdC: Quels sont vos projets ?

AA: Je travaille sur un omnibus avec d'autres réalisateurs asiatiques, j'ai d'autres projets personnels, mais je ne me suis pas encore décidé. Je vais faire un petit break.

par Nicolas Bardot

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