Despérado

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Une légende urbaine relate l’existence d’un mystérieux Mexicain, accompagné d’un étui à guitare bourré d’armes, en croisade contre les trafiquants de drogue. Son désir de vengeance n’a d’égal que son talent de mariachi, et son sex-appeal…

LET’S PLAY

Décomplexé et explosif, Desperado est tout autant la suite que le remake d’El Mariachi, réalisé deux ans plus tôt. Sauf que le casting amateur de ce dernier, nourri de visages patibulaires et inconnus, fait désormais place au fiévreux couple latino Hayek-Banderas. Une valeur ajoutée qui a méchamment de la classe. Quand le film sort sur les écrans en 1995, les deux artistes sont quasi-inconnus du grand public*, et personne ne fait encore éloge de leur beauté plastique ou de leur charme cuivré. Une fraîcheur inédite et inespérée donc, qui apporte une touche de glamour d’habitude si étrangère au western d’action. Ajoutez à cela un jeune metteur en scène couillu et prodigue, et vous obtenez l’une des plus jouissives séries B, cartoonesques et dégrippées de ces dernières années. Libéré de son statut d’amateur, Rodriguez se permet de jolies audaces visuelles, pleines de couleurs et d’excentricité, et étale franchement – au risque d’agacer, tout comme son pote Tarantino – toute sa culture et ses références. On aurait tort de le croire noyé au beau milieu des renvois à Leone, Woo et Peckinpah, tant le réalisateur mexicain surnage très vite, et avec une aisance évidente, dans cet univers paternel. Grâce à une fraîcheur et une sincérité salutaires, il n’imite ni ne parodie jamais ses modèles, tentant même constamment de booster ses plans d’idées majorées. Maîtrisant parfaitement l’espace - de son utilisation dans l’action jusqu’à son morcellement au montage - il livre une petite demi-douzaine de séquences de feu, où rythme, musique, déflagrations et poussière se confondent en un tout endiablé.

MY GUITAR

Antonio Banderas dansant sur un comptoir, au rythme des pistoleros, un balai de feintes instinctivement chorégraphié; Salma Hayek chantonnant les yeux fermés, couvrant de sa douce voix les pas d’assaillants armés jusqu’aux dents; autant de moments bénis d’une fraîcheur opportune et d’une candeur adolescente. Rodriguez s’applique à créer sa propre mythologie du héros sans nom (en référence au personnage d’Eastwood dans Le Bon, la brute et le truand), et y parvient grâce au charme de son interprète principal, nouvelle figure héroïque séduisante et incontestable. Contrairement aux autres films d’action testostéronés et sévèrement burnés, la figure du Mariachi, sexy et cool, a de l’éclat et du panache. Comme pour Le 13ème Guerrier quelques temps plus tard, Banderas apporte à son personnage une grâce dans les mouvements, une féminité dans l’expression et une sensualité dans le regard - dans les cascades comme dans les scènes de comédie - qui lui confèrent une aura singulière. Plus qu’un véhicule à la reconnaissance pour Rodriguez, à la célébrité pour Banderas et Hayek, Desperado est ce que l’on peut faire de mieux en matière de série B d’action fauchée et débrouillarde. Bien sûr, le film est superficiellement écrit (les répliques sont épargnées, avec notamment les excellents monologues de Buscemi et Tarantino), et l'intrigue prétexte à l’action fougueuse. Rodriguez confie la narration de son film au défilement des images et aux magnifiques morceaux de Los Lobos. Une excellente initiative.

par Yannick Vély

En savoir plus

* Si Salma Hayek est encore inconnue, Banderas est déjà apparu chez Almodovar (Femmes au bord de la crise de nerf et Attache-moi!), avant d’être aperçu dans deux films indépendants américains de qualité (Entretien avec un vampire et Philadelphia). Comme Une Nuit en enfer pour George Clooney (qui endossera par la suite la tenue de Batman), Desperado est pour Banderas la preuve apportée aux producteurs hollywoodiens qu’il peut faire bonne figure dans les films d’action. Suivront donc Assassins de Richard Donner, Le Masque de Zorro de Martin Campbell ou Le 13ème Guerrier de John McTiernan.

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