Après un premier épisode pour lequel il déplore encore le manque de temps et d'argent, Bryan Singer n'a- bandonne pas pour autant sa démarche un tant soit peu plus terre-à-terre lors- qu'il réalise X-Men 2 (2003). Il a beau user du même courant esthétique, il est le seul à garder les acteurs aussi impliqués. Dans la séquence illustrée ci-des- sous, un personnage peut se téléporter et se sert de ce pouvoir de manière à neutraliser quasi simultané- ment plusieurs vigiles. Dans
 
la bande dessinée, lors de telles séquences, le protago- niste (Diablo) figurait plu- sieurs fois dans la même case, représentant son "omni- science physique". Dans le film, Singer conserve cette idée, en l'adaptant évidem- ment selon cette nouvelle vague formelle et, en un plan, montre son acteur (et non une réplique numérique) qui disparaît et réapparaît plus loin, envoyant tour à tour chacun de ses adversaires dans les airs. Le procédé du motion-control permettant à la caméra d'effectuer un même
 
mouvement sur un même axe plusieurs fois de suite, le cinéaste n'avait plus qu'à tourner son plan à plusieurs reprises, coordonnant les cascades, de manière à créer l'illusion. La technolo- gie digitale n'intervient pas avec autant d'importance que chez les autres, néan- moins, on retrouve le ralenti et la volonté de garder l'unité de plan, évoquant encore une fois les cases de bande dessinée.














Cependant, il existe une autre école de la transition comics/cinéma. Si Raimi, Del Toro et Singer trans- formaient leur cadre en case, Ang Lee préfère trans- former littéralement son écran en page. Dans Hulk
 
(2003), il fait abondamment usage du split-screen, procédé de montage permettant de diviser l'écran en plusieurs... cases. Le réalisateur n'a de cesse de jouer avec les transitions (volets, faces d'un cube qui tourne, pages que
 
l'on feuillette) et multiplie les cases à l'écran, donnant l'impression au spectateur de lire une BD. Un parti pris qu'il pousse par moments à l'extrême comme dans le plan 5, ci-dessous.





Avant lui, avec son hom- mage aux comics, Incas- sable (2000), M. Night Shyamalan avait déjà évo- qué la case à l'écran par le biais de cadres dans le cadre. Plus intéressé par les
 
récurrences thématiques du neuvième art, il ne manquait pas pour autant de faire réfé- rence visuellement aux illus- trés. Ainsi, des fauteuils dans le train, l'embrasure d'une porte, la voûte d'un tunnel,
 
les barres d'un escalier, deviennent autant de ban- des d'une planche qui se dessine imperceptiblement à l'écran.







L'existence de divers cou- rants et de différentes ap- proches au sein d'un même courant est le témoin d'une richesse qui reste probable- ment encore à exploiter. Avec Batman Begins de
 
Christopher Nolan, et son désir d'en faire un film ultra- réaliste, ou encore le Super- man peut-être réalisé par Michael Bay, constamment en quête du plan inédit, le futur promet encore de belles idées
 
d'adaptation. En tout cas, le comic book et les avancées numériques permettent au cinéma de rester un art en pleine effervescence.