Captive aux yeux clairs (La)

Captive aux yeux clairs (La)
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En 1832, deux jeunes trappeurs, Jim Deakins et Boone Caudill, rejoignent l’expédition d’un capitaine français. Le bateau "Mandan" doit remonter le fleuve Missouri, en direction du Montana, territoire des Indiens Pieds-noirs. Les échanges commerciaux avec les Indiens doivent être facilités par la présence à bord de Teal Eye, une princesse indienne...

La Captive aux yeux clairs est l’adaptation cinématographique d’un roman d’un écrivain peu traduit en France, Alfred Bertram Guthrie, Jr (1901-1991). Ecrit en 1947, The Big Sky n’a jamais été traduit en français. Il est vrai qu’il serait extrêmement hasardeux de traduire cette langue de l’Amérique des pionniers, sans lui en enlever toute la couleur. Le personnage principal du livre est Boone Caudill, un jeune homme fruste qui s’est enfui à dix-sept ans de chez lui pour échapper à son père violent. Ses aventures se déroulent de 1830 à 1843 (année de ses trente ans). Le livre est assez sombre, Caudill s’avère un être destructeur, incapable de s’adapter, ni à la vie des hommes blancs, ni à celle des Indiens. Il ruinera la vie des rares personnes qui l’aiment, sa femme Teal Eye, et Jim Deakins, qu’il tuera en croyant être trompé.

Le film contraste avec la noirceur du roman. Il ne reprend que l’expédition des trappeurs sur le Missouri, qui ne faisait qu’une centaine de pages, et en change le dénouement. Alors que les trappeurs réussissent à atteindre leur objectif et à marchander avec les Indiens dans le long-métrage, toute l’expédition se fait massacrer en cours de route dans le roman, hormis Teal Eye (âgée alors de treize ans), Caudill, Deakins et un aventurier nommé Dick Summers, qui arrivent à s’enfuir séparément. Caudill retrouvera Teal Eye des années plus tard et l’épousera. Le scénariste a également eu l’idée de fusionner deux personnages du livre en un seul, l’oncle de Caudill, Zeb Calloway, et Dick Summers. Tout ce que fait Calloway dans le film de Hawks revient à Summers, dans le livre. Arthur Hunnicutt est mémorable en trappeur aguerri, en "old-timer" qui guide l’expédition et apprend la vie sauvage à Caudill et Deakins, plus jeunes et moins expérimentés.

A l’origine, Howard Hawks désirait confier le rôle de Jim Deakins à Robert Mitchum, et celui de Boone Caudill à Marlon Brando. Il a dû se rabattre sur des acteurs moins chers et moins connus à l’époque. L’un ne le restât pas longtemps, l’autre le demeurât. Mis à part que le trappeur est roux dans le roman, Kirk Douglas compose un fantastique Deakins, sa personnalité enjouée et charmeuse correspond davantage au rôle que celle de Mitchum, plus intériorisée. Pour l'anecdote, Douglas et Mitchum seront réunis en 1967 par le cinéaste Andrew Mc Laglen dans une autre adaptation d’un livre de Guthrie, The Way West. Douglas interprétera le hargneux sénateur Tadlock, tandis que Mitchum sera… Dick Summers! Pour en revenir à La Captive aux yeux clairs, Dewey Martin se rapproche assez du Caudill de l’écrivain par son côté mal dégrossi et taciturne. Bien qu’ayant tourné quelques films avec Hawks (La Chose d’un autre monde (1951), La Terre des Pharaons (1955)), sa carrière restera très confidentielle. Quant à la belle Elizabeth Threatt, un ancien mannequin qui interprète Teal Eye, que l’on ne voit qu’adulte dans le film, elle ne jouera que ce rôle et l’on ne sait ce qu’elle devint ensuite…

Hawks n’était pas satisfait de son film, il en déplorait les coupures de scènes intimistes (quatorze minutes environ) dans le but de permettre des séances supplémentaires dans les cinémas. De plus, il estimait n’avoir pas mis assez en évidence la rivalité amoureuse éprouvée par Caudill et Deakins concernant Teal Eye. Kirk Douglas a raconté qu’en fait, l’opposition existait, hors champ, entre lui et Martin au sujet d’Elisabeth Threatt, mais, contrairement au film, en faveur de Douglas! Le film, à l’époque, n’a pas rencontré un grand succès. Peut-être est-ce son côté atypique qui a déplu. Son sujet ne concerne pas la lutte contre les Indiens, mais la recherche de rapports pacifiques entre les peuples. Pour les trappeurs en expédition, le danger ne vient pas des Pieds-noirs, mais d’autres Blancs, à la solde de la société qui détient le monopole des peaux. En France, le film est sorti dans sa version tronquée. Il a fallu attendre un superbe coffret de DVD zone 2 aux éditions Montparnasse pour enfin voir la version voulue par Hawks. Le principe même de la version française n’est pas très plaisant pour ce film, sachant que les trappeurs côtoient des aventuriers français. Les dialogues qui marchent sur la difficile compréhension entre les Américains et les Français ont été changés, dans la V.F, par des phrases anodines. Toutefois, écouter la V.F, c’est entendre la voix fantastique de Roger Rudel, qui a doublé Kirk Douglas pendant plus de quarante ans! Un jour, Douglas a rencontré Rudel et lui a dit: "Vous avez les mêmes tripes que moi."; c’est sûrement vrai.

par Yannick Vély

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