A l'occasion de la sortie de Meurs un autre jour, le responsable du Fan-Club Français James Bond, Laurent Perriot, avait accepté de répondre à nos questions au milieu de son emploi du temps de ministre, nous dévoilant un peu plus l'univers du célèbre agent secret, de son dernier opus et de ses fans.


FilmDeCulte - George Lazenby est fréquemment cité par les fans purs et durs comme le meilleur James Bond, le plus proche du héros littéraire, pouvez vous confirmer cela et nous dire pourquoi?

Laurent Perriot - Non, ce n'est pas George Lazenby, mais le film en lui-même. Au service secret de sa majesté est effectivement considéré par les fans et la plupart des gens comme le film le plus proche des livres de Ian Fleming, mais ça ne tient en aucun cas à Lazenby. C'est surtout dû à la mise en scène du film et au fait que ce soit une adaptation assez fidèle du roman. Ca aurait pu être Sean Connery à la place de Lazenby, ça n'aurait rien changé à la qualité du film… enfin, si, cela aurait peut-être été mieux... En fait c'est un film assez à part dans la série.


FilmDeCulte - Que pensent les fans de la série des parodies existantes?

Laurent Perriot – Vous parlez de xXx et les Austin Powers?


FilmDeCulte - Oui, entre autres...

Laurent Perriot – Personnellement j'ai trouvé xXx plutôt sympa. Vous en avez pensé quoi vous?


FilmDeCulte - J'ai beaucoup aimé...

Laurent Perriot – Oui… Mais il ne suffit pas d'avoir le crâne rasé, des gros muscles et un marcel pour prétendre égaler Bond. Il y a certes des références, mais ce n'est pas un univers de James Bond. C'est beaucoup plus vulgaire, moins classe. On verra dans 40 ans si xXx est toujours là.


FilmDeCulte - Et Austin Powers?

Laurent Perriot – Les Austin Powers tirent plus leur source dans Casino Royale au niveau du délire. C'est assez drôle comme films. Là aussi, il y a de nombreuses références aux James Bond, qui sont plus des clins d'œil en fait. Mais bon, quand même, c'est un humour très "pipi caca", à prendre au premier degré, surtout comparé à James Bond, dont l'humour reste subtil et très second degré. Mais bon, ceci n'engage que moi.


FilmDeCulte - Jamais plus jamais est à l’origine un film à part, produit par une autre maison de production, et ne comportant pas la célèbre musique ou le générique. Est-il pour autant considéré comme un James Bond à part entière par les fans?

Laurent Perriot – Ce qui fait de Jamais plus jamais un James Bond, c'est le fait que ce soit un remake d'Opération Tonnerre et que l'on retrouve Sean Connery dans ce même rôle 17 ans après. Voir un Bond à la retraite reprendre du service, c'est assez grand pour les fans. Mais c'est le seul intérêt. Il faut reconnaître qu'il est moins bon que l'original et puis il a moins bien marché qu'Octopussy, le Bond avec Roger Moore sorti la même année. Pour la musique et le générique, il est vrai que cela fait partie de ces éléments qui constituent l'univers James Bond et, de ce côté là, Jamais plus jamais se pose juste comme un remake.


FilmDeCulte - Et Casino Royale? Comment est-il perçu par les fans?

Laurent Perriot – Là aussi, c'est un film à part. Comme je le disais tout à l'heure, c'est plus un précurseur des Austin Powers qu'autre chose. C'est assez rigolo comme film.


FilmDeCulte - Et David Niven? Il était à l’origine prévu par l’auteur pour jouer le rôle dans la série...

Laurent Perriot – Ca, c'est délicieux pour les fans… cette référence au choix d'origine de Fleming. Et puis, il est drôle tout en ayant la classe.

FilmDeCulte - Avez vous vu le téléfilm Casino royale diffusé dans les années 50?

Laurent Perriot – Oui, il est d'ailleurs disponible en VHS et DVD.


FilmDeCulte - A t-il un rapport, même lointain, avec le film de John Huston?

Laurent Perriot – Il y a un rapport, évidemment. Ils sont tous les deux tirés du même roman et ont tous les deux une scène dans un casino, avec le même méchant: le chiffre. Mais le rapport s'arrête là en fait. Le téléfilm est beaucoup plus fidèle au livre, même si James Bond est transformé en agent américain, il colle plus à l'esprit Bond. Le film, de son côté, est plus loufoque et fantaisiste.


FilmDeCulte - Comment le marketing s'est-il imposé dans les films?

Laurent Perriot – Le marketing n'est pas nouveau dans les James Bond et dans les films en général. Certes, dans une moindre mesure, mais il était déjà présent dans les années 60. Il n'y a qu'à prendre l'exemple de l'Aston Martin, qui est apparue dans Goldfinger. Encore aujourd'hui, quand on demande aux gens quelle est la voiture de James Bond, tout le monde répond l'Aston Martin, et ça leur a fait un sacré coup de pub. Dans les années 70, avec Roger Moore et en particulier Moonraker, le placement de produits est devenu beaucoup plus important. Les films coûtent de plus en plus cher et les producteurs ne vont pas refuser que des grandes marques leur proposent des contrats, tout en faisant un tri bien sûr…

Personnellement, ça ne me gène absolument pas, du moment que la présence est discrète et que la marque reste dans l'esprit James Bond, en conservant la classe et le glamour du personnage. Que Bond porte une grosse montre Omega très chère ou qu'il ait le dernier Nokia à écran couleur qui prend des photos numériques, ça colle tout à fait à son image et ce n'est absolument pas gênant. Le danger serait que le produit prenne le pas sur l'image. Si on se mettait à faire boire à James Bond du vulgaire coca light au lieu de son habituelle vodka-martini, ou qu'on lui mettait un gros flingue qui ressemble à un jouet Fisher Price entre les mains pour des simples raisons de marketing, ce serait catastrophique. Heureusement, les producteurs ont été assez doués de ce côté là et ont toujours fait de bons choix.


FilmDeCulte - Ce qui est intéressant, c'est que les marques sont présentes dans les films, mais qu'elles se servent également de l'image de James Bond dans leurs campagnes publicitaires. Surtout quand un nouveau James Bond sort. Par exemple, les pubs Omega justement, où l'on voit souvent Pierce Brosnan.

Laurent Perriot – Oui, c'est très vrai. Ceci dit, pour Omega, c'est assez à part quand même, car Brosnan a un double contrat avec eux.


FilmDeCulte - Ah bon? C'est à dire?

Laurent Perriot – Il a à la fois un contrat en tant que James Bond, mais également un contrat en tant que Pierce Brosnan, comme pourrait l'avoir tout autre acteur. Quand un Bond sort au cinéma, les montres Omega deviennent "les montres que porte James Bond", mais en temps normal les Omega sont "les montres que porte Pierce Brosnan".


FilmDeCulte - Que pensez-vous de l’évolution très blockbuster de la série?

Laurent Perriot – C'est une évolution tout à fait logique. Pendant très longtemps, les James Bond ont été des films tout à fait novateurs et en avance. Ils ont marqué une rupture avec les films d'espions de l'époque, qui étaient en noir et blanc et pas très "ludiques". En utilisant le technicolor, des gadgets, un humour très second degré et les personnages des girls, les Bond ont inventé un nouveau genre de film d'espionnage. Puis ils ont été copiés et imités sans pour autant être égalés. Mais avec des films comme L'Arme fatale et autres du même genre, la concurrence est devenue rude, surtout aux USA. Car à l'époque de Moore, et surtout celle de Dalton, les films marchaient plutôt bien en Europe, mais s'exportaient assez mal. Il a donc fallu s'adapter. Maintenant, les Bond avec Brosnan sont de véritables blockbusters et ils marchent très bien aux USA. Brosnan s'exporte très bien, les Américains l'aiment beaucoup.


FilmDeCulte - En fait, on peut dire qu'il y a eu une sorte de retour de manivelle. Car les premiers Bond ont été les premiers vrais blockbusters, et ils se sont un peu retrouvés pris au piège de leur succès.

Laurent Perriot – Tout à fait, C'est exactement ce que je disais. A l'époque de Moore et de Dalton, les Bond se sont fait rattraper voir même dépasser… D'où cette évolution.


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