Les 15 pitchs les plus improbables de la Berlinale 2014

Les 15 pitchs les plus improbables de la Berlinale 2014

Plusieurs centaines de films de tous formats, une multitude de sections parallèles consacrées entre autres à l’art vidéo, aux films sur la cuisine ou aux programmes pour enfants... Par-delà une compétition parfois un peu terne, la Berlinale possède un éclectisme et un goût de la diversité qui en font un festival généreux en trouvailles et découvertes parfois fort singulières. Pitchs improbables, casting décalés ou traitement hors-normes, voici quelques films parmi ceux que Berlin 2014 nous propose de plus dingos. Rendez-vous avec des vampires néo-zélandais, un renne parlant, un match de foot roumain et un épisode de Master Chef présenté par Michelle Yeoh.

  • Les 15 pitchs les plus improbables de la Berlinale 2014
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20,000 DAYS ON EARTH, de Iain Forsyth et Jane Pollard (Panorama)
Une journée dans la vie d’une star jouant son propre rôle, ça vous dit ? 20.000 Days on Earth filme le 20 000e jour dans la vie de Nick Cave, que l’on suit du moment où sonne son réveil jusqu’à une promenade nocturne après un concert. Mélange de fiction (toute la narration est écrit par Cave lui-même) et de réalité (extraits d’enregistrements en studios), l’artiste se met en scène et se laisse mettre en scène avec des intervenants inattendus : archiviste, thérapeute ou même Kylie Minogue. On veut maintenant voir ce concept décliné à plein de chanteurs indignes (on suggère Bitney Spears pour un éventuel prochain volet).

52 TUESDAYS, de Sophie Hyde (Generation)
La chirurgie de réattribution sexuelle… vue à hauteur d’enfants. Billie est encore une ado, ses parents sont séparés et sa mère décide un jour de franchir le cap de l’opération pour enfin devenir l’homme qu’elle sait être intérieurement. Désormais prénommée James, celle-ci doit retrouver sa vraie identité sans pour autant abandonner son rôle de mère auprès de Billie. Un thème choc pourtant traité comme un événement non-traumatique dans cette chronique adolescente australienne. Présenté dans la section des films pour ados et enfants (qui ne sont donc pas pris pour des cons, bravo), ce premier film de fiction d’une documentariste a été tourné en l’espace d’un an, au fil du processus de changement de sexe de son personnage.

A CHRISTMOOSE STORY, de Lourens Blok (Generation)
Le jeune Max entend un grand bruit dans la grange au fond du jardin : un renne s’y est égaré. Il sympathise avec l’animal et demande à sa mère (Jelka Van Houten – la sœur de Carice) de pouvoir le garder. Petit détail, il s’agit d’un renne du père noël. Qui vole. Et qui parle. Et pendant ce temps-là, la Père Noel tente tout simplement de s’échapper de l’hôpital psychiatrique où il est interné, et un voisin chafouin de Max se met en tête de massacrer le renne. On aimerait presque que ce pitch loufoque pour enfants, en provenance des Pays-bas, soit en réalité celui du film de Rachid Bouchareb en compétition.

A DREAM OF IRON, de Kelvin Kyung Kun Park (Forum)
Chaque phrase de ce pitch vient complexifier et rendre encore plus flou (et fou) de ce qui pourrait bien être l’un des documentaires les plus singuliers de cette sélection. Une histoire d’amour prend fin alors qu’une femme se met en quête d’un dieu shamanique. Sur ce point de départ, le réalisateur part lui aussi à la recherche de la présence d’un ou plusieurs nouveaux dieu(x). Il en trouve des traces à différents niveaux : parmi les baleines ou dans des aciéries, soit parmi des êtres ou des machines gigantesques et sublimes, face auxquelles l’homme devient insignifiant, amoindri dans son identité. A Dream of Iron s’annonce comme une œuvre complexe et ambitieuse, mettant côte à côte hélices, mysticisme et créatures marines, sur une musique mélangeant Mahler et chants chamaniques. Rien que ça.

THE DOG, de Frank Keraudren, Allison Berg (Panorama)
Dix ans ont été nécessaires pour monter ce documentaire américain sur John Wojtowicz, quidam au patronyme inconnu mais à la destinée pourtant pas banale. Petit bourgeois conservateur devenu militant gay à la suite de sa rencontre avec un transsexuel dont il tombe amoureux, Wojtowicz (« le chien » comme il se surnommait lui-même) fait parler de lui en tentant de dévaliser une banque à Brooklyn en 1972, dans le but de pouvoir payer l’opération de changement de sexe de son partenaire. Le fait divers avait déjà inspiré Dog Day Afternoon de Sydney Lumet, mais ce nouveau portrait se base sur des témoignages de ses contemporains pour rendre justice à la personnalité particulièrement complexe de son anti-héros : bizarre, névrosé, sentimental, autodestructeur, obsédé sexuel, attachant, violent, idéaliste, manipulateur, imprévisible, drôle, passionnant. Un chien ? Humain après tout.

L’ENLEVEMENT DE MICHEL HOUELLEBECQ, de Guillaume Nicloux (Forum)
En septembre 2011, alors qu’il était en tournée promotionnelle pour son roman La Carte et le Territoire, Michel Houellebecq a soudain complètement disparu de la circulation. Al-Qaïda ? Extraterrestres ? Guillaume Nicloux montre aujourd’hui la vérité sur cet enlèvement : l’auteur s’était tout simplement fait kidnapper par trois gaillards abrutis, gym-queens aux coiffures improbables, qui cherchaientnt juste à le protéger de son quotidien stressant, tout en songeant tout de même à demander une rançon à François Hollande. Houellebecq, qui joue ici son propre rôle semble très bien s’accommoder de cette retraite forcée à la campagne, entre toutous à caresser, saucisses fumées et carcasses de voitures. On espère maintenant le même film avec Mary Higgins Clark.

FINAL RECIPE, de Gina Kim (Culinary Cinema)
Après les films adaptés de séries télé, voici les films adaptés d’émissions de télé réalité. En prenant comme prétexte le parcours initiatique du jeune Hao souhaitant devenir chef comme son grand-père, Finale Recipe place en réalité son film à l’intérieur de la version coréenne de l’émission Master Chef, avec la grande Michelle Yeoh (toujours dans les bons plans) dans le rôle de Carole Rousseau. La bande-annonce montre plus d’images de plats cuisinés que de visages humains, et ressemble plus aux bande annonces télévisées du programme qu’à du cinéma. Le fait que ce long-métrage soit signée Gina Kim, auteur de l’excellent film indé américain Never Forever il y a sept ans (et perdue de vue depuis) vient rendre encore plus zinzin ce projet Kamoulox. A quand Michelle Yeoh dans une adaptation de Super Nanny, s’il vous plait ?

THE GALAPAGOS AFFAIR : SATAN CAME TO EDEN, de Dan Geller et Dayna Goldfine (Berlinale Special)
1929 : Friedrich Ritter, admirateur bougon de Nietzsche, et sa comapgne Dora décident de se retirer du monde moderne en emménageant sur un îlot désert et hostile de l’archipel des Galapagos. Ils sont malgré eux bientôt rejoints par quelques autres émigrés allemands, dont une baronne haute en couleur bien décidée à construire un hôtel pour milliardaires. Un jour, cette dernière disparait dans la jungle, et son corps n’est jamais retrouvé. Documentaire ? Film noir ? Les deux ! Mélange aussi inédit que fascinant, The Galapagos affair est une sorte de docu-polar chez les Robins Suisses, à la fois exotique et plein de mystère. Les deux réalisateurs ne filment rien d’autre que des images d’archives, mais collent dessus les monologues intérieurs des personnes impliquées, à travers un casting vocal allant de Cate Blanchett à Diane Kruger. Peut-être le format le plus inédit de l’année.

KUMIKO, TREASURE HUNTER, de David Zellner (Forum)
Y a-t-il plus éclectique que la filmographie de Rinko Kikuchi, qui passe ces dernières années de l’ovni sous crack The Warped Forest à Pacific Rim puis à ce film indépendant américain où elle joue tout naturellement… une chasseuse de trésor ? Dans son appartement étouffant de Tokyo, Kumiko regarde pour l’énième fois un film classique américain où les protagonistes enterrent un trésor dans un coin du Dakota. Ni une ni deux, elle croit dur comme fer que ce trésor existe et qu’il sera le sien, et la voilà déjà partie pour le Dakota en plein hiver. Cette fable sur le pouvoir et les dangers de l’imagination fait déjà partie des buzz les plus prometteurs de Sundance.

THE MIDNIGHT AFTER, de Fruit Chan (Panorama)
Un groupe de passagers voyagent tranquillement dans un minibus de nuit sillonnant Hong-Kong. Mais alors que le bus sort d’un tunnel, ils s’aperçoivent que tout a brusquement changé. Plus aucun bruit, les rues et les bâtiments sont déserts, comme si toute la population sauf eux s’était évaporée d’un seul coup… L’astucieux Fruit Chan poursuit ici son approche ludique du fantastique et de l’horreur en adaptant ici un best-seller local. Les fans de Stephen King auront tout de suite pensé à l’avion abandonné des Langoliers (et sa pénible adaptation télé) ; entendra-t-on ici aussi le bruit lointain et menaçant des Rice Krispies ?

MPG MISSIONEN (The Contest), de Martin Miehe-Renard (Generation)
Le jeune Karl est contraint de quitter sa campagne natale pour aller vivre à Copenhague. Son accent et ses manières de provincial en font un souffre-douleur dans son école. Sa seule amie devient Sawsan, une jeune émigrée turque qui va l’entrainer dans son rêve le plus fou : participer à l’Eurovision ! MPG, ce sont les initiales du Melodi Grand Prix, que les eurofans connaissent comme étant la luxueuse présélection danoise du concours. Les paillettes de la scène de l’Eurovision comme facteur d’épanouissement personnel d’un garçonnet timide… à la Berlinale, même les films pour enfants sont décidemment plus progressistes qu’ailleurs.

NUOC (2030), de Nguyen-Vo Nghiem-Minh (Panorama)
En 2030, le dérèglement climatique a définitivement détruit les terres arables, avec pour conséquence que la plupart des récoltes se font désormais intégralement sous la surface de la mer. Sao et son mari refusent de quitter la terre ferme et sa maison, d’autant plus que les multinationales monopolisent l’eau à l’aide de fermes flottantes sur laquelle sont créés de nouveaux types de légumes. Lorsque son mari est tué, Sao accepte un emploi dans l’une de ses usines flottantes afin d’y retrouver l’assassin. Elle y fera surtout des découvertes scientifiques surprenantes… si ce mélange de thriller atmosphérique et de romance post-apocalyptique n’était pas assez surprenant pour vous, sachez qu’il s’agit d’un film… 100% vietnamien.

THE SECOND GAME, de Corneliu Porumboiu (Forum)
Et si on regardait un match de foot roumain dans son intégralité sur grand écran ? En commentant avec son père un match des années 80 entre deux équipe locales, le réalisateur de Policier, adjectif offre ici une œuvre au concept faussement simple. Car le match en question n’est pas banal, il a eu lieu sous une épaisse chute de neige rendant le jeu difficile et les joueurs nerveux, tension qui reflète en filigrane la révolution et la chute de Ceausescu alors très imminente. Et surtout c’est un match que Porumboiu père a lui-même arbitré à l’époque, devenant ainsi l’acteur et le témoin privilégié d’une révolte populaire sur le point de naître. Son commentaire en voix off se fait alors témoignage sur les enjeux à la fois triviaux et profonds de cette partie.

VULVA 3.0, de Claudia Richarz et Ulrike Zimmermann (Panorama)
La vulve sous toutes ses coutures, sans vulgarité ni provocation. A l’heure de l’hyper-sexualisation permanente des femmes et des jeunes filles, ce documentaire allemand ambitieux vient remettre les pendules à l’heure en montrant la réalité de l’organe génital féminin. Toutes les réalités. Chirurgie esthétique, pornographie, excision, éducation sexuelle… les angles d’analyse des relations des femmes avec leur propre corps sont nombreux dans ce film qui ne se veut pas un documentaire à charge mais au contraire une célébration de la diversité biologique féminine.

WHAT WE DO IN THE SHADOWS, de Jemaine Clement et Taika Waititi, (Generation)
Le duo comique néozélandais Flight of the Conchords mélange ici comédie et technique documentaire avec le vrai/faux portrait d’une famille de vampires. Viago (379 ans), Deacon (183 ans), Vladislav (862 ans) et Peter (8000 ans) cohabitent joyeusement dans une grande demeure baroque de Wellington. Le jour, ils vivent un quotidien trivial, se disputant pour savoir qui va faire la vaisselle, mais le soir venu, leur vraie nature reprend le dessus. La caméra les suit en train de faire la tournée des clubs, se disputant avec les loups garous et renouvelant leurs stocks de jeunes vierges avides de plaisir et d’immortalité.

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par Gregory Coutaut

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