Festival de Gérardmer: Le Cinéma de Clive Barker

Festival de Gérardmer: Le Cinéma de Clive Barker

Hellraiser sera ce soir à l'honneur au Festival de Gérardmer à travers une nuit spéciale où seront projetés les trois premiers épisodes de la saga inspirée par Clive Barker. Artiste encore plus protéiforme qu’on ne le croit (romancier, scénariste de bande dessinée, metteur en scène de cinéma et théâtre, l’homme se dit avant tout passionné par la peinture), il a imposé depuis la fin des années 80 une imagerie immédiatement reconnaissable où interdit, souffrance et romantisme se bousculent dans un maelström de chair et de sang. Stephen King lui-même le qualifia à l’époque de « futur de l’horreur » , mais une horreur cependant toujours encrée dans des traditions bien connues des amateurs du genre. C’est toute la force des travaux de Barker, cette réappropriation des mythes juxtaposée à des thèmes beaucoup plus modernes comme le sadomasochisme ou le fétichisme. Retour en 5 films sur l'univers de Clive Barker...

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THE FORBIDDEN (1978)

The Forbidden est un court-métrage de jeunesse de Barker dont le coté expérimental a quand même pris un sérieux coup de vieux. Les fans hardcore y trouveront l’effleurement de certaines thématiques que Barker trimbalera tout au long de sa carrière et le nom de certains collaborateurs comme Doug Bradley, ou le futur scénariste Peter Adkins qui lui resteront fidèles.

HELLRAISER, LE PACTE (1987)

Le film séminal de l’univers barkerien: le grand Hellraiser. Peu de long-métrages représentent à ce point l’interdit que celui-ci, déjà dans son sujet, celui d’une boite mystérieuse ouvrant à celui qui l’utilise un enfer de jouissance et de souffrance, et bien sûr aussi dans l’aura qu’il dégageait à l’époque, avec son imagerie SM et son traitement « adulte ». Déçu par deux premieres adaptations de ses écrits commises par George Pavlou (Transmutations et Rawhead Rex), Barker livre un film en reaction totale à l’horreur de l’époque, qu’il juge aseptisée et infantile. Le film rayonne encore aujourd’hui tel un diamant noir dans le genre et n’a rien perdu de sa puissance. Julia, la terrible belle mère, et son amant écorché vif Oncle Franck caractérisent une cellule familiale qui au lieu d’être un havre de paix représente un danger que seuls les cenobites semblent pouvoir surpasser. 25 ans plus tard, les effets speciaux de Bob Keen sur le corps en recomposition de Franck tiennent encore du miracle et Christopher Young y livre ce qui est certainement l’une des meilleures bandes originales du genre. Mais au-delà de l’addition de tous ces talents, Hellraiser reste avant tout le film qui representera thématiquement et visuellement à jamais l'univers de Clive Barker dans l'imaginaire du public. Un film d’auteur ? A plus d’un titre !

HELLRAISER 2, LES ÉCORCHÉS (1988)

Engagé sur l'ecriture de son roman Secret Show, Clive Barker ne rempile pas un an plus tard à la réalisation de cette inévitable suite (se contentant de produire et d'en livrer le sujet) et cède sa place au Californien Tony Randel, poulain de l'écurie Corman/NewWorld ayant bossé sur la post-production du premier film. Un film de surenchère, doté d'un budget largement supérieur à son modele et dont les motivations ne sont (pratiquement) que commerciales. Les Cénobites deviennent des personnages beaucoup plus centraux du récit et on peut reprocher à Hellraiser 2 d'être beaucoup trop explicatif, perdant l'essentiel du mystère qui faisait la force de l'original. Toutefois baigné dans sa deuxieme moitié dans une atmosphère rappelant les délires oniriques et hong-kongais de films comme Zu, les guerriers de la montagne magique ou Histoire de fantômes chinois, cette séquelle a le mérite d'avoir été avec le Jack Burton de Carpenter l'un des premiers films en occident à avoir essayé de digérer ces turbulentes influences et se regarde aujourd'ui comme un (bon) épisode de Freddy. Presque un plaisir coupable en somme.

NIGHBREED : THE CABAL CUT (1990)

Le fameux montage long de Cabal est l’une des arlésiennes du cinéma fantastique. Lors de sortie en 1990, le studio amputa une heure au deuxième film de Clive Barker et brisa ses rêves de saga horrifique épique. Le cinéaste ne s’en remettra jamais vraiment. Après la découverte il y a quelques années de scènes rejetées que l’on croyait perdues, le fan Russell Cherington s’est mis en tête de livrer un montage le plus complet et le plus proche possible de celui d’origine, nous contant l’odyssée de Boone, accusé d’une série de meurtre qu’il n’a pas commis et qui dans sa fuite découvre Midian, une citée mythique situé sous un cimetière, refuge de monstres rejetés par les hommes. Fatalement, cette nouvelle version déçoit. La multiplicité des supports, certains étant dans un état vraiment catastrophique, empêche l’immersion dans le film. Certaines scènes se retrouvent retranscrites en qualité vhs pour des ajouts vraiment minimes et ces choix de montages alourdissent considérablement le récit. Cependant ce que le film perd en rythme, il le récupère en profondeur des personnages, le lien unissant Boone et sa petite amie Lori gagne en intensité et la place de Baphomet, cette entité noire créatrice de Midian, est beaucoup mieux définie en étant remise au centre du récit. Au final, il faut juger ce Cabal Cut pour ce qu’il est : non pas un director’s cut mais bel et bien un bootleg. Un work-in-progress (nous en avons vu la version 6 !) qui ne pourra continuer d’avancer et d’évoluer que s’il est vu et soutenu.

CANDYMAN (1992)

On connait tous l'histoire: Dites cinq fois son nom devant un miroir et le Candyman apparaitra pour se venger. De l'horreur à base de vieille légende urbaine et du romantisme exacerbé, pas de doute, le film porte la marque de son auteur, mais aussi celle de son réalisateur Bernard Rose (le formidable Paperhouse et dernierement Mr. Nice avec Rhys Ifans). Dès le stade de l'écriture du scénario, Rose transpose la localisation du recit de Liverpool aux quartiers pauvres de Chicago et change la couleur de peau du boogeyman. Un fond social pour du fantastique pur et dur: une formule qui depuis à fait école et qu'on retrouve encore fréquement aujourd'hui dans des réussites comme Heartless de Philip Ridley ou bien Citadel de Ciaran Foy. Si on ajoute à cela l'excellence des interprètes et la beauté malsaine de la B.O. de Philip Glass, Candyman s'impose aujourd'hui comme une des rares réussites du cinéma d'horreur dans les années 90, époque où, souvenez-vous, le genre fut bien moribond.

Clément Gérardo

par Palpix

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