Journal de bord du Festival de Cannes #4

Journal de bord du Festival de Cannes #4

La compétition a pris une toute autre tournure. Passés les brillants Sciamma, Malick et autres Ken Loach, une journée à marquer d’une pierre blanche que celle du mardi 21 mai 2019. Coup sur coup, les aléas du planning ont fait enchaîné aux festivaliers deux mastodontes à différents niveaux.

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Honneur à l’événement du Festival, la présentation en première mondiale de Once upon a time… in Hollywood, neuvième film ultra-attendu de Quentin Tarantino. Projection de presse annulée à la demande express du réalisateur, tweet signé de la main de Quentin priant de ne rien révéler de l’histoire de peur de divulgâcher - comme on dit maintenant - le plaisir du spectateur à venir, tout le stratagème pour faire monter l’envie était bien rôdé. La première projection de presse a électrisé les abords de la salle Debussy comme aux plus belles heures de 2046, Antichrist ou Inside Llewyn Davis (plusieurs centaines de journalistes sont restés sur le carreau).

Au final, Tarantino a surpris son monde. Il livre ici son film le plus mélancolique qui ne se refuse pas quelques trous d’air mais revêt sur l’ensemble une dimension très contemporaine. D’aucuns seront surpris du manque d’humour auquel le réalisateur de Pulp Fiction ou Kill Bill nous avait habitué jusque-là. Même la violence dont il a été à sa manière le réinventeur formel à partir des années 1990 est longtemps absente.

Avec Once upon a time… in Hollywood, Quentin Tarantino raconte avec virtuosité les héros de nos imaginaires de pop-culture. L’année 1969 à Hollywood sur fond d’affaire Manson-Tate (mais cela reste uniquement de l’ordre de l’anecdote). Avec son casting de megastars, la montée des marches a rappelé combien le Festival de Cannes restait la place forte du cinéma d’auteur mondial. Quentin Tarantino, Leonardo DiCaprio, Brad Pitt, Margot Robbie, la Croisette y a même retrouvé un sourire ensoleillé pour l’occasion.

L’autre déflagration de la compétition nous est venue tout droit de l’autre pays du cinéma, la foisonnante Corée du Sud, avec Parasite. Une bombe signée Bong (Joon-ho), le réalisateur de Memories of Murder et The Host. Un choc comme on aime en vivre à Cannes. Une projection de presse hilare et prête à s’enflammer par applaudissements interposés certains twists ou coups d’éclats de mise en scène. Hallucinant. Une séance que j’ai déjà rangé dans mon panthéon personnel avec celles de The Host ou Toni Erdmann. Bong Joon-ho confirme qu’il est l’un des plus grands filmeurs de son époque et nous régale à chaque plan. Rien à jeter, direction artistique, acteurs et actrices, montage, musique,… Un film immense qui pourrait trouver couronne dorée samedi soir au palmarès.

Passons assez vite sur le mauvais élève de la compétition (on en a trouvé un), Frankie de l’Américain Ira Sachs. La caution Huppert a eu raison de la sélection si haut tant cette chronique très verbale avait davantage sa place à Deauville ou Venise plutôt que sur la Croisette. La compétition 2019, d’un niveau rarement atteint, n’autorise pas les petits bras. Une forme qui nous rappelle assez le Copie Conforme d’Abbas Kiarostami, l’ambition en moins.

Rappelons enfin combien la sélection Un Certain Regard a accouché cette année de films hautement recommandables. Après Balagov et Honoré, honneur au galician Oliver Laxe qui avec Viendra le feu aurait très bien pu prétendre à un strapontin en compétition. Même son de cloche avec Lorenzo Mattotti, qui, même si présenter un film d’animation à quelques encablures de la Semaine de la Critique et le formidable J’ai perdu mon corps, n’est pas chose aisée, La Fameuse invasion des ours en Sicile est une merveille graphique de bout en bout.

par Thomas Gastaldi

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