Londres, au 21ème siècle. Un gouvernement fascite dirige la destinée de l'Angleterre. Un homme portant le masque du célèbre anachiste Guy Fawkes a juré la perte de cet état policier à la propagande omnipotente. Son nom: "V". Alors qu'il prépare une série d'attentats retentissants, il rencontre une jeune femme, Evey.




L’adaptation du comic-book d’Alan Moore et David Lloyd, brûlot anarchiste culte, tenait du défi impossible, de la gageure cinémato- graphique. La noirceur de sa charte visuelle ainsi que l’extrémisme de ses dialo-
 
gues et situations n’autorisaient guère, a priori, la sortie sur les écrans américain d’un tel projet, moins de cinq ans seulement après le 11 septembre. Le pari, osé, a été tenu. Sans être parfait, V pour Vendetta réussit à ne pas trop contredire le texte original, même si Alan Moore n’a pas voulu être associé au projet. Il a gardé en mémoire l’expérience désastreuse de From Hell, autre remarquable bande dessinée portée à l’écran. Rendus célèbres pour la trilogie Matrix, les frères Wachowski ont signé un script bavard mais non dénué d’intérêt. L’action n’est plus ancrée dans notre temps,
 
pour éviter toute vaine polémique, mais dans un futur proche, toujours en Angleterre. L’allégorie des années Thatcher est remplacée par un propos plus universel qui pose la question de la légitimité de la rébellion populaire contre un état fasciste. L’action terroriste de V, fruit d’une manipulation eugéniste, est longtemps dissertée afin d’éviter toute incompré- hension. Le rythme du film est ainsi relativement lent, la parole prenant une importance considérable au détriment de l’action. Le but n’est pas de glorifier la violence mais bien de justifier son utilisation.



V pour Vendetta reste sans cesse sur le fil, entre la grandiloquence et le gro- tesque, surtout quand V part dans de longues tirades sans fin, cherchant, par la rhétorique, à expliquer son combat à la jeune Evey. Si Hugo Weaving garde en permanence le masque de Guy Fawkes, monarchiste qui tenta d’incendier le Parlement anglais en 1605, Natalie Portman a plus de chance. Elle peut imposer son personnage d’orpheline fragile mais déterminée grâce à la beauté de son visage et la fermeté de son regard. Sans elle, le film trop centré sur son discours,
 
perdrait beaucoup de son intérêt, l’émotion manquant cruellement. Les seconds rôles sont beaucoup trop anecdotiques pour venir troubler la linéarité du récit. L’explosion finale, si prévisible dès les premières minutes du film, ne provoque pas l’impact attendu. V pour Vendetta comporte néan- moins quelques scènes marquantes comme l’ap- prentissage d’Evey à la souffrance. James McTeigue, ancien assistant seconde équipe sur de nombreuses superproductions (entre autres, la trilogie Matrix), s’en sort honorablement pour sa première réalisation, même si l’on regrette parfois
 

l’absence d’un grand cinéaste pour sublimer le pesant scénario. N’est pas Terry Gilliam (Brazil) qui veut…