Le Boom du cinéma thaïlandais

Le Boom du cinéma thaïlandais

Le cinéma thaïlandais ne date pas d’hier – plus précisément, de la fin du XIXe siècle. Mais après une longue traversée du désert, la production maison connaît un véritable boom. Des cartons commerciaux à l’émergence de multiples auteurs, jusqu'à la consécration de la Palme d'or accordée à Apichatpong Weerasethakul, coup d’œil sur une renaissance thaï.

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LA THAÏLANDE, TAILLE MONDIALE

1977 : une lourde taxe pèse sur la tête des films importés en Thaïlande, faisant ainsi le bonheur des productions locales qui se taillent la part du lion sur le marché. Mais l’effervescence tourne court et, dès 1981, Hollywood commence à renvoyer des films, participant, comme l’essor de la télévision, à détourner le public des films thaïlandais (et il faut dire que la boulimie de productions pour profiter du terrain laissé libre a souvent été synonyme de navets conçus à la va-vite). En 1978, 150 films thaïlandais sont produits. Au milieu des années 90, une dizaine par an. La relève ne semble pas décidée à arriver. En 1997, la Thaïlande est prise dans la tempête de la crise économique asiatique. C’est le moment que choisissent trois jeunes réalisateurs issus de la publicité pour se retrousser les manches et redonner au cinéma local ses couleurs d’antan. Leurs noms : Nonzee Nimibutr, Pen-ek Ratanaruang et Wisit Sasanatieng. Pen-ek Ratanaruang, réalisateur plus tard de Monrak Transistor et Last Life in the Universe, est l’exemple parfait de ce renouveau : gamin de Bangkok, il a étudié huit ans aux Etats-Unis et aiguisé ses armes à l’école de la pub avant de se lancer dans le cinéma. Son Fun Bar Karaoke est un succès d’estime en salles mais sa présentation au Festival de Berlin permet au cinéma thaïlandais de faire son retour sur la scène internationale, après des années de disette. Au même moment, Nimibutr signe un carton surprise avec le polar Dang Bireley and the Young Gangsters dont l’efficacité et la modernité tiennent beaucoup de l’influence de la publicité, berceau de son réalisateur. Ce dernier double la mise avec le film de fantômes Nang Nak, triomphe scénarisé par Sasanatieng qui aura lui aussi son heure de gloire avec Les Larmes du tigre noir, un western hommage aux productions kitsch des années 60, et qui se fraye un chemin jusqu’à Cannes. La recette paraît simple sur le papier : à l’image du voisin coréen, on ménage chèvre et chou avec un cinéma commercial soigné qui tient la main d’un cinéma d’auteur accessible.

Thrillers, films historiques, films d’horreur, comédies musicales : la production se diversifie énormément et le savoir-faire s’exerce d’un genre à l’autre. Le public thaïlandais répond présent. Mais à l’international, c’est du côté de l’avant-garde que les regards se tournent. Comme Ratanaruang, Apichatpong Weerasethakul a passé quelques années à étudier le cinéma aux Etats-Unis. De retour en Thaïlande, il signe notamment Blissfully Yours, qui sera distingué à Cannes dans la section Un Certain Regard, en 2002. Tropical Malady enfonce le clou en étant le premier film thaïlandais à être primé au sein de la compétition officielle. Si ces films ne connaissent guère d’écho en Thaïlande, ce sont des réalisateurs comme Ratanaruang ou Weerasethakul qui permettent de remettre leur pays sur la carte mondiale du septième art. Nouvel exemple avec Aditya Assarat, réalisateur de Wonderful Town qui, lui aussi, a étudié le cinéma aux Etats-Unis avant de signer un premier film qui a collectionné les lauriers dans les festivals internationaux. L’ambition des auteurs contamine le cinéma commercial qui commence, lui aussi, à avoir des visées hors de ses frontières.

Le pari est alors assez osé, car la cinématographie thaïlandaise reste une des plus méconnues d’Asie, très attachée depuis toujours au marché et à la culture locale, rendant l’exportation un peu délicate. Outre les tentatives de spécialités peut-être trop radicales comme Satreelex (comédie et carton sur une équipe de volley composée de gays et de travestis), la percée a été entamée par le cinéma d’action et le cinéma d’horreur. Ong-Bak en est un bel exemple et a mené une solide carrière hors de ses frontières. Les frères Pang, originaires de Hong-Kong mais oeuvrant en Thaïlande, se taillent une réputation mondiale en signant Bangkok Dangerous ou The Eye. Ce dernier montre qu’Hollywood jette également un œil sur cette production et cette créativité en pleine euphorie, puisqu’elle lance son remake. Même chose avec Shutter, film d’horreur efficace qui possède désormais son petit frère américain. Bangkok a son Festival International du Film. Les salles, elles, se gorgent de productions locales : plus de 60%, menant ainsi la vie dure au cinéma américain. Les programmes réclamés d’aide au cinéma national sont en train d’être mis en place. Et même si la situation n’est pas idyllique (une censure très forte, un cinéma d’auteur parfois condamné à ne sortir qu’à l’étranger), la Thaïlande semble bien traverser un nouvel âge d’or.

par Nicolas Bardot

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