Les rejetons du diable - petite histoire des enfants démoniaques au cinéma

Les rejetons du diable - petite histoire des enfants démoniaques au cinéma

Comme le chevrotait feu Jacques Martin, les enfants sont merveilleux. Véritable sous-genre horrifique, le film de mauvaise graine a apporté au cinéma fantastique quelques unes de ses plus belles perles, à base d'enfants de Satan et mioches pervers. A l'occasion de la sortie de Insidious, petite photo de classe des pires têtes à claques démoniaques du cinéma.

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LA MAUVAISE GRAINE

Mervyn LeRoy - 1956

Les enfants cachent beaucoup de choses aux adultes, entend-on dans La Mauvaise graine de Mervin LeRoy. Et Rhoda, la si mimi Rhoda, avec ses couettes d’Annette et ses révérences de Princesse Sarah, en cache pas mal à maman. LeRoy lance ici le prototype de l’enfant démon avec cette fillette qui mériterait de finir au broyeur ménager avant d’être écartelée par des taureaux, sur le modèle des blondeurs aryennes que l’on retrouvera quelques années plus tard dans Le Village des damnés. Le genre n’est pas encore habitué aux enfants malveillants, les personnages non plus : la mère culpabilise, prend la faute sur elle, se demande si le Mal est dans le sang. Dès les premiers instants, LeRoy annonce la couleur avec l’utilisation d’un Au clair de la lune dégénéré, où la comptine la plus innocente devient aussi la plus vicieuse. Malgré une transposition théâtrale parfois peu finaude, La Mauvaise graine lance quelques problématiques intéressantes, et disperse son venin pervers lors de quelques scènes assez gonflées.

LE VILLAGE DES DAMNES

Wolf Rilla - 1960

Dans le village perdu de Midwich, en Angleterre, d’étranges événements se succèdent, d’abord ce jour où tous les habitants tombent dans le coma, puis ces femmes qui se retrouvent enceintes pour, enfin, la même nuit, enfanter de divins gamins blonds aux yeux bleus. Frimousses d’anges qui deviennent rapidement inquiétantes, perruques de Cloclo et regards possédés sont au menu de cette pierre angulaire du film d’enfant démoniaque. Quelques années après La Mauvaise graine, Le Village des damnés lance ce sous-genre du fantastique où les valeurs sont renversées et où le Mal prend des traits de chérubin. Le Village…, en cousin des productions SF de l’époque, en dit pas mal sur l’Amérique d’alors – cette infortune mystérieuse qui touche la population, on l’aurait déjà localisée quelque part, dit-on, en URSS. Vertiges de la paranoïa, angoisses du communisme, les damnés en culottes courtes, télépathes et omniscients, prennent alors un autre visage. Dans les années 90, John Carpenter, alors un peu au creux de la vague, se cassera quelques dents sur le remake de ce petit classique.

LA QUATRIEME DIMENSION

James Sheldon - 1961 (épisode It's a Good Life) Joe Dante - 1983 (Segment 3)

This is the monster. Dans l'épisode It's a Good Life de la série télévisée La Quatrième dimension, le présentateur Rod Serling ménage son effet: dans une petite ville de l'Ohio, un monstre fait régner la terreur. A l'issue du prologue, on découvre que le monstre n'est rien d'autre qu'un jeune garçon. Mais pas n'importe quel garçon: Anthony sait lire dans les pensées et envoie à jamais, dit-on, toute personne qui viendrait le contrarier au champ de maïs. Le démon, c'est ici l'enfant-roi de l'après-guerre, forçant ses semblables à obéir et à sourire devant tous ses caprices. Vingt ans plus tard, la relecture de Joe Dante, dans la version cinéma de la série télé, offre un tout autre point de vue. La terreur précède l'enfant, qui au fond ne fait rien de mal si ce n'est quelque caprice de gamin, mais l'idée même de le contrarier pétrifie son entourage. Dans cet univers enfantin où le cartoon a envahi la réalité (mines grimaçantes, décor technicolor), c'est d'une mère que le héros a besoin. Et le terrible démon, alors, se transforme en ange qui fait pousser les fleurs.

L’EXORCISTE

William Friedkin - 1973

Tu as vu ce qu'elle a fait, ta chienne de fille?. La chienne en question est une petite gamine joufflue d'une dizaine d'années, prénommée Regan (Régine en vf, ce qui donne déjà un indice de la diablerie qui l'habite). Dans son classique du saint effroi, William Friedkin s'attaque à la terreur absolue où le coeur même de la famille tombe sous l'emprise du démon: une fillette choupinou ("dis maman, tu m'achètes un cheval?") mais possédée, éructant des insanités tout en s'enfonçant un crucifix dans les parties intimes (quand ce n'est pas la tête de sa chère maman, une Ellen Burstyn qui ne semble pas revenir des "lèche-moi!" de sa fifille). L'horreur des horreurs est bien là, avec la sexualisation aussi soudaine que traumatisante d'un agneau même pas sorti de l'âge tendre, tandis que la mère semblait gênée, en début de film, de parler ne serait-ce que de ses propres amours. Le diable, encore une fois, prend le masque angélique et innocent de l'enfance pour commettre ses méfaits, défenestrant untel, glaçant définitivement un autre, dans une Amérique traumatisée par le chaos du Vietnam et à laquelle Friedkin rappelle ses peurs archaïques venues de loin.

LES REVOLTES DE L'AN 2000

Narciso Ibanez Serrador – 1976

Deux touristes anglais se retrouvent sur une île qui semble désertée. Seuls des enfants errent, ici ou là... Des Templiers morts-vivants d'Amando de Ossorio aux chroniques enfantines et hantées de L'Esprit de la ruche, le fantastique hispanique a accouché de quelques bijoux durant les 70's. Parmi eux, Les Révoltés de l'an 2000, fable racontant la revanche sanglante des gaminous envers des adultes qui, à en croire le long prologue (des images d'archives souvent insupportables, où les enfants sont montrés comme les principales victimes des grands conflits du XXe siècle), ont raison d'avoir une dent contre leurs aînés. Prenant à contrepied Un enfant peut faire chanter le monde, le tube ménager de Linda de Suza (Les enfants en ont assez de voir / Mal tourner un monde sans espoir / Ils ont décidé la fin de la violence / Et moi je leur fais confiance), le réalisateur Narciso Ibanez Serrador mixe Sa majesté des mouches (une micro-société entièrement peuplé d'enfants, singeant le pire d'une société d'adultes) et Le Village des damnés (les gamins, possédés, semblent communiquer par télépathie) dans ce cauchemar où, une fois de plus, les visages angéliques (les fillettes du rire au larme, le Schtroumpf une arme à la main) sont aussi les plus diaboliques.

LA MALEDICTION

Richard Donner - 1976

Trois ans après les aventures de Régine possédée par le démon, voici venir Damien, 5 ans, blondinet aux cheveux teints exprès pour le tournage et pour que le Mal tout sombre s'imprègne jusqu'aux racines de la tignasse. Régine, dans le long métrage de Friedkin, servait de poupée du diable, gamine prisonnière lançant des appels au secours (le help me gravé sur son ventre). Damien, lui, en fils zélé de Satan, passe à la vitesse supérieure: le Mal est inné, inexorablement appelé à grandir et à se répandre sur Terre. Les coups de sang successifs (un prêtre empalé, un photographe décapité) jaillissent avec fracas dans cette atmosphère glaciale, chape de plomb que Richard Donner orchestre avec maestria, théâtre apocalyptique lorsque Gregory Peck et son complice s'aventurent dans un cimetière qu'on croirait échappé d'une production de la Hammer. En 2006, un remake nazissime voit le jour, à peu près aussi passionnant qu'une partie de curling. L'original, hanté par l'"Ave Satani" de Jerry Goldsmith, reste une référence.

ALICE SWEET ALICE

Alfred Sole - 1976

La petite Karen est assassinée le jour de sa communion. Et si sa sœur, Alice, était la coupable ? Tourné pour trois sesterces au milieu des années 70, Alice Sweet Alice aurait rapidement pu être avalé et oublié dans le flot de l’horreur d’époque, mais s’est finalement taillé sa petite réputation culte. Vu de l’extérieur, le film ne se distingue pas tellement de ses modèles, avec son horreur familiale post-Exorciste et Malédiction, l’importance du religieux (le premier meurtre lors d’une communion, le film qui s’achève à l’église), pompant amoureusement l’apparition de la petite créature en ciré rouge (ici, jaune) de Ne vous retournez pas de Nicolas Roeg. Mais rapidement, l’étrangeté s’installe. D’abord par ce montage surexcité qui laisse surgir ce sentiment d’urgence et de Grand-Guignol, ses gueules avec ce masque inquiétant ou ce gros voisin mi-clown dégueu mi-prédateur sexuel, ou encore l’interprétation, avec le personnage de la tante qui joue chaque scène comme si elle avait son pied pris dans un piège à loup. Trouble renforcé par l’Alice du titre, gamine à la palette de jeu assez large et pour cause : l’actrice, Paula Sheppard, avait 19 ans à l’époque. Est-elle d’ailleurs bien la responsable de ces horreurs ? Imparfait, Alice Sweet Alice est la petite sœur fauchée et décoiffée des grands classiques d’alors.

DARK WATER

Hideo Nakata - 2002

Avec Ring, Hideo Nakata a posé les jalons d'une horreur du quotidien, où la télévision présente dans n'importe quel salon peut se transformer en fenêtre vers l'enfer. Dark Water suit la même tendance, où le mal se niche dans les eaux sombres, celles qui croupissent dans un évier où celle qui tombe sur la ville un jour de pluie. Le monstre n'est ni un zombie, ni un dragon: juste une fillette abandonnée, fantôme en socquettes qui ne cherche rien d'autre qu'une mère. L'horreur est une blessure, et plus encore que dans ses autres films, le moteur de Nakata dans ce Dark Water est le mélodrame. Si l'enfant-fantôme hurle dans l'ascenseur hanté, c'est pour être étreint, enfin, par sa mère d'adoption.

THE RING

Gore Verbinski - 2002

Hollywood ne pouvait pas longtemps rester insensible à l'appel des dollars venant du Japon: Ring, devenu culte en un temps record dans toute l'Asie, remaké quasi instantanément en Corée, voit surgir sa version américaine en 2002. Contrairement aux remakes singeant comme ils peuvent leur modèle nippon (The Grudge) ou à ceux qui, au contraire, se vautrent dans la MTVisation anonyme (Pulse, remake de Kaïro), The Ring bénéficie d'un vrai travail d'adaptation, peut-être la clef de sa réussite. Petite variante (anodine) avec l'original: alors que chez Nakata, la gamine-sorcière revenue se venger a fini par grandir dans son puit (voir l'apparition finale, hors de la télévision, d'une personne à taille adulte), chez Verbinski, la démone garde des traits poupons, ceux de Daveigh Chase, qui vient alors de prêter sa voix à... Lilo dans le dessin animé de Disney. L'enfant diabolique de The Ring est un passeport et ajoute un nouveau monstre au bestiaire fantastique américain: le fantôme japonais, ici voyageur, au visage caché par de sombres, sombres mèches de cheveux. Car au Japon comme ailleurs, le Mal avance toujours mieux lorsqu'il est dissimulé derrière un masque d'innocence.

JOSHUA

George Ratliff - 2007

Figure enfantine manipulatrice, trouble et perverse derrière une belle nature de cheveux, Joshua se fait voisin d'une Malédiction autour d'un gamin vivant mal l'arrivée de soeurette (le bébé le plus choupinou de la planète). Et le jeune héros de s'imaginer rejeton d'Apophis, dieu du chaos en culottes courtes, hypnotisé par les rituels de mort égyptiens et la momification, ombre et menace permanentes sur le portrait de la famille parfaite mais dont les coutures craquent de toutes parts. Le film distille son atmosphère parano de spirale infernale saisissante (dépression post-partum ou présence démoniaque?), bien dense, bien tendue, sans se disperser dans les fanfreluches gratuites du genre, et dont on garde les déraillements, cette scène où le garçon prodige, devant son piano, ajoute de sinistres fausses notes à son Mozart parfaitement appris, lissé, répété, et qui pourtant finit par déraper.

THE CHILDREN

Tom Shankland - 2008

Il y a quelques mois étaient diffusés deci-delà des spots pour Vox Angeli, une troupe d'enfants angélico-flippants qui reprenait façon Jean-Baptiste Maunier les plus grands tubes goutus de la variet' (Indochine, Patrick Bruel, Franz Schubert). The Children en est un peu l'adaptation ciné, où des Calinours amis des poneys et des licornes se transforment en créatures démoniaques gavées d'Orangina rouge et assoiffées de sang. De préférence, celui de leurs parents. Entre deux épisodes de Miss Marple, le réalisateur britannique Tom Shankland signe un film d'horreur bien anxiogène, dont l'angoisse se diffuse comme cet étrange virus qui rend les gosses fous, pellicule noyée dans les hurlements comme si on avait forcé les marmots à aller au concert de Maurane à l'Alhambra. The Children impose sa tension et son malaise lors de quelques belles scènes comme ce long plan en plongée où l'on suit Elaine remonter le chemin laissé dans la neige par le sang de papa. Parfois un peu petit-bras, pas forcément aidé par un cast adulte un cheveu fadasse ni par un montage souvent trop agressif et qui nuit à la lecture de ce qui se passe à l'écran, The Children, avec ses très joyeuses mises à mort, se range néanmoins dans la famille des films réussis et efficaces de mauvaises graines, laissant clefs et explications au vestiaire jusqu'à un assez joli dénouement.

ESTHER

Jaume Collet-Serra - 2009

Dévastée par la perte de son bébé et ne pouvant en concevoir un autre, Kate Coleman décide avec mari John, d'adopter un autre enfant, Esther, qui va se révéler bien différente de ce qu'ils espéraient. Pour lire la critique, cliquez ici .

par Nicolas Bardot

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