Amos Kollek

Amos Kollek
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Réalisateur, Scénario

Amos Kollek est un réalisateur à part, adulé ou controversé. Certains critiques crient au génie et vont le comparer à Godard, Cassavetes ou encore Truffaut, alors que pour d’autres, ses œuvres sont bourrées de clichés, de voyeurisme et surtout filmées à l’emporte-pièce. Lumière sur un réalisateur atypique qui mérite qu’on y regarde de plus près.

DE SHIMON PERES A BURT LANCASTER

Fils de Teddy Kollek, qui fut le maire de Jérusalem pendant vingt-huit ans, Amos Kollek y naquit en 1947. Grâce à son père, il eut très tôt l’occasion de rencontrer des célébrités aussi bien israéliennes qu’américaines, de Shimon Pérès à Franck Sinatra. Le jeune garçon d’alors est fasciné par les stars et déclare avoir appris l’anglais en déchiffrant les autographes des acteurs. Il effectue son service militaire dans l’armée israélienne de 1965 à 1968 et est diplômé trois ans plus tard de l’université hébraïque de Jérusalem, avec en poche une double licence de philosophie et psychologie. Il écrit ensuite des articles et publie des nouvelles dans des journaux israéliens mais aussi dans le New York Times et Die Zeit en Allemagne. Il est également l’auteur de cinq livres traduits dans plusieurs langues dont Ne me demandez pas si j’aime en 1971, (paru en France aux éditions Stock en 1991), After They Hang Him en 1977, et Approximately Clint Eastwood en 1995. Et le cinéma dans tout ça? Depuis l’âge de 16 ans, il rêve de devenir Burt Lancaster. Il se regardait tous les matins dans le miroir et espérait y voir le visage de l’acteur. La déception, immense, était au rendez-vous, et il se disait alors, peut-être demain. Ainsi de suite, jour après jour, et c'est ce désir de ressembler au célèbre acteur qui l’a rapproché du cinéma. Ainsi, c’est en 1980 qu’il adapte son premier roman sous le titre Al Tishali Im Ani Ohev (Worlds Apart), réalisé en Israël par Barbara Noble, et dans lequel il tient également un rôle.

ENTRE DOCUMENTAIRE ET FICTION

Réalisateur indépendant, Amos Kollek est aussi scénariste, acteur et producteur de la plupart de ses œuvres. Pour lui, ce qui compte avant tout c’est un scénario bien écrit et le choix de bons acteurs. Les répétitions et la direction d’acteurs, il ne connaît pas, et se fie à l’intuition de son casting, se permettant juste une ou deux remarques lors des prises. Vivant au Etats-Unis, Amos Kollek y réalisera tous ses films, mais Israël est toujours très présent dans son cœur, et il y fait référence de nombreuses fois dans son œuvre. Ainsi, en 1985, il réalise son premier film, Goodbye New York, ou les aventures d’une jeune juive américaine dans un kibboutz en Israël. Suivra Forever Lulu, une comédie à suspens avec Alec Baldwin dans son tout premier rôle. C’est également à lui que Sarah Michelle Gellar doit sa première apparition sur grand écran dans High Stakes. S’en suit Double Edge, dans lequel Faye Dunaway joue une journaliste américaine couvrant le conflit israélo-palestinien. Film à mi-chemin entre la fiction et le documentaire, vu que des personnages réels - dont le père d’Amos Kollek, l’ex-ministre des affaires étrangères Abba Eban ou encore le controversé rabbin Meir Kahane - y sont interviewés. Il continue dans cette veine en 1994 avec Whore 2 (qui n’est pas la suite du film de Ken Russel Whore), portrait très réaliste de prostituées new-yorkaises. Il a en effet réalisé de nombreux entretiens avec des prostituées pour les faire ensuite interpréter par des actrices. C’est jusqu’alors la marque distinctive du réalisateur, des films qui oscillent entre documentaire et fiction, fait d’autant plus marqué qu’il dispose de peu de moyens et filme souvent caméra à l’épaule. Ses films ne s’exportent pas hors des Etats-Unis et passent plutôt inaperçus auprès du grand public, certains sortant directement en vidéo.

ET ANNA THOMSON INCARNA SUE

C’est alors qu’arrive Sue perdue dans Manhattan, qui se fait remarquer au festival de Toronto en septembre 1997, gagne le Grand Prix du jury à Deauville la même année et un prix dans une section parallèle du festival du film de Berlin en 1998. Amos Kollek a eu l’idée du scénario dans un parc, un jour d’été, alors qu’il voit une jeune femme montrer ses seins à un vieil homme qui lui avait acheté un "Strawberry Mystic" pour 75 cents. Scénario qu’il achève quelques semaines plus tard. Anna Thomson, pour qui Amos Kollek deviendra un peu comme un père, accepte le rôle tout de suite. Tourné avec très peu de moyens, faisant de ce fait de presque toutes les scènes des premières prises, et en seulement deux semaines, caméra à l’épaule dans les décors naturels des rues et cafés de Chelsea, ce film va permettre au public français de faire connaissance avec le cinéma d’Amos Kollek, mais aussi et surtout avec son envoûtante actrice. Le film pourtant difficile, témoin de la lente descente aux enfers de son héroïne, va rassembler un peu plus de 400 000 spectateurs à Paris. Il marque la première collaboration du tandem Amos Kollek-Anna Thomson et sera suivi de quatre autres projets. Elle est indissociable de la carrière du réalisateur, tant elle habite de manière hallucinée et avec tellement de naturel chacun des rôles de femme comme les autres et qui pourtant ne ressemble à personne qu’il lui a donnés.

TANT QU’IL Y AURA DES FEMMES

Suivra Fiona, produit avec encore moins de moyens, autre portrait de femme à l’atmosphère difficile, qui sera également présenté à Deauville. Il faudra attendre 2000 pour la comédie Fast Food Fast Women, ce qui réussira à Amos Kollek et Anna Thomson vu que le film recevra un prix œcuménique à Cannes. Amos Kollek a décidé de réaliser cette comédie car d’une part tout le monde les tenait, Anna et lui, pour dépressifs, mais aussi et surtout car ayant des enfants qui auront un jour l’âge de voir ses films, il voulait mettre un peu de légèreté dans son propos. On ne change pas une équipe qui gagne et pourtant Amos Kollek fait des infidélités à sa merveilleuse actrice l’année suivante: c’est pour Valérie Geffner qu’il écrit le rôle principal de Queenie in Love, sorte d’extension du petit rôle de Wanda qu’elle tient dans Fast Food Fast Women. Cela dit, l’histoire de cette femme solitaire à la recherche de quelqu’un qui l’écoutera et l’aimera est, elle, toujours là, le sourire en plus. Il faudra attendre Bridget, annoncé comme le dernier volet d’une trilogie commencée par Sue perdue dans Manhattan et continuée par Fiona, pour que se reforme le duo Kollek-Thomson, celui-ci s’étant en partie inspiré de la vie de l’actrice pour nourrir son scénario. En effet, elle a elle-même perdu son mari et a ensuite connu des difficultés pour garder ses enfants. Cela dit, elle n’a heureusement pas eu à passer par toutes les épreuves que son personnage affronte dans le film. Trilogie dont le noyau commun est bien ces destins de femmes en marge de la société, confrontées à des difficultés pour survivre et dont la solitude n’est qu’un fardeau supplémentaire.

J’AI REVE NEW YORK

Réalisateur new-yorkais, Amos Kollek se devait d’apporter sa pierre à l’édifice "post-11 septembre". C’est en novembre 2001 que le journaliste Daniel Leconte lui donne carte blanche pour réaliser un documentaire illustrant une soirée thématique sur Arte. Le titre, Une Gloire amère, s’impose comme une évidence de l’atmosphère de la ville depuis cet autre jeudi noir. Il y interroge ses amis, les habitants de son quartier, des écoliers new-yorkais et suit Anna Thomson dans les rues de la ville, Sue retrouve Manhattan. Documentaires, fictions, histoires très noires, comédies, Amos Kollek compose sur la même gamme, conservant une sorte de fil rouge qui fait qu’il est si facile de se laisser prendre à chacune de ses histoires, de s’identifier à ces personnages qui ne sont pas si éloignés que ça de chacun de nous. Cela dit, il vient de terminer un cycle avec Bridget et il est donc de bon ton de se demander ce qu’il nous réserve avec son nouveau film. Va-t-il garder ce même regard sur New-York, qui fait que certains le comparent à Woody Allen (comme lui d’ailleurs, son cinéma est plus apprécié en France qu’aux USA)? Va t-il rester sur la lignée lumineuse de Bridget, revenir sur un destin tragique à la Sue, ou est-il à l’aube d’un tournant dans sa carrière? Réponse sur les écrans à partir du 24 décembre.

par Carine Filloux

En savoir plus

2004 Happy End 2003 Music 2002 Bridget 2001 Queenie in Love 2001 Three Erotic Tales 2000 Fast Food Fast Women 1998 Fiona 1997 Sue perdue dans Manhattan 1994 Whore 2 1992 Double Edge 1989 High Stakes 1987 Forever Lulu 1985 Goodbye, New York 1980 Worlds Apart

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