Les cauchemars dessinés de Junji Ito

Tomie Unlimited est diffusé ce soir dans le cadre de l'Étrange Festival. Le film est adapté des mangas signés Junji Ito. Portrait d'une figure majeure de l'horreur nippone...
Junji Ito a commencé par étudier la chirurgie dentaire, et en a d'ailleurs fait son métier, tout en jonglant avec sa passion du dessin. Est-ce de là que vient son autre passion pour le sadisme, l'horreur, et les visages déformés? Junji Ito dessine dès son plus jeune âge, inspiré par les œuvres de sa sœur aînée et par celles d'un autre maître du manga d'horreur, Kazuo Umezu. Ito se spécialise dans le même genre, ce qui contraste avec le visage doux et adolescent qu'il affiche encore aujourd'hui à bientôt 50 ans. A la fin des années 80, il est remarqué avec son premier manga, Tomie, racontant l'histoire d'une jeune vengeresse qui ne cesse de se réincarner et régénérer. Honneur suprême: Tomie lui permet de remporter une mention spéciale du prix Kazuo Umezu, présidé par le modèle d'Ito. Tomie expose quelques uns des motifs qui feront l'œuvre de l'auteur, ses héros adolescents, sa violence sadique, son goût pour le pourrissement (si possible du visage), dans une orgie à la fois jouissive et un rien bêtasse.
Son chef d'œuvre, il le signera quelques années plus tard avec Spirale, qui raconte l'histoire d'une petite ville et de ses habitants qui semblent peu à peu hypnotisés par d'étranges spirales apparaissant partout. Junji Ito exploite au mieux son concept littéralement vertigineux, de paranoïa en folie tourbillonnante, l'horreur comme grattée dans la peau de chaque visage horrifié, avec plus de maturité que dans Tomie. Les idées extravagantes d'Ito sont sa marque de fabrique, à l'image des monstres marins dotés de pattes et qui envahissent la terre ferme dans Gyo, ou de ses très nombreuses autres nouvelles.
Au plus fort de la vague horrifique nippone au cinéma, les histoires de Junji Ito ne pouvaient qu'intéresser les producteurs. Tomie en est bientôt à sa dixième déclinaison à l'écran. Mais l'auteur n'a pas souvent été bien servi au cinéma. Uzumaki, adaptation de Spirale réalisée en 2000 par Higuchinsky, est un consternant ratage qui passe complètement à côté de l'extraordinaire potentiel visuel du manga. Les Épouvantails, nouvelle parue en 1991, est adapté en 2001 par Norio Tsuruta (déjà auteur d'un Ring 0 complètement raté), c'est, là encore, un échec artistique. Tomie Unlimited relèvera t-il le niveau et sera t-il fidèle à son titre? Réponse ce soir à l'Étrange Festival...