Don Quichotte

Don Quichotte
Envoyer à un ami Imprimer la page Accéder au forum Notez ce film

De nos jours, un monsieur un peu fou, grand lecteur de romans de chevalerie, entreprend de traverser le pays à cheval, accompagné d’un fidèle écuyer, afin d’accomplir de grandes actions de chevalier et de conquérir le cœur d’une femme.

CITIZEN QUICHOTTE

Bien avant Terry Gilliam (Cf. le documentaire Lost in la Mancha), Orson Welles s’était déjà cassé les dents sur l’adaptation du chef d’œuvre de Cervantès. Vingt-cinq années de tournage pour un film inachevé longtemps considéré comme perdu, avant que les bobines ne soient retrouvées et finalement montées en 1992 par Jess Franco (réalisateur des Prédateurs de la nuit, avec Brigitte Lahaie !) et Patxi Irigoyen, sept ans après la mort de Welles. Fameuse arlésienne, rêve de cinéphile, ce Don Quichotte démontre l’importance que prendrait par la suite le montage dans l’œuvre de Welles : au fur et à mesure, le cinéaste se révélait de moins en moins intéressé par le tournage de ses films, estimant que ceux-ci se construisaient réellement sur la table de montage. Accumulation de rushes sans réelle cohérence, le film apparaît comme un magma d’une rare laideur, que le cinéaste aurait sans doute dynamité par la suite – comme il l’avait fait pour Othello. Le journaliste espagnol Juan Cobos, qui avait assisté à une projection du film monté par Welles lui-même, s’accorde d’ailleurs à dire que le film que l’on connaît aujourd’hui est bien différent de celui voulu par le cinéaste.

Selon l’aveu même du cinéaste, Don Quichotte n’est pas resté inachevé pour cause de manque de moyens. Ce film apparaissait pour Welles comme une sorte de Work in progress, un « exercice privé » réalisé au fil des ans de façon indépendante, sans obligation, sans contrainte de temps. Alternance sans rythme et sans génie de plans (très) larges et de plans courts, utilisant à foison les contre-plongées afin d’inscrire son personnage principal dans la verticale, Don Quichotte se révèle, en l’état, un sombre ratage qui n’a que peu de valeur autre qu’historique. De nombreuses scènes, conservées à l’état de rushes par des collectionneurs européens, n’ont d’ailleurs pas pu être intégrées au film. Que reste t-il ? Principalement la façon dont le film s’inscrit malgré tout dans l’œuvre du cinéaste, à travers un nouveau personnage marginal, rejeté, démiurgique, finalement proche de son Charles Foster Kane ou surtout de son Arkadin. Au final, si ce DVD, ressorti dans la collection Les Films de ma vie, apparaît comme nécessaire pour mieux appréhender l’œuvre du cinéaste, le film en lui-même se révèle bien anecdotique.

par Anthony Sitruk

En savoir plus

Interactivité :

Passons rapidement sur les nombreux problèmes d’image et de son, bien compréhensibles étant donné la provenance du film (montage à partir de bobines supposées perdues, et retrouvées dans un mauvais état), et que l’éditeur parvient néanmoins à atténuer grâce à un joli travail sur les teintes et la lumière.

Saluons plutôt les bonus, légers certes, mais très instructifs et finalement suffisants : deux intervenants, deux entretiens, l’un sur Cervantès et son Don Quichotte, l’autre sur Welles et son adaptation. Les deux historiens replacent les œuvres dans leur contexte historique, révèlent quelques anecdotes (notamment le fait que Welles avait à la base commencé à penser à son adaptation pour la télévision), etc. Petit DVD, petit prix, pour un film certes bancal d’un strict point de vue artistique, mais qui devient passionnant dès que l’on en connaît la genèse.

Partenaires