La Saga Freddy

La Saga Freddy

Parmi les figures les plus cultes du cinéma d'horreur, on trouve un grand brûlé, maillot rayé et griffes aiguisées, prêt à vous poursuivre dans votre sommeil le plus profond. Freddy en a vu de toutes les couleurs, icône en un film, croque-mitaine farceur dans les suivants, triste bouffon à la fin des 80's, avant de sortir une dernière fois de la nuit dans un ultime baroud d'honneur. Retour en détails sur une saga cauchemardesque.

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LES GRIFFES DE LA NUIT Wes Craven, 1984

Bodycount: 4

Plus belle mort: La toute première du film et de la série, où Tina se fait trainer aux murs et au plafond à bout de griffes sous les yeux de son copain par un Freddy invisible.

Plus belle réplique: Surtout, fais attention, t’endors pas

Anecdote: Wes Craven s’est inspiré d’articles de l’époque relatant des faits médicaux réels : plusieurs jeunes réfugiés cambodgiens venus fuir la dictature en Californie ont commencé à souffrir de cauchemars très violents, au point de tenter de rester éveillés le plus longtemps possible. Après avoir fini par tomber de fatigue, ils sont morts dans leur sommeil sans qu’aucune explication scientifique n’ait pu être fournie.

Critique: 1,2, Freddy's coming for you… Freddy Krueger sort tout d’abord d’une comptine enfantine, d’un imaginaire collectif qui fait de lui le croque mitaine-ultime, presque une allégorie de la peur, de la mort ou même de l’âge adulte, selon les interprétations. Freddy prend en effet tout son temps pour apparaitre en chair en os, il n’est d’abord qu’une silhouette ou un gant, et il lui faut attendre le 2e film pour avoir droit à son premier gros plan, et pour qu’il développe sa personnalité bavarde et cynique. Ce qui ne l’empêche pas de commettre, des ce premier volume, certaines des morts les plus marquantes de la série. La théorie des rêves personnalisés selon chaque victime n’est ici encore qu’esquissée, mais Les Griffes de la nuit est l’épisode qui mise avec le plus de sérieux sur son ambiance irréelle de scènes cauchemardesques justement ancrées dans le réel, à l’image de cette scène iconique de la main de Freddy qui apparait entre jambes de Nancy dans sa baignoire. La production, flairant le bon coup, a imposé à Wes Craven un twist final venant assombrir le happy end original pour mieux annoncer les nombreuses résurrections à venir de son héros, mais ce premier épisode reste aujourd’hui aux yeux de nombreux fans comme le meilleur de la série.

Gregory Coutaut

LA REVANCHE DE FREDDY Jack Sholder, 1985

Bodycount: 7 (et éventuellement quelques gus qui se seraient noyés dans la piscine)

Plus belle mort: Celle du professeur de sport qui, après sa virée en bar SM, se fait fouetter les fesses dans le vestiaire à coup de serviettes, avant d’être lacéré par Freddy.

Plus belle réplique: A présent, vous êtes tous mes enfants, lancé par Freddy, les flammes de l’enfer (ou celles d’un barbecue) dans le dos, devant une foule d’ado en maillots de bain.

Anecdote: Après le triomphe du premier épisode, Wes Craven a déclaré forfait pour celui-ci, d’abord parce qu’il n’imaginait pas une suite à son film, ensuite parce qu’il n’était pas d’accord avec la direction prise par cet épisode (Freddy manipulant ses victimes pour qu’elles commettent des meurtres).

Critique: Mis en place assez rapidement après le succès du premier volet, ce second épisode change de principe : La Revanche de Freddy devient un film de possession, où le héros, possédé par l’esprit du croque-mitaine, se rend bien malgré lui responsable de meurtres. Mais ce qui a fait la touche particulière de cette suite, c’est son sous-texte homoérotique. La Revanche de Freddy passe en effet son temps à disperser dialogues et images ambiguës (voire carrément lourdingues), comme si l’horreur pour le héros était avant tout l’expression de ses sentiments honteux. On se tire le jogging et on se bat les fesses à l’air sur le terrain de sport, on sort dans les bars cuir, on assiste fébrile à la fessée du prof de sport, et puis vient cette scène qui ne laisse plus guère de doute : Jesse, le héros, qui, langue pendante après avoir emballé Lisa (un sosie jeune de Meryl Streep), est pris d’un mouvement de recul, se met la main devant la bouche, fuit (« qu’est-ce que tu as ? Qu’est-ce qui ne va pas Jesse ? », demande l’éconduite), se réfugie enfin chez le copain beau gosse, torse nu dans son lit, et le supplie : « Laisse-moi passer la nuit chez toi ! »). Le copain pourra hurler au secours, il finira par passer à la casserole… celle de Freddy bien sûr. La thèse gay n’a rien de fantaisiste puisqu’elle a été confirmée par le scénariste lui-même, David Chaskin, tandis que Robert Englund a bien conscience de ce qu’il joue. Les excentricités visuelles des épisodes à venir commencent, elle, à s’immiscer peu à peu, pour le meilleur et pour le pire, à l’image de cet œil de Freddy poussant sur une glotte à cette séquence de perruche folle.

Nicolas Bardot

LES GRIFFES DU CAUCHEMAR Chuck Russell, 1987

Bodycount: 5

Plus belle mort: Celle de la jeune malade qui, rêvant de devenir star télé, finit la tête encastrée dans le poste - fais exploser l'audimat, salope!

Plus belle réplique: Dans mes rêves, je suis belle... et méchante!, par une des jeunes patientes, lookée comme une figurante d'un clip de Pat Benatar.

Anecdote: Appelé à la rescousse suite aux scores mitigés du second épisode, Wes Craven participe ici au scénario et à la production, à partir d’une histoire dont il est l’instigateur. Avec des recettes de 44 053 755 dollars pour un budget initial d’à peine 5 millions, ce Freddy 3 explose les recettes des deux précédents épisodes et s’impose comme le plus rentable de la série, Freddy 4 ayant rapporté un million de plus, mais coûté plus du double. C’est suite à cette sortie triomphale qu’un projet de Freddy Vs Jason fut pour la première fois évoquée entre New Line (détentrice des Freddy) et Paramount (à l’époque détentrice des Vendredi 13).

Critique: Déluge d’effets spéciaux, gags à gogo, mise au premier plan du tueur d’enfants : Freddy 3, les griffes du cauchemar est le film qui change tout dans la série, la renouvelle, l’approfondit. Prenant place dans un hôpital psychiatrique où sont internés des ados suicidaires, le film s’éloigne de cet univers pour pénétrer un second, bien plus original et angoissant : celui de Freddy. Cet épisode est donc le premier à nous présenter le monde des rêves dans lequel évolue le boogeyman, univers magnifié par de sublimes effets spéciaux pourtant créés pour un coût dérisoire. Plus encore, cet épisode est le seul à véritablement exploiter l’idée géniale du premier : faire de Freddy un fantasme adolescent, le film pouvant ainsi être considéré du début à la fin comme un rêve - en dehors de la fameuse scène du squelette vivant. Surtout, Freddy 3 approfondit le mythe en lui octroyant une origine glauque, celle de la conception et de la naissance du tueur. Avec ces atouts dans sa manche (scénario pervers, effets spéciaux dantesques…) alliés à une mise en scène inventive, Chuck Russell ne pouvait que livrer son meilleur film, mais également l’un des meilleurs opus de la saga (le meilleur ?). Pari réussi dans les deux cas.

Anthony Sitruk

LE CAUCHEMAR DE FREDDY Renny Harlin, 1988

Bodycount: 6

Plus belle mort: Le jeune puceau de l'opus précédent qui finit noyé dans son waterbed après qu'une sirène de ses fantasmes lui ai fait de l'œil de l'autre côté du matelas à eau.

Plus belle réplique: Bienvenue au pays des merveilles, Alice! asséné par Krueger à l'héroïne alors que celle-ci se prépare à lui botter le cul façon karatéka dans une église crapoteuse.

Anecdote: Se mangeant une grève des scénaristes en pleine poire, l'équipe du film pond donc un 4e opus qui ressemble plus un melting pot d'idées saugrenues pour assassiner les gosses de la manière la plus cool possible plutôt que d'essayer de farcir la dinde avec un vrai script au potentiel efficace. Si en plus Patricia Arquette refuse de reprendre son rôle et qu'on lui colle une interprète aussi expressive qu'un poulpe (ceci dit, l'ensemble du casting concourt pour l'oscar du comédien le plus mauvais), c'est toutes les fondations d'un projet déjà pas bien solide qui se cassent la gueule. Malheureusement, le film se paye le meilleur score de la saga au box-office et engendre forcément une suite inutile.

Critique: Episode de trop qui ne sert à rien sinon à évacuer les derniers descendant des bourreaux d'Elm street et passer le relais une autre progéniture évidemment futurs macchabés en sursis, Le Cauchemar de Freddy vient sonner le glas d'une franchise qui s'oriente définitivement vers le n'importe quoi. Le croquemitaine aux griffes d'acier perd toute sa superbe et devient un vrai pantin de la vanne qui préfère se fourvoyer dans un festival de scènes ridicules (Freddy va la plage après s'est fendu d'un clin d'il aux Dents de la mer, Freddy bouffe des olives vivantes sur une pizza, Freddy épluche une pomme avec ses griffes, etc.) plutôt que d'épouvanter le spectateur pourtant plus heureux quand on lui fout les chocottes et qu'on joue avec ses peurs primales. Reste que cette 3e séquelle n'est pas avare en morts (c'est même le plus gros score du brulé au pull rayé) mais le film reste chiche en hémoglobine. Pour ce qui est devenu un slasher, ça la fout mal quand même.

Christophe Chenallet

L'ENFANT DU CAUCHEMAR Stephen Hopkins, 1990

Bodycount: 3

Plus belle mort: Une fusion entre un homme et une moto façon bioméca avant que l’hybride finisse éclaté contre un camion comme un vulgaire moustique sur un pare-choc.

Plus belle réplique: Bon appétit, pétasse !, déclamé par un Krueger déguisé en cuistot avant de gaver comme une dinde en période de Noël une petite bourgeoise pleurnicheuse.

Anecdote: Puisqu’il n’y pas grand-chose à retenir de ce film, il faut au moins reconnaitre qu’il a réussi à lancer la carrière de Stephen Hopkins (L’Ombre et la proie, Judgment night et la fameuse série 24). Car avec seulement deux mois pour assurer le tournage et le montage de l’ensemble, la réussite de ce tour de force a valu au réalisateur la confiance des producteurs qui lui ont ensuite confié la réalisation de Predator 2.

Critique: On savait que l’univers onirique dans lequel évolue le croquemitaine était sans limite et propice à tous les débordements mais dans ce cinquième épisode, c’est le grand n’importe quoi qui règne. On ne pourra pas dire non plus que les responsables ne cherchent pas à faire dans l’originalité (le final du film semble évoluer dans une œuvre de Eischer). Mais si c’est simplement pour combler le néant scénaristique (le script était en permanence (ré)écrit pendant le tournage), tout ça en devient vite pénible. Et si, en plus, l’ami Freddy se retrouve au quasi chômage technique dans le dépeçage de son prochain, il ne reste plus rien à sauver dans l’affaire si ce n’est la bonne mise en scène de Stephen Hopkins qui sauve les meubles comme il le peut, et, mais tout est relatif, un générique de fin sur un mauvais hip hop énervé (les fans de LL Cool J ou MC Hammer période 80s seront aux anges).

Christophe Chenallet

LA FIN DE FREDDY Rachel Talalay, 1992

Bodycount: 3

Plus belle mort: Devant la nullité du produit, ce n'est pas la plus belle mort que l'on retiendra mais plutôt la plus ridicule, celle où un petit fumeur de joints se retrouve coincé dans un jeu vidéo et se fait secouer comme un cocotier (bruitages de cartoons en prime) par un Freddy virtuel avant de tomber dans le gouffre de l'enfer. Ridicule!

Plus belle réplique: Là encore, en raison de la pauvreté intégrale de l'ensemble on retiendra plutôt l'ânerie d'un "J'ai battu mon record" clamé par un Krueger découvrant son score au jeu vidéo de l'enfer et se tapant la cuisse comme un vieux briscard un peu trop arrosé de pastis.

Anecdote: Rachel Talalay et Michael De Luca décidèrent, afin d'étoffer leur script, d'utiliser la technique du caméo pour essayer de créer la même ambiance que David Lynch sur sa série Twin Peaks (Hum…). Du coup, le film se retrouve avec les participations anecdotiques de Roseanne Barr et Tom Arnold dans une scène rappelant l'ambiance des 2000 maniacs de H. G. Lewis, avant que Johnny Depp (ancienne victime du premier volet) nous fasse la morale sur l'utilisation de drogue et se prenne un coup de poêle sur le coin de la tronche et qu'Alice Cooper vienne jouer un beau-père fouettard aviné. C'est ce qu'on appelle du remplissage de luxe!

Critique: D'une affligeante bêtise et fabriqué à l'anti-rythme, ce 6e volet des aventures du boogeyman au pull rayé ne possède vraiment que l'argument de son utilisation de la 3D (en salle) pour appâter la chaland. Et quand on voit la manière dont elle est amenée on se demande si cet Ultime cauchemar n'est en fait pas une parodie de la saga. C'est bien simple, Talalay arrive à faire encore plus mauvais que ses prédécesseurs. Et quand on voit dans les bonus du dvd que la réalisatrice et le producteur sont a deux doigts de présenter leurs excuses ca veut tout dire. En fait, si on ne devait garder qu'une seule idée du film, ce serait cette tentative de légitimer le point crucial de l'histoire (l'enfant de Freddy) en composant un ersatz de back story au croquemitaine. Résultat, on apprend que Krueger était déjà dérangé dans sa tête quand, enfant, il éclatait des hamsters à coup de marteau avant de se faire insulter par les autres élèves de "fils de 100 maniaques" et que, adolescent, il se faisait cogner par un père adoptif. Mais tout cela est bien trop mal exploité et intégré pour qu'on excuse le minable ensemble.

Christophe Chenallet

FREDDY SORT DE LA NUIT Wes Craven, 1995

Bodycount: 4

Plus belle mort: La nounou, jouée par la fille de Wes Craven, et qui, en écho au premier épisode, finit par être saignée au plafond, victime malheureuse d’un « chat écorché » initié par Freddy.

Plus belle réplique: J’t'ai manqué, hein ?, adressé à Heather Langenkamp par un Freddy sorti du placard.

Anecdote: Le nouveau gant mécanique de Freddy, qu’on découvre au début du film, sur le tournage, a été conçu selon le design du gant qui apparaissait sur l’affiche originale du premier épisode de la saga.

Critique: Après un premier épisode culte et deux suivants joyeusement rigolards, il ne restait plus à la saga Freddy qu’une pioche pour creuser, creuser, et creuser encore plus profond. Jusqu’au 6e épisode, insulte finale, et pour lequel Rachel Talalay mériterait de recevoir une pluie d’œufs pourris sur la figure à chacune de ses sorties. Freddy, sorti de la nuit, renaît de ses cendres. C’est Wes Craven qui, dix ans plus tard, reprend les rênes pour recoller les morceaux et, en même temps qu’il achève la saga, emprunte une nouvelle direction. Stop les délires cartoon, les blagues de Freddy, l’accumulation mécanico-débile de scènes de rêves. Freddy sort de la nuit joue avec ingéniosité la carte du méta-film, jouant sur les mises en abyme du film dans le film et du héros fictif se retrouvant projeté dans la réalité, hésitation fantastique qui était déjà la clef du premier épisode (ou comment les rêves prenaient le pas sur le réel), et qui se retrouve ici au cœur d’une métaphore du cinéma, terrain de jeu que Craven investira à nouveau pour la saga Scream. Certes, le film s’enlise dans sa seconde partie, notamment avec la résurgence des délires couillons (Freddy jouant aux marionnettes avec le gamin sur l’autoroute, le coup de la langue géante), mais relève un peu la tête. Plutôt bien accueilli par la critique, le film, sans être un bide, réalise le score le plus modeste de la série. L’heure du croque-mitaine semble bien passée.

Nicolas Bardot

par Nicolas Bardot

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