James Dean

James Dean
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Acteur
États-Unis

"This guy was like a shooting star. He’s so bright and then gone.". James Dean, un jeune homme brillant parti trop vite, comme ces comètes qui traversent le ciel une fois par siècle, marquant la mémoire collective à tout jamais. Un nom culte synonyme d’adolescent rebelle mâtiné d'acteur solitaire et talentueux. Une légende qui s’étend sur la moitié d’un siècle et qui reprend vie à chaque nouvelle génération.

THE FIRST AMERICAN TEENAGER

Trônant dans l’un des cadres de l’Actor’s Studio à New York, telle une devise immuable, la phrase "If Marlon Brando changed the way people acted, then James Dean changed the way people lived." montre la voie à de nouvelles générations d’acteurs depuis plus de quarante ans. Si James Dean a souvent été comparé à Brando - dont il était un immense fan - pour son côté ténébreux rebelle, son impact générationnel a été d’une toute autre mesure. Reprenant ce qu’avait amorcé son aîné dans Un Tramway nommé désir et L’Equipée sauvage, y ajoutant une belle gueule atypique à mi-chemin entre l’enfant perdu et l’adulte écrasé par le lourd fardeau des responsabilités, il est devenu le symbole de la cool attitude avant l’heure. Cheveux en bataille, silhouette androgyne, sexualité ambiguë, cigarette nonchalamment pendue au coin des lèvres, lunettes carrées en écailles noires soulignant des yeux d’un bleu parfait, il est un personnage mystérieux et hors du temps qui a su exprimer mieux que personne la difficulté de grandir dans une Amérique d’après-guerre. Il est devenu à travers les générations l’alter ego, le grand frère, le meilleur ami de tous les adolescents en mal de vivre, perdus, en quête d’identité. Rêve de tous les photographes pour ce visage qui capte si parfaitement la lumière et cette aptitude frappante à prendre des poses insolites et remarquables, son image a fait le tour du monde sous toutes les coutures, cachant derrière la carapace de papier glacé un caractère solitaire et inaccessible.

Toujours en dehors du système, Dean est un anticonformiste naturel, réputé pour avoir mauvais caractère. Les rôles qu’il a interprétés se sont souvent retrouvés mélangés à sa vraie personnalité. Révolutionnaire dans sa façon de faire ce qu’il lui plaisait au moment où il le désirait, il a attiré la curiosité du public, lui demandant toujours plus pour arriver à le comprendre. Très entier dans ses attitudes et ses réactions, il avançait à pleine vitesse, poussant toutes les situations à l’extrême. Peu à son aise dans ses relations avec autrui, il se réfugiait souvent dans un comportement agressif pour masquer cette timidité. Il ne se sentait capable d’avancer et de travailler que dans une atmosphère de tension et de conflit. Cette tendance, qui frôlait pour certains l’irrespect, traumatisera plus d’un acteur ou autre réalisateur. Ironie du sort, Elia Kazan et George Stevens déclareront au cours de leurs tournages respectifs qu’ils ne feraient plus jamais jouer James Dean devant leur caméra. Pour d’autre cette attitude n’était qu’un caprice de comédien ayant atteint la gloire plus vite qu’il ne l’aurait fallu. Simple jalousie de la part de bon nombre d’entre eux, car ne se prenant jamais pour la star qu’il était, il a balayé d’un simple revers tous les jeunes premiers d’Hollywood qui se trouvaient à ses côtés. Trois films, une jeunesse immortelle et des barrières franchies avec allégresse, ont fait de lui l’une des plus grande légende de l’histoire du cinéma.

"I AM GOING TO MAKE IT. I AM GOING TO BE FAMOUS."

Né le 8 février 1931 à Marion dans l’Indiana, James Byron Dean est le fils unique de Winton et Mildred Dean. Très tôt passionné par les arts et en particulier la comédie, le jeune James adore créer des petits théâtres de marionnettes avec sa mère. Alors qu’il n’a que cinq ans, la famille déménage à Los Angeles pour des raisons économiques et Mildred inscrit James à des cours de claquettes et de violon. En 1940 sa mère meurt des suites d’un cancer. Winton voulant que son fils de neuf ans grandisse dans un cadre familial équilibré, le renvoie dans l’Indiana chez son oncle et sa tante Marcus et Ortense Winslow. Le jeune garçon très affecté considère ce changement radical comme un abandon de la part de ses parents. En 1955 il déclarera à ce sujet: "Ma mère est morte lorsque j’avais neuf ans… Qu’est-ce qu’elle voulait que je fasse? Que je me débrouille tout seul.". Peu porté sur les études et ayant un fort problème de lecture, il ne reste dans ses diverses écoles que pour y suivre des cours de théâtre et jouer dans les productions annuelles, dans lesquelles il remporte un franc succès. Les annales retiennent en particulier Autant en emporte le vaurien et Tu ne peux pas l’emporter avec toi. Une fois son diplôme de fin d’études secondaires en poche, il s’embarque de nouveau pour Los Angeles où il s’inscrit au Santa Monica Jr. College et à UCLA dans le but de poursuivre sa formation d’acteur.

Dès son arrivée dans la ville, James Dean arpente tous les castings possibles et imaginables, publicité pour Pepsi en 1949, essais cascades pour le show télé Beat The Clock en 1950, le tout entrecoupé de seconds rôles dans des pièces et des téléfilms live dans lesquels il joue le plus souvent le délinquant de service pour un salaire de 75 dollars par semaine. Début 1951, son ami James Whitmore lui conseille de partir pour New York afin de parfaire sa formation. A peine arrivé dans la grosse pomme, il décroche un premier rôle dans la pièce See the Jaguar sur Broadway et dans de nouveaux téléfilms. En mars 1951 il est repéré sous les traits de l’apôtre Jean dans un des épisodes de la saga Family Theatre et se voit offrir le rôle du jeune arabe gay de la pièce The Immoralist avec lequel il remportera le Bloom Award du meilleur espoir masculin. S’il n’aime guère ce personnage, ce prix lui ouvre les portes des studios de cinéma. En deux ans il enchaîne quatre petits rôles qui ne seront jamais crédités dans les films Fixer Bayonets, Sailor Beware, Has Anybody Seen My Gal? et Trouble Along the Way et s’inscrit en 1952 à l’Actor’s Studio. Au tournant de l’année 1953 il est bien implanté dans le paysage new-yorkais, toujours au courant des moindres castings organisés par les petites compagnies et les grandes chaînes de télévision nationales comme CBS et NBC. Souvent comparé à Marlon Brando ou Montgomery Cliff, son jeu impressionne le public et les professionnels.

"HOW CAN YOU MEASURE ACTING IN INCHES ? "

Petit génie dramatique, James Dean conçoit la profession d’acteur comme un lieu d’apprentissage. Il pense qu’un comédien doit expérimenter un maximum de situations, métiers, sports, arts afin de progresser et de ne pas projeter seulement sa propre personnalité dans le rôle qu’il interprète. Doté d’une faculté d’apprentissage et avide de découverte il développe une façon de jouer qui se nourrit de tout ce qu’il emmagasine, le rendant capable d’incorporer la psychologie même des personnages dans sa façon de parler et de se mouvoir. A ce sujet l’acteur Jim Backus déclare: "Les lignes de dialogues n’étaient pas simplement quelque chose qu’il avait mémorisé, mais elles étaient réellement une part de lui même." La perfection de son jeu résulte également d’un gros travail de préparation et de concentration en amont. Il était un "neurotique" totalement impliqué dans son travail, et avait besoin de jouer pour exister. De plus, fort de son expérience de danseur, il utilise son corps de façon très expressionniste, improvisant des mouvements et attitudes au milieu de scènes très écrites. En 1954, Elia Kazan, à la recherche d’un Cal pour son nouveau film A l’Est d’Eden adapté du roman de John Steinbeck qui traite de la rivalité de deux frères pour gagner l’amour de leur père, est totalement happé par la qualité des essais d’audition de James Dean, déclarant avoir trouvé en lui une perle mystérieuse parfaite pour le rôle.

James Dean prend alors part à l’un des tournages les plus attendus de l’époque. Le personnage de Cal Trask s’avère être très proche de lui. Un jeune homme du middle west sans mère, délaissé par son père et obsédé par la réussite et l’envie de reconnaissance. Elia Kazan déclarera plus tard: "Jimmy était Cal, il en voulait à tous les pères." Sans réellement le vouloir, son apparition dans A l’Est d’Eden va être la première étape de la construction du mythe James Dean. A la sortie du film en 1955, alors qu’il commence tout juste le tournage de Géant, Cal Trask devient le symbole de la jeunesse aliénée d’après-guerre. Il expose à l’écran ce que ressentent tous les adolescents américains des années cinquante, qui s’identifient alors totalement à ce jeune homme dédaigneux et déchiré. Pour ce rôle, James Dean sera nommé en 1956 à l’Oscar, au BAFTA comme meilleur acteur étranger et recevra le Golden Globe du meilleur acteur dans un film dramatique, devenant ainsi l’un des cinq rares acteurs à avoir été nommé à l’Oscar pour une première prestation dans un premier rôle au cinéma, et le premier à recevoir des prix et nominations à titre posthume. Dès qu’il finit le tournage sous la houlette de Kazan, il est tout de suite engagé pour interpréter un autre adolescent rebelle, Jim Stark, qui apportera les finitions à son mythe dans La Fureur de vivre réalisé par Nicholas Ray.

Le tournage de ce deuxième film démarre en début d’année 1955 pour de longs mois. James Dean décide de déménager sur Los Angeles pour se sentir plus à son aise et bénéficier d’un lieu calme pour se concentrer. Si le rythme soutenu qu’entretient Nicholas Ray est épuisant, James se sent entouré par une réelle famille de jeunes du même âge et, après un temps d’adaptation, tisse des liens d’amitié avec la plupart des autres acteurs, dont notamment Denis Hopper. La particularité du film est de s’intéresser à une catégorie sociale très peu représentée dans le cinéma américain de l’époque: les jeunes de la classe moyenne. Il retrace vingt quatre heures de la vie de trois jeunes adolescents marqués par la confusion et le tourment, voulant s’échapper de leur vie trop propre pour tester le monde de la délinquance. Comme il l’avait déjà fait pour Cal Trask, James Dean s’approprie totalement le personnage de Jim Stark et utilise sa méthode d’improvisation pour agrémenter ses dialogues de petits rires et de regards tout à fait justes, comme en témoigne entre autres scènes celle du commissariat. Le film sortira en novembre 1955, soit 2 mois après sa mort, et Dean sera nommé au BAFTA du meilleur acteur étranger en 1957. Une fois La Fureur de vivre entrée en phase de post-production, il enchaîne sur ce qui sera son dernier film: Géant, un chef d’œuvre épique aux côtés de Liz Taylor, Rock Hudson, et dirigé par George Stevens.

Le tournage de Géant se déroule au cours de l’été 1955 dans les plaines arides de Marfa au Texas. James Dean est affaibli par ses deux tournages précédents et l’idée de n’être qu’un second rôle derrière Rock Hudson, qu’il considère comme un mauvais acteur, ne lui plaît guère. Pour se mettre en condition, James Dean décide de vivre à la texane sous l’œil attentif de Bob Hinkle, et passe la plupart de son temps à apprendre à manier le lasso et à dresser les chevaux, toujours dans le même but de toucher à tout ce qui peut se rapporter de près ou de loin à son personnage. Le rôle de Jett Rink est l’un des plus durs qu’il lui ait été donnés. Il traverse les décennies et se montre très sombre et très pessimiste, contrairement à Cal et Jim qui eux s’en sortaient au bout du compte. Les conditions de tournage lui semblent exécrables: on l’empêche d’improviser, il n’adresse pas la parole à Rock Hudson et les heures d’attentes perturbent sa concentration. Il décide alors de boycotter le plateau, ne se montrant sur les lieux que pour les scènes où il apparaît. George Stevens, grand maître à bord, se met alors à travailler seul avec lui en le poussant à bout de force. Géant ne sortira qu’un an après la mort de sa star, qui sera nommé en 1957 à l’Oscar, devenant le seul acteur au monde à avoir reçu deux nominations à titre posthume.

"DREAM AS IF YOU’LL LIVE FOREVER. LIVE AS IF YOU’LL DIE TODAY"

Le 30 septembre 1955, alors qu’il ne reste plus que deux jours de tournage pour Géant, James Dean se rend à une course automobile au volant de sa nouvelle Porche Spider qu’il s’est achetée avec son cachet du film. Les courses sont, avec la comédie, toute sa vie; c’est son exutoire, le seul moment où il peut s’évader, être lui-même. La nuit tombe, la voiture est basse et se confond avec le bitume. Le jeune Turnspeed déboule, fauchant Dean derrière son volant. L’acteur meurt sur le coup. La légende se met instantanément en place. L’enterrement à Park Cimetary dans sa ville natale de l’Indiana est très médiatisé, son image devient une marque déposée qui brasse chaque année des millions de dollars et des milliers de fans se recueillent chaque année sur sa tombe. Lui qui était très secret, qui redoutait les journalistes et qui refusait la plupart des interviews, le voici désormais sur les couvertures et jaquettes d’une foultitude de livres et documentaires, rassemblant des témoignages de proches qui en fin de compte n’en connaissent pas plus que les médias. Voici un homme qui, en dépit de sa grande figure médiatique, a réussi à faire perdurer le mystère autour de lui. Les questions préférées des journalistes restent celles concernant sa sexualité et ce qu’il serait devenu s’il avait survécu. Certains pensent qu’il se serait fait dévorer par Hollywood, d’autres continuent à croire en ce petit prince insaisissable.

Et lui, qu’en pensait-il? Ses projets étaient de continuer encore plus loin, de découvrir encore de nombreuses choses de toutes sortes. Passionné de corrida, il avait commencé à écrire une pièce de théâtre mettant en scène un toréador encorné par un taureau qui devait surmonter sa peur et faire face à ses démons pour reprendre son travail. Il avait également dans l’idée de passer derrière la caméra. Pour se faire, il avait une série de calepins intitulés Director’s notebook dans lesquels il écrivait toutes ses remarques sur la façon de travailler des différents réalisateurs qu’il croisait sur son parcours. Il voulait garder des traces, continuer à apprendre des autres. Toujours dans l’idée de diversifier ses savoirs, il s’était mis à la sculpture sur la fin du tournage de Giant et avait décidé de lever le pied (comme il l’annonçait dans une publicité, quelque peu ironique avec le recul, tournée en juillet 1955 sur la sécurité routière), de prendre une pause pour faire des voyages et trouver le temps de "commencer à apprendre ce qu’il avait besoin de savoir." Un avenir tout tracé dans la lignée de ce qu’il avait commencé. Serait-il devenu un grand réalisateur? Serait-il resté cette image rêvée de l’adolescent rebelle? L’étoile filante a laissé ces questions en suspens, en honorant sa devise récupérée dans un film de Nicholas Ray: "Il faut vivre vite, mourir jeune et faire un beau cadavre."

par Julie Anterrieu

Filmographie sur FilmDeCulte

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1956 Géant 1955 La Fureur de vivre 1955 A l'Est d'Eden 1953 Trouble Along the Way 1952 Has Anybody Seen My Gal? 1952 Sailor Beware 1951 Fixed Bayonets

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